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Tunisie – Jeunesse et sports : L’appel solennel de Haythem Kilani au chef du gouvernement

Haythem Kilani, un jeune avocat, analyste politique, spécialiste des questions de la jeunesse et des sports, est né et a grandi dans une famille qui adule le sport et qui prône le dicton « Un esprit sain dans un corps saint ».

Haythem Kilani a publié une tribune sur les colonnes des médias, dans laquelle il s’adresse au chef du gouvernement désigné, pour l’interpeller sur la situation des jeunes dans le pays, leur souffrance, le manque de moyens de création et d’exploits,  leur mal-être et, surtout, les inégalités des chances entre les régions.

Haythem Kilani prône le droit des jeunes aux moyens de se divertir et de s’adonner à des activités de créativité et de sport, au même titre que leurs droits au travail, à l’éducation, à la santé et à une infrastructure adéquate. Il porte le projet de faire de la Tunisie un pays exportateur de champions de tous genres, plutôt qu’un exportateur de migrants clandestins. Il nourrit, aussi, l’espoir de pouvoir promouvoir l’image de son pays, à travers les exploits de ses jeunes.

« Jeunesse oubliée, délaissée, sacrifiée, désespérée, désenchantée…

Mais, faut-il pour autant baisser les bras et abandonner ? Absolument pas.

Depuis l’indépendance de notre pays et à des degrés de responsabilité différents entre les régimes politiques successifs au pouvoir, notre jeunesse, son sort et ses intérêts n’ont jamais vraiment été la priorité de nos dirigeants.

Dans tous les cas, la majorité des jeunes tunisiens n’ont pas été traités de la même manière et l’égalité en droits ainsi que l’égalité des chances n’ont été que des paroles, paroles, paroles, rien que des paroles…

Personnellement, j’ai toujours vécu à Tunis et j’ai, donc, toujours fait partie de la jeunesse qui a eu plus de chance que celle de la Tunisie profonde.

Qu’en est-il de la Tunisie profonde ?

Certes, cette Tunisie existait et existe encore à Tunis même dans ses quartiers défavorisés. La situation est clairement plus triste et bien plus grave chez nos jeunes des villes du Sud ou du Centre Ouest et Nord-Ouest !

Il est indiscutable que ceux des villes côtières ont eu plus de chance rien que par la présence de la mer et, par conséquent, du tourisme générateur de travail, de richesse et d’infrastructures adéquates.

Ceci étant, malgré ma vie à Tunis, j’ai eu la chance de faire le tour de mon pays plusieurs fois grâce, d’abord, à mes origines purement sudistes, père de Gabès et mère de Gafsa , des parents très attachés à ces deux villes, régulièrement visitées ; grâce ensuite à la profession de mon père, professeur d’éducation physique et entraîneur de Hand-Ball que j’ai dû et pu accompagner lors de ses matchs et stages, mais surtout grâce à ma carrière sportive au sein de plusieurs équipes de Hand-Ball telles que l’Espérance Sportive de Tunis où j’ai grandi, l’AS Ariana, le Club Africain, la Zitouna Sport, la JS Kairouan ainsi que des dizaines de stages en équipe nationale dans les maisons de jeunes de toute la Tunisie ajoutés aux tournois universitaires dans tout le pays avec notre équipe de Hand-Ball de la faculté de Droit et des Sciences Politiques de Tunis ou encore les tournois de Football des équipes d’Avocats auxquels j’ai participé de Bizerte à Djerba…

Ces tournées qui ont duré une trentaine d’années m’ont permis de côtoyer des centaines de jeunes de plusieurs milieux sociaux, de différentes villes et m’ont apporté à leur contact un enrichissement personnel unique et inestimable.

Quelle place tient le sport ?

Hélas, ces périples à travers mon pays m’ont également permis de constater une triste réalité, celle du quotidien des jeunes de la majorité de nos villes tunisiennes, oui, je bien dit la majorité car nous ne voyons la plupart du temps qu’une infime partie de la réalité !

Bien évidemment, nos jeunes manquent de tout, d’écoles proches, d’hôpitaux décents, de routes praticables, d’eau potable, de transport sécurisé et bien sûr de travail.

Mais aussi, et c’est le volet qui m’intéresse, en modeste connaisseur du terrain que je pratique depuis mon enfance, le domaine de la jeunesse et des sports, de terrains de sport, de maisons de jeunes et de culture, de salles de cinéma, de salles de théâtre, etc.

Bref, de tout ce qui est bon pour l’âme et le corps !!!

Nos jeunes ont, certes, besoin d’apprendre, de travailler, d’être soignés… mais ils ont également besoin de créer, de s’amuser, de s’épanouir, de réussir dans des carrières sportives et artistiques.

N’est-il pas vrai qu’un esprit sain se doit d’être dans un corps sain ???

Il faut développer les activités créatrices !

Un jeune qui n’a pas d’espaces de divertissements sportifs ou culturels dignes de ce nom dans son quartier ou dans sa ville, que va-t-il bien pouvoir faire de son temps libre ?

Rien d’étonnant qu’il soit tenté par le tabac, l’alcool, la drogue de différents types y compris les moins coûteux et les plus nocifs pour la santé à l’instar de nos pauvres concitoyens qui ont récemment perdu la vie en consommant de l’alcool frelaté, ou pire encore l’extrémisme religieux, la délinquance, l’immigration clandestine et toute autre forme de désespoir, de fuite ailleurs vers un paradis même imaginaire, qui lui permette de s’échapper à son triste quotidien.

Ce n’est d’ailleurs guère un hasard si nous n’avons pas beaucoup de champions à l’échelle internationale contrairement à plusieurs pays africains qui ont moins de moyens que nous mais qui produisent plus de champions pas seulement en Football mais aussi en athlétisme et autres sports individuels.

Pour ne citer qu’elles, des villes comme Gafsa, Kasserine entre autres peuvent grâce à leur paysage être un parfait terrain naturel pour produire des champions d’athlétisme de haut niveau, à l’instar du fameux et glorieux Gammoudi après qui nous n’avons eu droit qu’à une seule championne, Habiba Ghribi !

La création de pôles sportifs est fortement souhaitée mais aussi facilement réalisable, pourquoi le sport n’a jamais été une priorité dans ce pays ?

A part l’équipe nationale de Football ou quelques sports collectifs tel que le Hand-Ball si cher à mon cœur, les ministres de la Jeunesse et des sports n’ont jamais été capables de diversifier les priorités de leurs programmes. Sachant que les sports individuels sont les plus aptes à faire hisser le drapeau national aux manifestations internationales, but brillamment atteint par nos valeureux champions paralympiques, malgré le manque de moyens et de soutien que déplore leur fédération.

N’est-il pas temps de se rendre compte que le sport n’est pas seulement celui que nous regardons à la télé mais plutôt celui qui fait partie du quotidien des jeunes et des moins jeunes, c’est une tradition à perpétrer, une hygiène de vie à adopter et à faire adopter aux enfants et à tous nos proches.

Malheureusement, nos jeunes préfèrent les salons de thé où ils passent des heures pour ne pas dire des jours à siroter leur café et à fumer leur cigarette ou chicha, quel gâchis !!

Je prends l’exemple impressionnant de la Croatie, pays de seulement quatre millions d’habitants mais où le sport est adulé, faisant gagner à ce pays plusieurs titres internationaux et ayant des champions toutes disciplines sportives confondues.

Je rêve d’une Tunisie sportive, de jeunes tunisiens qui excellent en sport, qui peuvent très bien gagner leur vie grâce à lui et à représenter fièrement et merveilleusement leur pays dans le monde.

Développer un programme de réhabilitation par le sport et la culture

Ce serait d’ailleurs la meilleure des campagnes publicitaires pour promouvoir notre pays plutôt que d’assister meurtri à une Tunisie plus connue pour exporter des immigrés clandestins et non des champions sportifs.

J’ai passé mon enfance et mon adolescence sur les terrains de sport mais aussi dans les maisons de jeunes et de culture où on pouvait pratiquer librement et agréablement nos passions pour la musique, le théâtre, la peinture, les jeux de sociétés, internet… Je ne comprends vraiment pas comment tout cela s’est perdu ?

Aujourd’hui notre jeunesse est sans repères. Seuls les deux axes Sport & Culture peuvent constituer les piliers d’un programme de réhabilitation de ceux qui ne croient plus en leurs capacités, en leur patrie, en leur avenir.

Monsieur le chef de gouvernement désigné, les ministères de la Jeunesse et sports et de la Culture doivent être des ministères prioritaires en ce moment particulier que traverse le pays, dotés de moyens conséquents car ils touchent, en premier lieu, les jeunes, présent et futur de ce pays.

Malgré la situation actuelle difficile et les aspects négatifs que nous vivons, l’espoir demeure.

Une grande partie de nos jeunes continue à s’accrocher, à y croire, ils sont braves, courageux, pleins de bonnes volontés, bravant 1000 difficultés.

Il suffit de voir leurs réalisations artistiques toutes disciplines confondues, les spectacles et les vernissages se succèdent. La vie artistique foisonne, bouillonne même.

D’ailleurs, la période post-révolutionnaire a parfaitement rempli son rôle de faire éclore de nouveaux talents et créations. Il suffit que les ministères intervenants dans ces domaines suivent le rythme. D’abord en commençant par la nomination de ministres habités par la volonté de faire s’épanouir cette jeunesse malmenée. Ils doivent être connaisseurs du domaine sportif pour l’avoir pratiqué, qui ont visité les salles d’exposition, de cinéma, de théâtre, les maisons de jeunes et de culture de ce pays pour qu’ils puissent être à la hauteur des attentes. C’est ainsi qu’ils comprendront les besoins et envies des jeunes d’aujourd’hui et feront le nécessaire pour les accompagner dans leurs rêves et leurs projets.

Quel devrait être le rôle d’un ministre des sports

Un ministre des Sports et de la Jeunesse ne devrait pas diriger son ministère à partir de son bureau climatisé se limitant à des déplacements d’inaugurations ou des manifestations officielles. Il doit aller sur terrain sans prévenir, ressentir le malaise des jeunes, les écouter, essayer d’en comprendre les raisons. Il doit partager quelques balles avec les jeunes d’un quartier défavorisé à la « bat7a » qu’il fera ensuite modifier en terrain de foot en gazon synthétique. Parce que c’est de là que naissent les champions, les vrais et non pas dans les académies de Football aux abonnements astronomiques que le commun des mortels ne pourra jamais se permettre.

La Tunisie post-révolutionnaire se doit de penser à tous ses enfants, les jeunes en premier. Ce sont bien eux qui se sont révoltés contre l’ancien régime qui les avait ignorés réclamant «  travail, liberté et dignité » 

Cette fameuse dignité passe aussi par un terrain de sport et de jeux, une maison de jeunes et de culture dans TOUS les quartiers de la Tunisie.

La mission des futurs ministres sera de réaliser cet objectif, le futur de nos jeunes en dépend.

Pour finir, essayons tous de rester jeunes malgré les années qui passent pour certains d’entre nous. Car chacun de nous n’a pas seulement l’âge de ses artères mais aussi celui de son cœur. Il peut rester jeune toute la vie.

S’il y a bien une chose dont nous avons tous grand besoin en ce moment, c’est bien de sport et de culture.

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