Economie

Analyse – La gestion pyramidale des finances publiques exposerait la Tunisie au défaut de paiement (2/2)

Analyse – La gestion pyramidale des finances publiques exposerait la Tunisie au défaut de paiement (2/2)

Dans une note récente, l’agence d’analyses économiques « Bloomberg » a indiqué que le nombre des pays en développement et qui sont en difficultés de paiement de leur dette, a doublé. Le Salvador, le Ghana, l’Égypte, la Tunisie et le Pakistan apparaissant particulièrement vulnérables.

Et pour cause, les obligations souveraines d’environ un quart des pays suivis dans l’indice Bloomberg des pays émergents (EM), Aggregate Sovereign se négocient difficilement. Evidemment, les échanges sur le marché ne déterminent pas quels pays seront réellement en mesure de payer leur dette, et tous ne sont pas susceptibles de faire défaut.

Fortes probabilités de défaut

Les rendements des obligations souveraines ont chuté de près de 20% cette année, dépassant déjà les pertes annuelles qu’elle ont subie lors de la crise financière mondiale de 2008. En partie, ceci revient à l’enregistrement de pertes importantes sur les marchés des taux sous-jacents, mais la détérioration des profils des crédits a été un facteur déterminant de cette situation en particulier pour les nations les plus vulnérables.

Samy Muaddi, manager de portefeuille chez T. Rowe Price qui gère environ 6,2 milliards de dollars d’actifs, évoque l’une des pires épisodes d’échanges des titres de dette sur les marchés émergents. 

Il souligne que plusieurs marchés émergents ont connu une précipitation pour vendre des obligations étrangères pendant la pandémie du Covid lorsque les besoins de dépenses étaient élevés et les coûts d’emprunt étaient faibles. Maintenant les banques centrales des marchés développés resserrent leurs politiques monétaires ce qui éloigne les flux de capitaux des marchés émergents et impose des coûts élevés, augmentant ainsi les risques.

« Il s’agit d’une période critique et pleine de défis pour de nombreux pays en développement », a déclaré Muaddi.

L’aversion au risque s’est également propagée aux traders actifs qui s’assurent contre le défaut sur les marchés émergents. Le coût persiste juste en dessous du pic observé lorsque les troupes russes ont envahi l’Ukraine plus tôt cette année. 

« Les choses peuvent empirer avant de s’améliorer », a assuré Caesar Maasry, responsable de la stratégie multi-actifs pour les marchés émergents chez Goldman Sachs Group Inc., lors d’une intervention à un webinaire organisé par Bloomberg. 

Bloomberg précise aussi que la flambée des spreads obligataires est également une préoccupation particulière pour les banques centrales, qui tendent vers un compromis de plus en plus difficile entre le resserrement des taux d’intérêt pour protéger les réserves en devises et l’action pour garder le taux d’inflation dans un niveau modérée.

Gestion pyramidale des finances publiques et risques pour la Tunisie

Depuis plusieurs années, les finances publiques tunisiennes ont été dopées par des crédits intérieurs et extérieurs obtenus et remboursés en mode pyramidal dans le sens où l’engagement auprès d’un créancier est fait pour honorer un engagement précédent que ce soit auprès du même créancier ou au niveau d’un autre.

La boucle était presque bouclée de bout en bout et tous les crédits ne servent que pour le remboursement d’autres crédits créant aussi une bulle de liquidité fictive qui commence depuis peu à s’éclater avec l’assèchement des crédits extérieurs. Les autorités se sont retournées alors vers les banques qui se sont inscrites au même jeu jusqu’au moment ou à partir du mois de mai dernier une échéance de bons d’état de près de 800 millions de dinars a été reportée faute de liquidités.

Toutefois, le système continue a fonctionné à travers la conversion des dettes intérieurs à court terme en titres de créances à long terme peu importe le coût de plus en plus exorbitant de la dette publique, l’élargissement du gap budgétaire et l’échéance proche du blocage de tout cet enchainement.

Il est à noter la maison de notation Moody’s a mis en garde dans un rapport récent contre la forte exposition des banques tunisiennes aux risques liés particulièrement aux prêts qu’elles accordent à l’Etat, à court de liquidités, et a considéré leurs perspectives comme négatives en raison de l’environnement opérationnel marqué par la montée des troubles institutionnels et économiques.

L’exposition des banques tunisiennes au risque encouru par le gouvernement, notamment en raison de leurs souscriptions aux bons du Trésor et leur participation aux prêts syndiqués en devises à l’État et l’octroi des prêts aux entreprises publiques, est estimée à environ 1,2 fois leurs capitaux propres.

L’exposition des banques à la dette publique pourrait même augmenter, car le financement du FMI et des bailleurs de fonds du gouvernement tunisien reste conditionné par la réalisation de réformes économiques structurelles qui n’ont pas encore fait l’objet de consensus, indique l’agence.

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