Le lancement depuis la Tunisie, en juin 2025, de la caravane “Soumoud” (Ténacité) en solidarité avec Gaza a suscité une attention mondiale. Cette initiative citoyenne – un convoi terrestre de centaines de personnes visant à dénoncer le blocus imposé à Gaza – a été diversement perçue par les médias selon les régions.
Tour d’horizon des positions médiatiques et des réactions officielles, du Maghreb aux États-Unis, en passant par le monde arabe, Israël, l’Europe et l’Asie, entre soutien enthousiaste, couverture factuelle et critiques ouvertes.
Au Maghreb : enthousiasme populaire et soutien officiel
Dans les pays du Maghreb, la caravane Soumoud a été largement saluée comme un élan de solidarité régional. En Tunisie, d’où est parti le convoi le 9 juin, la mobilisation de la société civile a été massive.
Environ 1 500 à 2 000 participants ont pu prendre le départ pour des raisons logistiques. La presse Maghrebine a insisté sur le caractère inédit de ce convoi rassemblant des citoyens de tout le Maghreb – Tunisiens, Algériens, Marocains, Mauritaniens, Libyens – unis derrière l’objectif de « briser le blocus de Gaza et porter un message clair contre le génocide ».
En Algérie, la tonalité médiatique a également été complétement favorable. Un « Premier convoi de la ténacité » a quitté Alger pour rejoindre la caravane tunisienne, avec plusieurs centaines de volontaires algériens, dont des parlementaires et même des diplomates embarqués.
Cette participation de responsables officiels traduit un soutien institutionnel notable en Algérie. « C’est un message aux habitants de Gaza : vous n’êtes pas seuls », a déclaré depuis Alger le cheikh Yahya Sari, figure de l’initiative, soulignant l’adhésion populaire et officielle à la cause palestinienne.
Au Maroc, malgré la normalisation officielle des relations avec Israël, des médias comme L’Opinion ont mis en avant « le Maghreb en marche », décrivant la caravane comme « solidaire » et saluant la coordination maghrébine au-delà des frontières tunisiennes. Cette couverture positive suggère que la solidarité envers Gaza transcende les clivages politiques dans la région.
En Égypte : discrétion médiatique et prudence des autorités
En Égypte, principal pays de transit prévu, la caravane Soumoud est abordée avec beaucoup plus de réserve. La presse égyptienne dominante est restée jusqu’ici relativement discrète sur le sujet, se contentant pour l’essentiel de relayer les faits rapportés par les agences de presse.
Les quelques mentions soulignent le caractère « symbolique » du convoi et notent surtout les enjeux de sécurité. En effet, Le Caire n’a pas (encore) donné son feu vert au passage de la caravane sur son territoire. Les organisateurs tunisiens ont admis que les permis pour traverser la frontière égyptienne n’étaient pas garantis, même s’ils affirment avoir reçu des signaux officieux « rassurants » quant à une possible coopération du côté égyptien.
Cette prudence s’explique par la sensibilité du contexte sécuritaire dans le Sinaï. Officiellement, l’accès à la zone frontalière de Rafah est strictement contrôlé par l’armée égyptienne, qui considère le secteur comme une zone militaire interdite aux non-résidents.
Le gouvernement du Caire n’a fait aucune déclaration publique sur la caravane, mais des observateurs égyptiens doutent qu’il laisse des milliers de manifestants étrangers marcher vers Rafah.
D’autant que l’État égyptien réprime déjà vigoureusement toute initiative de solidarité interne avec Gaza : pas plus tard que début mai, plus de 180 Égyptiens avaient été arrêtés pour avoir participé à des rassemblements pro-Gaza, certains inculpés pour « appartenance à une organisation terroriste » simplement pour avoir exprimé leur soutien aux Palestiniens.
Dans ce contexte, Le Caire semble déterminé à éviter tout mouvement de foule incontrôlé à sa frontière avec Gaza. La caravane Soumoud risque donc de se heurter à un mur de réalisme sécuritaire, malgré les contacts en coulisses entre organisateurs et autorités.
Dans le monde arabe : une couverture solidaire et engagée
Au-delà du Maghreb et de l’Égypte, la caravane Soumoud a bénéficié d’une couverture très favorable dans de nombreux médias du monde arabe. La tonalité dominante est à la solidarité et à l’indignation face au sort de Gaza.
La presse panarabe et du Moyen-Orient souligne le caractère courageux de l’initiative citoyenne. Aljazeera a décrit sur son site que des milliers d’activistes à travers le monde marchant vers Gaza pour briser le siège et attirer l’attention sur « le génocide qu’Israël y perpètre ».
Des médias arabophones comme Asharq al-Awsat ou Arab News (proches de l’Arabie saoudite) ont repris surtout les dépêches factuelles, mentionnant le passage du convoi en Libye et les slogans entonnés par les participants – « Résistance, résistance ! », « Vers Gaza nous irons par millions » – sans commentaires éditoriaux appuyés.
Ces sources relèvent toutefois que l’initiative a démarré au moment de l’interception d’une flottille maritime par Israël, avec Greta Thunberg à son bord, ce qui place la caravane dans une dynamique globale de contestation du blocus.
Dans la presse du Golfe, aucune critique ouverte de la caravane ne transparaît ; au contraire, l’accent est mis sur la crise humanitaire à Gaza qui la motive. Des médias comme Roya News en Jordanie ou The New Arab ont couvert presque en temps réel l’avancée du convoi en Libye, accueillie par des « foules en liesse » à Zawiya. Ils soulignent le « message politique et moral » porté par ces volontaires arabes et maghrébins « épris de liberté », face à l’inaction des gouvernements.
On y retrouve des témoignages exaltant « une initiative populaire et civile en réponse au génocide en cours à Gaza : nous refusons de rester silencieux », selon un coordinateur tunisien cité par The New Arab. Même les organisations caritatives sont mises en avant : en Libye, la presse locale salue la participation d’associations telles que Jerusalem Relief ou la campagne de Zliten pour Al-Aqsa.
Le monde arabe médiatique, dans son ensemble, se montre donc favorable à la caravane Soumoud, perçue comme le sursaut des peuples là où les États ont failli.
En Israël : scepticisme et rappel du contexte sécuritaire
Côté israélien, la caravane est accueillie avec hostilité ou au mieux du scepticisme. Les médias israéliens ont certes relaté l’information du départ du convoi, mais en la replaçant systématiquement dans le contexte de la guerre en cours contre le Hamas.
Le Times of Israel, par exemple, rapporte sobrement qu’un convoi d’activistes a quitté Tunis pour Gaza en voulant « briser le siège », tout en rappelant que ce siège a été resserré après l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023 et les massacres commis en Israël.
Le journal souligne que les organisateurs accusent les gouvernements arabes d’inaction face à la guerre de 20 mois entre Israël et le Hamas, mais il contrebalance en rappelant que cette guerre a été « déclenchée par l’invasion du Hamas qui a tué 1 200 personnes et pris 251 otages ». Cet encadrement narratif vise à justifier les actes inhumains d Israël et le blocus aux yeux du lecteur, en le liant à des impératifs de sécurité et à la menace terroriste.
Les médias israéliens les plus à droite vont plus loin dans la critique. Le site Israel National News (Arutz Sheva) évoque un convoi « pro-Hamas », insistant sur le fait qu’il est initié par la Tunisie, « un pays qui refuse toute normalisation avec Israël ». Le journal rappelle ainsi que Tunis a réitéré son refus de reconnaître Israël même après les Accords d’Abraham. Ce rappel historique sert à délégitimer l’intention humanitaire de la caravane en la peignant comme un geste politique hostile à Israël.
De même, certains commentateurs israéliens ou proches du lobby pro-israélien dénoncent la caravane Soumoud comme une opération de communication profitant au Hamas. Des think-tanks comme la Fondation pour la Défense des Démocraties (FDD), à Washington, l’ont qualifiée de « convoi de la résilience pro-Hamas », arguant qu’il s’agit d’une campagne orchestrée pour mettre la pression sur l’Égypte et Israël et ouvrir une brèche dans le blocus.
Dans l’ensemble, la position israélienne – officielle ou médiatique – demeure inflexible : pas question de laisser quiconque “briser” le blocus de Gaza. Le gouvernement de Benjamin Netanyahou n’a pas eu besoin de s’exprimer publiquement sur la caravane : ses actes parlent d’eux-mêmes.
L’interception musclée, le 9 juin, du bateau humanitaire “Madleen” en Méditerranée, avec à son bord Greta Thunberg et d’autres militants, a envoyé un signal clair. Israël est prêt à employer la force, sur mer comme sur terre, pour empêcher tout contournement de son blocus militaro-humanitaire.
La coordination sécuritaire avec l’Égypte devrait, de fait, empêcher la caravane terrestre d’approcher de Rafah. Pour les médias israéliens, il est acquis que le convoi sera bloqué bien avant Gaza, et n’aura tout au plus qu’une portée symbolique.
En Europe : relais médiatique et soutien militant modéré
En Europe, l’initiative tunisienne a trouvé un certain écho médiatique, même si elle a été éclipsée par d’autres actualités de la guerre. Les agences de presse internationales – AFP, AP, Reuters – ont toutes diffusé des dépêches sur la caravane Soumoud, reprises dans de nombreux pays européens. France 24, Euronews, BBC ou Deutsche Welle ont relaté le départ du convoi dans leurs éditions d’information, insistant généralement sur le caractère « symbolique » de l’action.
Le récit est souvent factuel : on mentionne les bus et voitures particuliers qui traverseront la Tunisie, la Libye puis l’Égypte pour tenter d’atteindre Rafah. On cite les organisateurs tunisiens qui réclament « la levée immédiate du siège injuste sur Gaza », tout en notant qu’eux-mêmes n’espèrent pas vraiment entrer dans l’enclave compte tenu des refus attendus. Cette lucidité se retrouve dans les propos rapportés d’un activiste palestinien de Tunis, qui affirme que même sans atteindre Gaza, la caravane envoie « un message de défi et de volonté » au monde.
La tonalité de la presse européenne est globalement empathique envers la démarche humanitaire, sans être aussi militante que dans les médias arabes. Les journaux rappellent systématiquement le contexte : une population gazaouie de 2,2 millions d’habitants sous blocus depuis 2007, confrontée à une catastrophe humanitaire telle que l’ONU décrit Gaza comme « l’endroit le plus affamé de la Terre » .
Les risques de famine et les pénuries de base sont soulignés, ce qui donne du crédit moral à l’action des militants. Par ailleurs, la synchronisation avec la flottille maritime a été relevée par plusieurs médias. Euronews note par exemple que le convoi terrestre est parti au moment où la coalition Freedom Flotilla voyait son bateau saisi par Israël, avec Greta Thunberg détenue puis expulsée.
Quelques personnalités et élus européens se sont impliqués dans ces initiatives, renforçant leur couverture. La présence de Greta Thunberg a évidemment attiré l’attention médiatique. Rima Abdul-Malak Hassan, une eurodéputée franco-palestinienne, était également du voyage en mer. Leur implication a suscité des réactions contrastées en Europe : applaudie à gauche comme un acte de solidarité concret, et critiquée à droite comme un encouragement à enfreindre les blocus légaux.
Cependant, aucun gouvernement européen n’a commenté officiellement la caravane Soumoud. Bruxelles et les capitales de l’UE restent focalisées sur les canaux humanitaires officiels, évitant de cautionner des actions non coordonnées avec Israël ou l’Égypte.
La société civile européenne, en revanche, suit de près ces initiatives : des ONG, notamment en France, en Espagne ou aux Pays-Bas, ont relayé les appels de la caravane et de la Marche mondiale vers Gaza prévue mi-juin.
On notera d’ailleurs que plusieurs centaines d’Européens participent indirectement au mouvement : attendus au Caire le 12 juin, ces militants de 50 nationalités différentes (dont des membres de Code Pink aux USA ou de Jewish Voice for Labour au Royaume-Uni) doivent rejoindre la marche sur Rafah aux côtés de la caravane maghrébine.
Les médias européens en rendent compte comme d’une mobilisation transnationale inédite, reflet d’une opinion publique européenne de plus en plus sensibilisée au sort de Gaza.
Aux États-Unis : peu de réactions officielles, une couverture humanitaire
Outre-Atlantique, la caravane Soumoud n’a pas fait la « Une » des grands réseaux d’info, mais elle a été tout de même signalée par les médias d’audience nationale via les dépêches d’agence.
Associated Press (AP), notamment, a consacré un reportage au convoi lors de son arrivée en Libye. L’article, repris par le Washington Post, décrit un cortège de 1 500 personnes venant d’Algérie et de Tunisie, accueilli à Zawiya par des sympathisants libyens, et visant à atteindre Rafah en passant par l’Égypte.
AP souligne que les autorités tunisiennes et libyennes ont coopéré pour faciliter le trajet, assurant une progression sans encombre jusqu’à la frontière égyptienne. Des témoignages de participants y sont relatés, comme celui d’une Algérienne se félicitant de l’aide logistique fournie, ou d’une organisatrice affirmant : « même des réponses violentes ne nous feront pas peur ». Cette narration met en avant la détermination pacifique des militants.
Les grands médias télévisés américains n’ont guère débattu de la caravane elle-même, étant davantage focalisés sur la situation militaire et diplomatique au Proche-Orient. Néanmoins, l’aspect humanitaire de la démarche trouve un écho aux États-Unis dans les milieux progressistes.
Des organisations comme CodePink (citées plus haut) ou le Palestinian Youth Movement ont diffusé sur les réseaux sociaux des images du départ de Tunis pour mobiliser l’opinion américaine anti-guerre. L’émission indépendante Democracy Now! a, dans son journal, évoqué « un convoi terrestre d’avocats, de médecins et d’activistes parti de Tunis vers Rafah » dans le cadre de la Marche globale pour Gaza. Cette couverture alternative insiste sur la dimension de protestation non-violente contre le blocus israélien.
Sur le plan officiel, Washington observe le phénomène en silence. Aucune déclaration du Département d’État n’a été faite concernant la caravane Soumoud, signe d’une prudence calculée. Les États-Unis soutiennent publiquement l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza par des canaux encadrés (Nations unies, Égypte, etc.), mais ils ne peuvent guère approuver une initiative qui défie la coordination internationale en place.
D’autant plus que Washington continue d’adhérer au discours israélien liant l’allègement du blocus à la question des otages et de la démilitarisation du Hamas. En creux, l’absence de condamnation ou d’avertissement explicite envers les citoyens américains éventuellement impliqués dans la marche (il y en aura quelques-uns) témoigne d’une attitude attentiste.
Les médias américains traditionnels, eux, constatent le fait : la caravane est présentée comme une démarche humanitaire symbolique, mise en parallèle avec l’abordage du bateau de Greta Thunberg et la situation catastrophique à Gaza (AP rappelle que « plus de 55 000 Palestiniens ont été tués en 20 mois de guerre, selon les autorités locales », et que le blocus a aggravé la pénurie alimentaire à des niveaux sans précédent).
Ainsi, l’opinion publique américaine est doucement informée de cette action de solidarité internationale, sans qu’un discours polémique ne l’entoure pour l’instant.
En Asie : écho dans les pays musulmans, relais par les agences
Le continent asiatique, vaste et pluriel, a réagi diversement selon les pays, souvent en fonction de leur proximité avec la cause palestinienne. Dans les grandes démocraties d’Asie, la caravane Soumoud a été principalement couverte via les agences de presse mondiales.
Par exemple, en Inde, le quotidien The Hindu a publié un article détaillant le départ des militants tunisiens cherchant à « rompre le siège », reprenant la dépêche AFP/AP avec un angle informatif. La tonalité y est neutre, l’Inde entretenant par ailleurs de bonnes relations avec Israël.
En Chine, les médias d’État ont traité l’information de manière factuelle également, Pékin soutenant diplomatiquement les droits des Palestiniens tout en évitant de cautionner toute initiative non encadrée par l’ONU. On note cependant que l’agence de presse turque Anadolu, très active, a largement diffusé des témoignages depuis la caravane – un porte-parole tunisien y décrit l’enthousiasme des villes traversées et la « haie d’accueil de milliers de personnes » jusqu’à la frontière libyenne.
Ces éléments ont été repris dans plusieurs médias asiatiques et africains, montrant l’intérêt de la Turquie et d’autres pays musulmans pour l’initiative.
Dans les pays majoritairement musulmans d’Asie, justement, l’accueil médiatique est pleinement favorable. Au Pakistan, la nouvelle a été relayée par les grands journaux anglophones et ourdophones. Le très respecté Dawn a par exemple titré « Un convoi pour Gaza entre en Libye depuis la Tunisie », décrivant positivement « des centaines d’activistes pro-palestiniens » déterminés à « continuer vers l’est jusqu’à briser le blocus ». Le fait que cette source souligne les slogans de « résistance » scandés par les participants et la référence à Gaza comme « territoire meurtri par la guerre » indique une nette empathie.
En Iran, le régime – farouche soutien de la cause palestinienne – a célébré l’initiative à travers ses médias officiels (Press TV, l’agence Irna, etc.) et ses canaux internationaux comme HispanTV en espagnol. Le narratif iranien présente la caravane Soumoud comme la preuve que « les peuples musulmans se lèvent contre le génocide à Gaza », tout en dénonçant l’inaction des gouvernements arabes modérés.
En Turquie, outre la couverture de l’agence Anadolu, des responsables politiques ont salué publiquement l’effort des militants maghrébins. Le parti au pouvoir AKP d’Erdogan a, via des tweets de certains de ses députés, qualifié la caravane de « démarche humanitaire honorable » et pressé l’Égypte de laisser passer le convoi. Là encore, la presse turque pro-gouvernementale relaie ces éléments dans un esprit de solidarité islamique.
Enfin, dans le reste de l’Asie (Asie du Sud-Est, Japon, Corée, etc.), la caravane n’a guère fait l’objet d’une attention particulière, excepté dans les cercles propalestiniens militants. Par exemple, en Malaisie et en Indonésie, des ONG locales ont diffusé des communiqués de soutien, et quelques médias en ligne en ont fait mention en reprenant des brèves d’agence.
De façon générale, l’Asie a été un relais plutôt qu’une source de réactions autonomes sur ce sujet. Les voix les plus fortes venant du continent restent celles de pays comme la Turquie, l’Iran, le Pakistan ou la Malaisie – c’est-à-dire des pays à majorité musulmane – qui voient dans Soumoud un écho à leurs propres engagements en faveur de Gaza.
Constat Général: défendre une solidarité citoyenne légitime
Au terme de ce panorama mondial, une constante se dégage : la caravane Soumoud est perçue, dans la plupart des régions, comme une expression légitime de la solidarité citoyenne envers la population de Gaza assiégée. Certes, les réactions divergent.
Dans le monde arabe et au Maghreb, les médias et de larges pans de l’opinion publique embrassent la cause avec ferveur, là où en Israël on la rejette en bloc et où en Occident on l’observe prudemment. Mais partout transparaît le fait que cette initiative a su imposer son récit humanitaire. En rassemblant des médecins, des avocats, des étudiants, des travailleurs ordinaires – bref, un échantillon de la société civile internationale – la caravane Soumoud incarne un mouvement de base, apolitique au sens partisan, mu par l’indignation morale face à l’inacceptable.
Malgré les obstacles évidents (frontières fermées, risques sécuritaires, pressions diplomatiques), les organisateurs affichent une détermination sans faille. « Nous ne comptons pas attendre des sommets arabes ou des déclarations creuses. Nous passons à l’action », affirme ainsi Jawaher Channa, membre du comité de pilotage, pour qui Soumoud reflète « l’esprit de Gaza – et de tous ceux qui la soutiennent ».
De même, le syndicaliste tunisien Samir Cheffi rappelle le devoir moral de s’engager : « Le devoir de toute personne éprise de liberté est d’aider à briser le siège et à empêcher un peuple de mourir de faim », martèle-t-il en substance, soutenu par l’Union générale tunisienne du travail et la Ligue des droits de l’Homme. Ces voix citoyennes, loin d’être isolées, ont trouvé un large écho médiatique, légitimant leur combat.
Au final, même si la caravane Soumoud devait être stoppée aux portes de l’Egypte– hypothèse malheureusement la plus probable – son voyage n’aura pas été vain. Il aura braqué les projecteurs du monde sur la tragédie qui se joue à Gaza. Il aura rappelé que la solidarité ne connaît pas de frontières : de Tunis à Tripoli, du Caire à Islamabad, des femmes et des hommes ordinaires peuvent s’unir pour clamer « Vous n’êtes pas seuls » aux Gazaouis.
Dans un contexte où les décisions étatiques peinent à alléger les souffrances, une telle mobilisation citoyenne fait figure de sursaut d’humanité. C’est en ce sens qu’il faut la défendre : non pas comme une provocation, mais comme un cri de conscience universelle, face auquel les critiques s’estompent.
La caravane Soumoud s’affirme ainsi, envers et contre tout, comme l’expression légitime d’une solidarité des peuples, écrite sur les routes du Maghreb et portée par l’espoir d’une justice pour Gaza.
Que se passe-t-il en Tunisie?
Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!
