Economie

Conjoncture économique en Tunisie : Réalisations et perspectives

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Au premier semestre 2024, l’économie tunisienne présente un tableau contrasté, marqué par des signes de croissance modeste mais aussi des défis persistants.

L’examen des principaux indicateurs économiques qui ont caractérisé cette période, offre une analyse des dynamiques en cours et des perspectives pour le reste de l’année en cours.

Croissance du PIB : une reprise timide

La croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) tunisien a enregistré une légère augmentation de 0,2% au premier trimestre 2024 par rapport à l’année précédente. Bien que ce chiffre soit positif, il reste modeste comparé à d’autres pays de la région et reflète une reprise économique encore timide.

Les secteurs des services (+1,9%) et de l’agriculture (+1,6%) ont contribué positivement à cette croissance. Cependant, les secteurs de l’industrie (-5%) et de la construction (-6,8%) ont connu des contractions. Cette disparité sectorielle souligne la nécessité d’un soutien ciblé aux secteurs en difficulté pour assurer une croissance plus équilibrée et durable à long terme.

Marché du travail : une légère amélioration

Le taux de chômage a connu une légère baisse, passant à 16,2% au premier trimestre 2024, contre 16,4% au trimestre précédent. Bien que cette tendance soit encourageante, le chômage reste un défi majeur, particulièrement chez les jeunes et les diplômés.

Le dynamisme du secteur touristique devrait contribuer à la baisse du chômage durant la saison estivale. En effet, les recettes du Tourisme ont atteint du 1er janvier au 20 juillet 2024 : 3393 millions de dinars en hausse de 6% par rapport au premier semestre de l’année 2023.

Inflation : une stabilisation bienvenue

L’inflation s’est stabilisée à 7,2% en mai 2024, après avoir atteint 7,5% en mars. En effet, la Banque Centrale de Tunisie (BCT) a stabilisé l’inflation grâce à une politique monétaire stricte, marquée par des augmentations des taux d’intérêt. Cette approche vise à maîtriser l’inflation, qui a atteint des niveaux préoccupants ces dernières années. En maintenant un taux directeur élevé, la BCT cherche à réduire la masse monétaire en circulation, ce qui devrait, en théorie, diminuer la demande globale et stabiliser les prix. Cependant, l’efficacité de cette politique est limitée par plusieurs facteurs.

Premièrement, la Tunisie souffre d’une forte inflation importée, exacerbée par la dépréciation du dinar, ce qui complique le contrôle des prix internes. 

De plus, la structure de l’économie tunisienne, avec un secteur informel important, rend difficile la transmission des effets des taux d’intérêt sur l’inflation. Dans ce secteur, les transactions se font souvent en espèces, échappant ainsi au contrôle monétaire traditionnel.

Enfin, bien que la BCT ait réussi à stabiliser l’inflation à 7,2% en mai 2024, le coût de la vie reste élevé pour de nombreux Tunisiens, ce qui indique que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour améliorer la situation économique globale.

Investissements en baisse

Les intentions d’investissement dans le secteur industriel ont chuté de 17,2% par rapport au premier trimestre 2023. Cette baisse est préoccupante car elle pourrait compromettre la croissance économique à long terme.

Des mesures incitatives et une amélioration du climat des affaires sont cruciales pour relancer l’investissement privé et stimuler la croissance économique.

Commerce extérieur : une amélioration du déficit

Le déficit commercial s’est réduit, atteignant -4772 millions de dinars tunisiens (MDT) pour les quatre premiers mois de 2024, contre -6238,4 MDT pour la même période en 2023. Le taux de couverture des importations par les exportations a atteint 81,7%, indiquant une légère amélioration de la compétitivité des produits tunisiens sur les marchés internationaux.

Cette évolution positive du commerce extérieur pourrait contribuer à réduire les pressions sur les réserves de change du pays.

Perspectives de la politique monétaire

La politique monétaire de la Tunisie au 2e semestre 2024 se caractérise par une certaine stabilité, avec un taux d’intérêt sur le marché monétaire maintenu à 7,97% en mai 2024. Cette décision de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) vise à préserver la valeur du dinar et à lutter contre l’inflation, tout en soutenant la croissance économique. Cependant, le taux de change du dinar tunisien connaît une évolution contrastée.

Au début de l’année 2024, le dinar tunisien s’échangeait à un taux moyen de 3,38124 TND pour 1 euro. Cette valeur, relativement stable, a connue des fluctuations modérées tout au long du semestre. Le taux a oscillé entre 3,349 TND et 3,400 TND, pour finalement se stabiliser autour de 3,3609 TND fin juin.

Cette évolution témoigne d’une certaine résilience de la monnaie tunisienne face au dispositif européen. Par rapport au dollar américain, le dinar tunisien a affiché une tendance comparable. Partant d’un taux d’environ 3,083 TND pour 1 USD en janvier, il a fluctué pour atteindre environ 3,10 TND en juin. Cette relative stabilité face aux deux principales initiatives internationales suggère une gestion maîtrisée de la politique monétaire tunisienne.

La volatilité du taux de change souligne la nécessité pour la BCT de mener une gestion prudente et proactive de ses réserves de change, qui s’élèvent à 24470 millions de dinars au 30 juillet 2024. Une politique de change flexible, combinée à des interventions ciblées sur le marché des changes, pourrait permettre de lisser les fluctuations et de préserver la compétitivité des exportations tunisiennes.

Marché boursier : un optimisme mesuré

Dans un contexte économique mondial en constante évolution, la Bourse de Tunis a démontré une résilience notable au cours du premier semestre 2024.

Le Tunindex, principal baromètre de la place tunisienne, a tracé une trajectoire sinueuse mais globalement ascendante, reflétant les complexités de l’environnement économique national et international.

Débutant l’année à 9884,12 points, le Tunindex a terminé le semestre aux alentours de 9850 points, marquant une légère baisse mais conservant une tendance haussière sur l’ensemble de la période.

Cette performance, bien que modeste, témoigne de la capacité du marché tunisien à résister aux pressions économiques diverses et reflète un certain optimisme parmi les investisseurs, mais doit être interprétée avec prudence compte tenu des défis économiques sous-jacents.

Prévisions globales pour le 2e semestre 2024

Les prévisions économiques pour la Tunisie au second semestre de 2024 seront marquées par une croissance modeste estimée à 2,4%, selon la Banque mondiale. Cette croissance dépendra de plusieurs facteurs, notamment l’amélioration des conditions climatiques et l’efficacité dans la mise en œuvre des réformes nécessaires. Pour soutenir cette dynamique, il sera crucial de stimuler l’investissement, la consommation et les exportations, des éléments essentiels pour revitaliser l’économie tunisienne.

Les transferts des Tunisiens résidents à l’étranger, qui ont atteint 4206 millions de dinars entre le 1er janvier et le 20 juillet 2024, montrent une augmentation de 3% par rapport à l’année précédente. Ce flux de fonds, associé à une hausse des réserves en devises à 24470 millions de dinars (+5%), pourrait jouer un rôle stabilisateur pour l’économie tunisienne.

Ces ressources financières sont essentielles pour soutenir la consommation intérieure et renforcer la position extérieure du pays. Cependant, la situation de la dette extérieure reste préoccupante, avec une augmentation de 40,7% du service de la dette, atteignant 9062 millions de dinars au 20 juillet 2024. Cela représente 74% du total prévu pour l’année, ce qui souligne la nécessité d’une gestion rigoureuse des finances publiques.

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek