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Décidément la mauvaise foi et le ridicule ne tuent pas en Tunisie

Décidément la mauvaise foi et le ridicule ne tuent pas en Tunisie

Assurément le chef de l’Etat,Kais Saied, va laisser des plumes dans cette année qu’il nous prépare. Lui et la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, ne sont pas dupes. Et si Saied avait encore quelques illusions sur sa capacité à distribuer du bonheur à toute la population, sa cote de popularité actuelle et les terribles aveux dans le document remis au FMI suffisent à les atomiser. Le rêve n’est plus permis, place à l’âpre réalité en 2022. Nous prédisons la fin de l’État de grâce pour le président de la République au 6 février 2022, date de la fin de la Coupe d’Afrique et aussi de la 9e commémoration de l’assassinat de Chokri Belaid. Saied va tanguer et trinquer c’est certain, mais est-ce que l’opposition pourra en profiter pour déboulonner le Sphinx de Carthage ? Ça c’est beaucoup moins sûr..

Les sorties de route du président illusionniste

Le chef de l’Etat a fait fort durant sa campagne électorale, trop fort peut-être. Il en a peut-être un peu trop dit. Bon, à l’époque ça mangeait pas de pain, ça coûtait rien de promettre la lune aux citoyens-électeurs, qui déjà commençaient à en souper des ratés dudit régime parlementaire. Alors forcément quand on s’engage à débarrasser le pays de la toute-puissance de ses “chers” – au sens propre – députés, forcément l’adhésion populaire est forte. Elle l’est encore le 30 décembre 2021, mais avec beaucoup moins de certitudes sur l’avenir institutionnel de la Tunisie du fait des errances de Kais Saied sur son fameux Dialogue national…

Ce n’est pas la seule désillusion signée Kais Saied. Ce dernier a réellement pris les rênes du pays le 25 juillet 2021. C’est depuis qu’il a mis le doigt sur le naufrage économique de la Tunisie, avec les vrais indicateurs, le niveau réel de l’endettement, de la corruption, du caractère mortifère d’un secteur public trop obèse… Bref, il a découvert tout ce que les précédents exécutifs avaient réussi à planquer sous le tapis. Et là les revirements du locataire du palais de Carthage ont commencé…

Il a ouvert le bal avec la reculade tonitruante sur la Loi n°38, qu’il avait pourtant signée. Pour s’en défaire Saied a argué l’état des finances publiques. Après il y a eu ces milliards de dinars qui étaient censés dormir dans des comptes à l’étranger, par la faute des “traites de la nation“. Où est passé ce magot ? En tout cas il ne figure nulle part dans le document de travail que la Tunisie a remis au FMI, il est à peine évoqué sous le volet “Confiscation” avec d’ailleurs la mention “Impact financier faible”.

Et que dire de l’armée de voitures de fonction que le président de la République s’était juré de pourfendre. Il y en a toujours autant qui défilent et qui coûtent toujours aussi cher aux contribuables. Idem pour l’Impôt sur la fortune (ISF) lequel était censé rétablir un équilibre entre les sacrifices des “riches” et des “pauvres“, il a étrangement disparu à l’arrivée

A sa décharge le chef de l’Etat pourra toujours dire qu’il n’avait pas tous les éléments sur l’état réel du pays et sur la difficulté à changer les habitudes des Tunisiens, à réformer, à… etc., mais le fait est qu’en politique l’ignorance n’est pas une vertu, c’est même une faute lourde qui se paye cher. Peut-être qu’en France “les promesses des hommes politiques n’engagent que ceux qui les reçoivent”, comme l’avait dit l’ancien président Jacques Chirac, mais en Tunisie c’est une toute autre musique !

Chez l’adversaire c’est le désert

Le combat de 2022 entre le président de la République et ses opposants pourrait ne pas avoir lieu faute de combattants. Il faut voir la tête des adversaires et ennemis de Saied pour comprendre qu’il n’a pas grand chose à craindre d’eux. Ahmed Néjib Chebbi, avec ses valses incessantes, a fini par brouiller toutes les cartes, jusqu’à devenir illisible et invisible politiquement. Que dire de son compagnon d’infortune, Yadh Elloumi, ex-Qalb Tounes, qu’on a vu fricoter avec les tristement célèbres députés d’Al Karama, le camp ennemi durant la dernière campagne électorale…

Les deux partagent en ce moment avec Rached Ghannouchi, président d’Ennahdha, un immense front virtuel anti-Saied, une communauté de vues dictée par leur détestation commune de leur bourreau, le président de la République, qui a osé fermer la porte du paradis des politicards de tous bords : le Parlement. Un Ghannouchi qui s’est définitivement discrédité depuis qu’il a tenté d’exploiter politiquement le drame de Montplaisir

Ces Messieurs/Dames n’ont pas pris le temps de se regarder dans une glace, de se juger avec toute l’objectivité possible et surtout de lire dans les yeux des Tunisiens ce qu’ils leur inspirent. Ils y liraient un dégoût profond. Et c’est ce même dégoût qui explique les chauds applaudissements du soir du 25 juillet, et pas une adhésion forte au plan de Kais Saied. D’ailleurs un plan de sortie de la crise politique on n’en a toujours pas, et ce ne sont pas les vagues garanties données par le chef de l’Etat, ses gesticulations et les tièdes assurances des partenaires étrangers qui vont y changer quelque chose…

Kais Saied certes peut être rasséréné par la piètre qualité de ses challengers, mais son adversaire, le vrai, se pointera dès que les ménages tunisiens commenceront à vivre dans leur chair les effets de la Loi de finances 2022 et les engagements auprès du FMI. L’adversaire du président pourrait très vite être le même que celui qui l’a élevé au rang de sauveur de la patrie : le peuple.

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