Economie

Entre nécessité et indépendance : la BCT finance l’Etat à hauteur de 7 milliards de dinars

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L’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) vient d’adopter une mesure significative qui permet à la Banque Centrale de Tunisie (BCT) d’accorder des facilités de financement à l’État tunisien.

Cette décision, prise lors d’une plénière le 2 décembre 2024, autorise la BCT à prêter jusqu’à 7 milliards de dinars, sans intérêts, pour soutenir le budget de l’État pour l’année 2025. La ministre des Finances, Sihem Boughdiri Nemsia, a présenté cette proposition dans un contexte économique où le gouvernement cherche des solutions pour faire face à un déficit budgétaire persistant.

Besoin de financement et indépendance monétaire

La demande de financement direct à la BCT s’inscrit dans une logique d’urgence face à un contexte économique marqué par une multitude de défis. Le gouvernement a justifié cette initiative par la nécessité de répondre aux engagements financiers imminents, notamment un service de la dette estimé à 9 milliards de dinars pour le premier trimestre 2025.

Ce recours au financement direct est perçu comme une solution rapide pour injecter des liquidités dans l’économie, en évitant les marchés internationaux souvent jugés peu favorables en termes de taux d’intérêt. Cependant, cette approche soulève des interrogations sur la soutenabilité de la dette publique et les risques associés à une dépendance accrue vis-à-vis de la BCT.

L’indépendance de la BCT est un principe fondamental qui garantit une politique monétaire stable. Toutefois, le financement direct du budget par la banque centrale pourrait compromettre cette autonomie. Les critiques alertent sur le risque d’une pression sut l’institut d’émission, ce qui pourrait entraîner une dévaluation du dinar et une inflation galopante. Pour éviter ces dérives, il est essentiel que la BCT établisse des mécanismes clairs régissant l’utilisation des fonds et assure que les prêts soient orientés vers des investissements productifs plutôt que vers des dépenses courantes.

Pour une gestion transparente et responsable

Pour naviguer dans cette situation complexe, il est primordial que la BCT adopte une approche équilibrée qui préserve son autonomie tout en soutenant les besoins financiers de l’État. Cela pourrait passer par l’instauration d’un cadre réglementaire rigoureux limitant le montant et les conditions des prêts accordés.

Une gestion transparente des fonds est également nécessaire pour garantir que le financement soit utilisé exclusivement pour des projets susceptibles de stimuler la croissance économique. La capacité de la BCT à maintenir une politique monétaire rigoureuse tout en répondant aux besoins urgents du gouvernement sera déterminante pour l’avenir économique du pays.

Un tournant dans la gestion des finances publiques

La décision d’accorder un emprunt massif à l’État tunisien suscite déjà des débats intenses au sein des cercles économiques et politiques. Bien qu’elle puisse offrir un répit temporaire face aux pressions financières, elle soulève également des préoccupations quant à la viabilité à long terme des finances publiques.

Les experts appellent à diversifier les sources de financement et à mettre en œuvre des réformes structurelles pour assainir les finances publiques sur le moyen et long terme. Les choix qui seront faits dans les mois à venir auront un impact significatif sur la santé économique du pays et sur la confiance des investisseurs.

La récente décision de l’ARP marque un tournant dans la gestion financière de la Tunisie, avec des implications profondes pour l’économie nationale. La manière dont le gouvernement et la BCT géreront cette situation déterminera non seulement leur crédibilité respective mais aussi la stabilité économique future du pays.

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek