Economie

Exception tunisienne – L’inflation grimpe mais reste toujours inférieur aux taux européens !

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Au mois de mars 2022, l’inflation confirme sa tendance haussière en augmentant à 7,2% après 7% en février et 6,7% en janvier, indique aujourd’hui mercredi 6 avril 2022, un bulletin publié par l’INS.

Cette progression est expliquée essentiellement par l’accélération du rythme des hausses des prix des boissons alcoolisées et tabac (21% contre 19,4% en février) ainsi que des prix du groupe des articles d’habillement et des chaussures (9,8% contre 8,9%) et des prix du groupe des meubles, articles de ménage et entretien courant du foyer (6,1% contre 5,7%).

D’après les statistiques déclarées, en mars 2022, les prix de l’alimentation augmentent de 8,7% sur un an. Cette hausse provient principalement de l’augmentation des prix des œufs de 22,2%, des huiles d’olives de 20,6%, des fruits frais de 18,9%, des prix des volailles de 14,1%, des lait et fromage de 8,8%, des poissons frais de 8,6% et des dérivés de céréales de 7%. Par ailleurs les prix des fruits secs sont en baisse sur un an (-4,3%).

Le taux d’inflation sous-jacente (hors produits alimentaires et énergie) augmente à 6,8% après 6,6% le mois précédent. Les prix des produits libres (non encadrés) augmentent de 7,4%. Les prix des produits encadrés augmentent quant à eux de 6,6%. Les produits alimentaires libres ont connu une hausse de 9,7% contre 3,6% pour les produits alimentaires à prix encadrés.

Néanmoins, le taux d’inflation ayant augmenté fin mars dernier à 7,2% reste toujours inférieur aux taux européens. Ceci s’explique soit par la faible capacité de consommation des Tunisiens ou par la non-fiabilité des chiffres de l’INS ou par ces deux causes, à la fois.

Au fait, l’inflation dans la zone euro a atteint un record en mars, à 7,5% en glissement annuel, ravivée par le conflit en Ukraine qui fait accroitre les tarifs de l’énergie, et de l’alimentation. En février, la hausse des prix avait atteint 5,9% pour les 19 pays de la zone euro, ce qui correspondait déjà au niveau le plus élevé enregistré depuis janvier 1997.

Conceptuellement, l’inflation est définie comme étant une hausse généralisée et persistante des prix. Elle a trois causes principales : l’inflation pourrait être liée à un accroissement brusque de la demande face à un dysfonctionnement au niveau de l’offre, elle pourrait être aussi induite par la spirale de la hausse simultanée des prix et des salaires et elle pourrait avoir enfin des causes relatives à la politique monétaire notamment en raison des fluctuations des taux d’intérêt bancaires et de la liquidité.

En Tunisie, l’inflation est un phénomène structurel et endémique vu le caractère fluctuant de la consommation, la montée des importations, la récurrence des pénuries et le caractère restrictif de la politique monétaire au pays notamment en raison du niveau élevé du taux d’intérêt bancaire et de l’insuffisance chronique de la liquidité qui dépasse 11 milliards de dinars, actuellement.

L’évolution de l’inflation est calculée mensuellement par l’Institut National de la Statistique (INS) qui établit, à cet effet, un indice dénommé l’indice des prix à la consommation (IPC). Cet indice est déterminé en pondérant les variations des prix de 12 familles de produits et services dont le nombre est de presque 1000 produits et services et qui sont commercialisés au niveau de quelques 3672 points de vente sur tout le territoire de la République.

A ce titre, il y a lieu de signaler que le dernier ajustement de la méthodologie de calcul de l’IPC remonte à 15 ans et que les méthodes de détermination de l’indice ne tiennent pas compte des disparités sociales et régionales au niveau des revenus et des pouvoirs de consommation des citoyens. Pour cela et d’une façon générale, les consommateurs sentent que l’indice d’évolution des prix ne reflète pas ce qu’ils ressentent comme évolution des prix.

Dans ce contexte, le centre tunisien de veille et d’intelligence économique a demandé aux autorités compétentes de réviser la méthodologie de suivi de l’évolution des prix pour un meilleur rapprochement entre l’inflation ressentie par les consommateurs et celle qui est calculée arithmétiquement et traduite au niveau de l’IPC. Il s’agit de la même demande formulée par la Banque Africaine de développement qui a financé, à ce titre, un projet en débloquant en 2012 une enveloppe l’ordre de 1 Millions de Dinars.

En somme et au vu de ces données, l’inflation en Tunisie est actuellement un fléau rampant voire même galopant qui range le pouvoir de consommation des citoyens et pour cause la baisse de celui-ci varie durant les huit dernières années entre 75 et 82% malgré des augmentations salariales de 5 à 6%, annuellement. Il en est de même pour l’épargne des ménages qui a baissé d’une manière vertigineuse.

On évoque aussi d’autres chiffres inquiétants émanant de l’Institut national de la consommation, (INC), de l’INS et de la Banque Centrale de Tunisie (BCT), puisqu’un million de tunisiens sont dans une situation de surendettement bancaire et 66% de la population est complètement exclue du système financier. Les dettes bancaires des ménages sont consacrées essentiellement à la consommation courante soit 26,2% pour l’alimentation, 19% pour l’habitat, 12,7% pour le transport et 42,1% pour d’autres besoins vitaux à l’instar de l’éducation, les soins, et l’habillement.

Des quotes-parts présentées par les instances officielles mais qui ne reflètent en rien la réalité et le quotidien de la population.

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek