Alors que le projet de loi visant à organiser les contrats de travail et à interdire la sous-traitance est en passe d’être examiné article par article ce mercredi 14 mai 2025 par la commission parlementaire des affaires sociales, de la santé, de la femme et des personnes handicapées, l’absence remarquée de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) soulève de nombreuses interrogations.
L’UGTT, premier défenseur historique de l’interdiction de la sous-traitance, n’a pas été associée aux travaux parlementaires préparatoires, et ce malgré l’importance stratégique et sociale de cette réforme.
Un conflit larvé entre l’UGTT et le Parlement
Dans une déclaration à Radio Diwan, le député Youssef Tarshoun a reconnu le rôle fondamental de l’UGTT dans le paysage social tunisien, tout en justifiant son exclusion. Selon lui, l’organisation syndicale « refuse de reconnaître le Parlement issu de la Constitution de juillet 2022 » et n’a adressé aucune correspondance officielle à l’Assemblée après sa mise en place.
« Nous sommes une institution élue légitime. Nous fonctionnons selon des protocoles bien établis et dans le respect mutuel. Il faut que cette reconnaissance soit formalisée, pas exprimée à travers les médias », a-t-il précisé, tout en soulignant que plusieurs députés soutiennent l’idée d’associer l’UGTT aux discussions.
Une initiative syndicale restée sans suite
Selon le même député, des experts affiliés à l’UGTT ont organisé un séminaire autour du projet de réforme du Code du travail et ont soumis des propositions au bureau exécutif du syndicat, en vue de les transmettre au Parlement. Mais jusqu’à présent, ce document ne serait pas encore parvenu à l’Assemblée.
Cette déclaration met en lumière une fracture institutionnelle persistante entre les deux entités et soulève la question du respect du cadre du dialogue social, pourtant consacré par le Conseil national du dialogue social.
Taboubi demande le retrait du projet et l’ouverture du dialogue
De son côté, le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi, a profité de la célébration de la Fête du travail, le jeudi 1er mai, pour appeler le gouvernement à retirer le projet de loi sur l’organisation des contrats de travail et l’interdiction de la sous-traitance, de manière provisoire, afin d’engager un véritable dialogue tripartite.
Il a vivement critiqué la méthode unilatérale adoptée dans l’élaboration de ce texte, qualifiant ce processus de « recul grave » et d’« atteinte au droit syndical et au dialogue social ». Selon Taboubi, le projet est « sélectif, incomplet et sujet à de multiples interprétations ».
Une réforme au cœur des priorités présidentielles
Le Président de la République, Kaïs Saïed, avait transmis la version initiale du projet de loi au Parlement le 14 mars 2025, dans le cadre d’un ensemble de réformes législatives visant à instaurer une nouvelle architecture du droit du travail en Tunisie, plus équitable et plus durable.
Reste à savoir si le Parlement choisira de faire cavalier seul en poursuivant l’examen du texte sans l’UGTT, ou si un consensus de dernière minute permettra d’associer la principale force syndicale du pays à ce tournant historique.
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