Economie

Fitch Ratings : La Tunisie continue de faire face à des risques de financement substantiels

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Selon une note publiée aujourd’hui vendredi 3 mars 2023 par l’agence de notation internationale « Fitch Ratings », les progrès de la Tunisie en matière de politiques requises dans le cadre de l’accord avec le FMI ont augmenté la probabilité de décaissement du financement de la part du fonds, mais le risque de financement externe du pays reste élevé.

Elle considère que sa décision de relever la notation de défaut des émetteurs en devises à long terme (IDR) de la Tunisie de « CCC » à « CCC+ », en décembre 2022 reflétait son évaluation que l’accord préliminaire conclu avec le FMI en octobre pour un nouveau financement pour 1,9 USD sur 48 mois à travers le mécanisme élargi de crédit (MEP) débloquerait un financement substantiel des créanciers publics et soutiendrait l’assainissement budgétaire. Le conseil d’administration du FMI devait initialement approuver le financement de la Tunisie en décembre 2022, mais la réunion du conseil d’administration du fonds prévue, à ce titre, a été retardée.

Déblocage probable de la première tranche de financement du FMI avant la fin du deuxième trimestre 2023

Les raisons du retard n’ont pas été rendues publiques. Cependant, Fitch considère que la modification de la loi sur les entreprises du secteur public, votée en conseil des ministres le 9 février, et les progrès des autorités dans la finalisation d’un plan de financement actualisé ont amélioré les perspectives d’approbation par le conseil d’administration. 

D’ailleurs, la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, a déclaré à la mi-février que les autorités avaient fait de très bons progrès sur les actions préalables requises dans le cadre du programme de financement du FMI et qu’elle s’attendait à la finalisation des actions restantes en quelques semaines, et non en quelques mois. Même en supposant des retards de procédure, l’agence prévoit par conséquent l’approbation du conseil d’administration et le déblocage de la première tranche de financement du FMI avant la fin du deuxième trimestre 2023.

Dans le cadre du plan de financement actualisé, la Tunisie recevrait plus de 5 milliards de dollars de financement extérieur, principalement de créanciers officiels d’Europe et du Golfe. Cela équivaudrait à environ 65% des besoins de financement du gouvernement en 2023, qui, selon les estimations de Fitch, s’élèveraient à environ 16,9% du PIB. Le financement restant pourrait être fourni principalement par les banques locales sans exercer de pression significative sur leur liquidité, selon l’agence de notation qui évoque que le soutien des créanciers publics inclus dans le plan reste conditionné à l’approbation du FMI du programme de financement de la Tunisie.

L’estimation de l’agence des besoins de financement du gouvernement suppose que le déficit budgétaire sera ramené à 5,7% du PIB en 2023, contre 7,3% en 2022, grâce à des mesures telles que la maîtrise de la masse salariale et les dépenses de subventions. Ceci tient compte du règlement d’échéances de dette d’environ 11,2% du PIB.

Eléments du scenario de base

Dans un scénario de base, la Tunisie éviterait la restructuration de sa dette, en obtenant un financement suffisant pour couvrir les échéances de sa dette extérieure de 2 milliards de dollars en 2023 (dont une euro-obligation de 500 millions d’euros arrivant à échéance en octobre) et de 2,6 milliards de dollars en 2024 (dont une euro-obligation de 850 millions d’euros arrivant à échéance en octobre), note Fitch ajoutant que la notation de « CCC+ » indique, tout de même, que le défaut est une possibilité réelle.

La liquidité externe reste tendue. Un montage financier de 900 millions de dollars obtenu fin 2022, principalement auprès d’Afreximbank et de l’Algérie, a apporté un certain soulagement et stabilisé les réserves à environ trois mois de couverture des importations. Néanmoins, des retards prolongés dans le décaissement des financements extérieurs ou une augmentation significative de la facture des importations de la Tunisie aggraveraient considérablement les pressions extérieures, compte tenu des importants déficits du compte courant, estimé à 3,4 milliards de dollars en 2023 et 2024, précise-t-on. Les réserves disponibles pour le remboursement de la dette pourraient exercer une pression à la baisse sur la notation.

Même si le financement FMI est approuvé, les tensions sur le financement extérieur pourraient rapidement réapparaître si la Tunisie s’écarte des objectifs du programme du fonds et que les décaissements ultérieurs au titre de celui-ci sont suspendus. Cela entraverait probablement également les décaissements de financements bilatéraux.

L’agence pense que le financement des créanciers publics dépend largement des perspectives de réforme. Historiquement, l’adhésion de la Tunisie aux programmes du FMI a été faible. La capacité du gouvernement à mettre en œuvre les engagements de réforme dans le cadre du programme du financement pourrait être remise en question si l’instabilité sociale augmente, et certaines réformes, telles que celles concernant les entreprises publiques et les subventions, pourraient susciter une forte opposition de la part de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), conclut Fitch.

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek