La diabolisation de l’extrême droite perd progressivement du terrain même si elle a chuté aux portes du pouvoir en 2002, 2017, 2022 et 2024 ; par contre la diabolisation de la France insoumise (LFI) et de son leader Jean-Luc Mélenchon progresse de manière fulgurante. Le Nouveau Front Populaire (NFP) continue de harceler le président Emmanuel Macron pour qu’il agréée l’entrée de Lucie Castets au Première ministère, mais il semble que les carottes soient définitivement cuites pour elle, après ce qu’elle a confirmé devant Macron et surtout après ce terrible sondage pour les mélenchonistes.
Les postures et orientations du parti d’extrême gauche sont massivement rejetées dans une grande enquête postélectorale élaborée par l’institut Ipsos pour “Le Monde”, la Fondation Jean Jaurès, le centre de recherches politiques de Sciences Po et l’Institut Montaigne. Le rejet est tel qu’on croirait avoir affaire au Front national (FN)-Rassemblement national (RN) avant que Marine Le Pen ne polisse le discours de l’extrême droite pour qu’il ait droit de cité.
Ce sondage, réalisé sur un échantillon de 11 204 personnes (un panel beaucoup plus important que les études habituelles) du 26 juillet au 1er août, est sorti ce vendredi 30 août et sera abondamment commenté par les états-majors des partis, à commencer par LFI. C’est elle qui laisse le plus de plumes dans les derniers développements de l’actualité politique, avec un pays qui n’a plus de cap depuis les dernières législatives anticipées…
74% des sondés pointent du doigt la formation d’extrême gauche, c’est 9 points de plus en comparaison avec une étude du même type réalisée par le même institut en septembre 2023. Mais il y a pire : 72% des citoyens interrogés sont d’avis que le parti de Mélenchon souffle sur les braises de la violence (contre 60% il y a un an) et 69% disent carrément que LFI est un danger pour la démocratie (contre 57% en 2023).
Un autre drame pour Mélenchon : son parti perd de la crédibilité sur les marqueurs positifs. Par exemple à peine 22% des sondés soutiennent que le parti de la gauche radicale est capable de gouverner la France, c’est un recul de 6 points en un an. Le plus grave dans cette affaire ce sont les contrecoups pour la pérennité du NFP, arrivé en tête aux législatives et qui fait valoir son droit à piloter le pays. Même les sympathisants socialistes pensent majoritairement (57% dans ce sondage) que LFI est dangereuse pour la démocratie et 68% disent qu’elle accentue la violence.
Mélenchon est devenu la personnalité politique la plus détestée, beaucoup plus que le président Macron ; en effet 83% des sondés ont une image défavorable du chef de file des insoumis (contre 57% pour Marine Le Pen). Le travail de diabolisation de la Macronie paye. En effet l’ex-majorité présidentielle a dit tout de suite après sa déroute aux législatives qu’il n’est pas question de former un gouvernement avec des ministres LFI, même position défendue par Les Républicains (la droite) et le RN (extrême droite)…
Et quand Castets a redit lors de la consultation à l’Elysée que le NFP entend gouverner avec toutes ses composantes, même les mélenchonistes, Macron en a profité pour éjecter définitivement la candidate du front de gauche de la liste des Premiers ministrables. Ce sondage conforte le président de la République dans sa position, et il se braquera d’autant plus que la LFI a appelé à destituer le chef de l’Etat et prendra part à un rassemblement de protestation ce 7 septembre. Alors que le Parti socialiste (PS), signe des temps, ne parle ni de destitution ni de manifestation.
La situation s’est tendue dès le soir des résultats des législatives quand Mélenchon a exigé qu’on laisse la gauche s’installer à Matignon pour y appliquer “son programme. Rien que son programme, mais tout son programme”. Depuis la macronie est terrorisée par l’abattage de ses réformes, dont l’emblématique et douloureuse réforme des retraites. A partir de ce moment-là le Premier ministre démissionnaire Gabriel Attal a entrepris le travail de diabolisation de LFI. Même quand un attentat a visé la synagogue de La Grande-Motte la macronie a lâché le bruit selon lequel les prises de position de Mélenchon en faveur des Palestiniens ont enhardi les esprits faibles.
Les insoumis payent cher l’intransigeance de leur leader sur ses convictions, qu’il défend jusqu’à l’étranger, quoi qu’il en coûte. Reste à savoir si ce sondage élargira le fossé entre LFI et le PS, ce qui donnerait les coudées franches à Macron, qui songe sérieusement au socialiste Bernard Cazeneuve pour former le gouvernement, gouvernement que LFI a promis de censurer au Parlement alors que le pays a besoin d’une boussole de toute urgence. Le radicalisme de l’extrême gauche a un prix et il est très élevé, comme le montre ce sondage.
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