Les faits sont têtus, mais puisque la droite dure et l’extrême droite s’entêtent à les contester avec une mauvaise foi manifeste doublée de manoeuvre électoraliste, alors les études y reviennent, inlassablement, pour stopper une musique qui nuit dangereusement à la France. Reprenant les vieux poncifs de feu Jean-Marie Le Pen, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau s’était permis de dire que “l’immigration n’est pas une chance pour la France“. Le président Emmanuel Macron l’avait démenti publiquement, lors du Sommet sur la Francophonie à Paris. Cela n’a pas freiné Retailleau, rien ni personne ne peut le freiner. C’est lui qui le dit. Et bien Monsieur le ministre vous avez tort, l’immigration est une chance pour la France, c’est même sa seule chance pour enrayer un déclin démographique inexorable et qui frappe déjà ailleurs (au Japon, en Italie, etc.).
Après cette étude de l’Institut national d’études démographiques (Ined) le doute et les contre-vérités sur la place de l’immigration n’auront plus droit de cité. Enfin, ça c’est ce que dit le bon sens, ce n’est pas ce que disent la tambouille politicienne et le racisme primaire. Si on retire ces argumentaires surfaits et fallacieux qu’est-ce qui reste à la droite et à l’extrême droite pour exister et revendiquer les premiers rôles aux élections de 2027 ? Rien ou pas grand-chose. Pourtant il faudra bien que Retailleau, Le Pen et les autres entendent ces vérités démographiques, il faudra bien que la gauche et ce qui reste du centre (celui de Raymond Barre, pas celui du Premier ministre François Bayrou) les imposent dans le débat public pour qu’on en finisse avec la chasse aux migrants.
C’est un fait incontestable et incontesté, dit et redit, même par le chef de l’Etat : les Français font moins de bébés. Si les tendances démographiques actuelles se maintiennent, un pic à 70 millions d’habitants est prévu dans les années 2040 avant un tassement jusqu’à 68 millions en 2070, soit à peu près le seuil actuel, d’après une étude publiée ce mercredi 26 mars par l’Ined. Gilles Pison et Laurent Toulemon, auteurs de cette enquête, insistent sur la place centrale des migrations dans cette configuration future.
Si le taux de fécondité et le solde migratoire en France restent en l’état, la population ne devrait «pas diminuer avant une vingtaine d’années», avancent les auteurs de cette étude, car «le solde migratoire positif ferait plus que compenser la baisse puis l’inversion du solde naturel à venir» (en d’autres termes il y aura de plus en plus de décès et de moins en moins de naissances). Mais la machine s’enraye après 2040, «le nombre de décès sera trop important pour que l’immigration compense cette perte», indique le démographe Gilles Pison dans un entretien avec “Sciences Avenir”…
Les choses sont claires : «il y a tout un effort de la société à faire pour bien accueillir les migrants, qui sont un apport à la population et une richesse à condition qu’ils soient intégrés», souligne Laurent Toulemon.
Au 1er janvier 2025, la population en France est évaluée à 68,6 millions d’habitants, en hausse sur un an de 0,25%. Ce boom «tient pour les neuf dixièmes au solde migratoire», soit la différence entre le nombre personnes admises sur le sol français et celles qui en sortent (+152 000 personnes en 2024), explique l’Ined. Par contre le solde naturel, soit la différence entre le nombre de naissances et de décès, n’occupe qu’un dixième dans la montée de la population (+17 000 personnes en 2024).
Ce solde naturel s’est très fortement érodé depuis 2019 du fait de deux facteurs : la hausse des décès, qui s’explique par la fin de parcours des générations nombreuses du baby-boom, et le repli des naissances, dont les causes sont multiples. Si la fécondité reste scotchée sur le seuil de 2024, soit 1,62 enfant par femme, le nombre de décès dépasserait celui des naissances dès 2027, ajoute l’Ined.
Toutefois si le solde migratoire garde les tendances de 2024, «la population augmenterait encore pendant deux décennies» jusqu’à un pic de 70 millions d’habitants dans les années 2040. Ensuite elle plongerait très progressivement «pour s’établir à 68 millions en 2070». Dans ce schéma démographique, il y aurait un peu plus d’hommes dans la population française et un peu moins d’enfants et de femmes âgées en 2070.
En juillet 2024 une étude d’Eurostat avait établi que l’immigration est la bouée de sauvetage de l’Europe, mais les politiciens français, tous bords confondus, l’avaient enjambée royalement, trop affairés autour de la crise politique et de la guerre de tranchées qui sévissent depuis les élections de 2022. En septembre 2024 une enquête de l’INSEE a battu en brèche les fantasmes sur la “submersion migratoire” et en octobre de la même année un rapport du CESE a dit que les migrants ne sont pas la première préoccupation des Français. Le personnel politique n’a pas daigné s’y arrêter. Peut-être que cette étude de l’Ined réussira là où toutes les autres ont échoué… Je dis bien peut-être.
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