Le président de la République, Emmanuel Macron, va vite, très vite, trop sans doute, autrement il aurait évité à la France cette dissolution complètement ratée qui a engendré une crise de régime sans précédent sous la 5e République, laquelle a justement été taillée pour que le pays survive à toutes les tempêtes politiques. Une main sur les méga contrats en Arabie saoudite, une autre sur le gril du remplacement kafkaïen du chef du gouvernement, Michel Barnier, après à peine 3 mois à Matignon. Il est très peu probable que le fin négociateur du Brexit échappe à la toile qu’il a tissée en mettant tous ses oeufs dans le panier de Marine Le Pen. Alors le chef de l’Etat pense déjà à la suite. Et les noms on les connait…
La motion de censure pourrait atomiser le gouvernement dès demain mercredi 4 décembre à l’Assemblée nationale. Mais Macron n’a pas attendu, depuis la semaine dernière il a repris la cadence des consultations, entre rendez-vous physiques et coups de fil à des proches pour sonder leur avis sur des noms pour le Premier ministère. Et il se dit que celui qui est en pole position pour remplacer au pied levé Barnier est Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, Macroniste de la première heure. D’ailleurs il est avec lui en ce moment même en Arabie saoudite…
L’homme a piloté la Transition écologique, les Collectivités territoriales, les Outre-mer puis la Défense ; c’est le seul ministre qui a survécu à tous les remaniements depuis que Macron est aux manettes, en 2017. Théoriquement il ne sera pas éjecté automatiquement par le Rassemblement national et ses alliés, assis sur un socle de 143 députés. Lecornu était dans les rangs de la droite – les Républicains – avant de filer vers le centre, ce qui pourrait le légitimer auprès de la gauche dite modérée. Mais voilà, il n’a échappé à personne que Macron a perdu les législatives anticipées, s’entêter à imposer son candidat alors que le premier arrivé, le Nouveau Front populaire (la gauche), rue dans les brancards pourrait être aussi périlleux qu’avec Barnier.
A part le ministre de la Défense il y a le patron du MoDem et Haut-commissaire au Plan, François Bayrou. L’ancien ministre est très respecté par tous les bords et prodiguait ses conseils au chef de l’Etat. On ne l’entendait plus ces dernières années, il a préféré prendre le large suite à de profondes divergences dans les grandes orientations gouvernementales, mais il n’est jamais loin du dernier cercle présidentiel. Le maire de Pau pourrait être l’homme de la situation, d’autant plus qu’il a eu le courage politique de parrainer la candidature de Marine Le Pen en 2022 et qu’il milite pour le saut vers le scrutin à la proportionnelle pour les législatives, un thème cher à l’extrême droite.
Mais il n’y a pas que Lecornu et Bayrou, il y a aussi le dernier Premier ministre du socialiste François Hollande, Bernard Cazeneuve. Il était le mieux placé pour s’installer à Matignon après la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin dernier, mais la France insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon a crié tellement fort que le chef de l’Etat a reculé. Macron hésite encore parce que Cazeneuve pourrait aussi être retoqué par la droite et l’extrême droite, comme d’ailleurs tous les noms à gauche. “Il sait que la solution pour la stabilité n’est pas de ce côté là“, a confié un collaborateur du président.
Enfin il y a le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Sauf que l’ancien camarade du souverainiste Philippe de Villiers est braqué contre le mariage pour tous et son inflexibilité sur des tas de sujets est trop connotée droite dure, jusqu’à l’extrême. Retailleau a trop d’ennemis tapis dans l’ombre pour espérer recueillir une majorité au Parlement.
Le président Macron revient demain mercredi de sa visite d’Etat en Arabie saoudite, le même jour où Barnier pourrait être prié de déguerpir. Le chef de l’Etat débarquera en France avec de bonnes nouvelles pour l’économie du pays mais le climat politique délétère, dont il est l’unique responsable, lui gâchera la fête. Quoi qu’il en soit le Parlement devra valider le Budget de 2025 avant la fin de l’année. Macron avait mis 51 jours pour dénicher pour Barnier, on verra combien cette fois.
Dans cette affaire se joue aussi le départ précipité du président de la République. S’il arrive à retomber sur ses pieds en trouvant un Premier ministre plus ou moins consensuel il a peut-être une chance de dégonfler la pression autour de sa démission… Je dis bien peut-être.
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