Face aux défis climatiques et à la flambée des prix, les agriculteurs marocains optent pour des variétés étrangères plus résistantes et plus productives, comme l’Arbequina et l’Arbosana.
Le secteur oléicole marocain traverse une crise sans précédent. La rareté des eaux d’irrigation, les vagues de chaleur successives et le dessèchement des feuilles d’oliviers ont entraîné une baisse significative de la productivité, notamment dans les régions d’El Kelaâ des Sraghna, Marrakech-Safi, Béni Mellal et Sefrou. Cette situation a conduit à une explosion des prix de l’huile d’olive, qui dépassent désormais les 100 dirhams le litre.
Face à cette crise, de nombreux agriculteurs adoptent des solutions alternatives, privilégiant des variétés d’oliviers étrangères, plus productives et adaptées aux nouvelles contraintes climatiques.
Dans la région de Chichaoua, les agriculteurs profitent de la saison des cultures pour planter des oliviers, notamment la variété espagnole Arbequina. Cette variété est plébiscitée pour ses nombreux avantages :
Selon Miloud Er-Rammah, agriculteur à Chichaoua, ces caractéristiques expliquent pourquoi de nombreux cultivateurs se tournent vers ces nouvelles variétés.
Riyad Ouhatitta, expert agricole, confirme cette tendance. Selon lui, alors qu’on peut planter entre 400 et 500 plants locaux par hectare, il est possible de planter entre 1 600 et 2 000 plants d’Arbequina. Ces arbres commencent à produire de l’huile dès la deuxième année, contre quatre ans pour les variétés locales.
Par ailleurs, d’autres variétés étrangères, comme la Koroneiki grecque, sont également adoptées au Maroc en raison de leur qualité proche des variétés locales et de leur résistance aux conditions climatiques extrêmes.
L’adoption massive de variétés d’oliviers étrangères comme l’Arbequina et l’Arbosana présente certains risques pour la filière oléicole marocaine. Voici les principaux défis et conséquences à prendre en compte :
En privilégiant des variétés importées, le Maroc pourrait devenir dépendant de pépinières étrangères pour l’approvisionnement en plants et en expertise technique. Cette dépendance pourrait fragiliser la souveraineté agricole du pays et entraîner des coûts d’importation plus élevés à long terme.
L’introduction massive de variétés étrangères pourrait marginaliser les variétés locales comme la Picholine marocaine, reconnue pour la qualité supérieure de son huile.
À long terme, cela pourrait altérer l’identité gustative et la réputation de l’huile d’olive marocaine sur les marchés nationaux et internationaux.
Les variétés locales sont mieux adaptées au climat marocain et résistent aux maladies et ravageurs présents dans la région. En revanche, les nouvelles variétés pourraient être plus vulnérables à certaines maladies ou nécessiter plus d’engrais et de traitements phytosanitaires, ce qui pourrait altérer l’équilibre écologique des sols et des cultures.
Même si les variétés comme l’Arbequina sont réputées pour leur tolérance à la sécheresse, elles restent dépendantes d’un système d’irrigation performant.
En cas de pénurie d’eau prolongée ou de dysfonctionnement des infrastructures hydrauliques, leur rendement pourrait fortement chuter, compromettant ainsi la rentabilité des exploitations.
L’Arbequina produit une huile plus douce et fruitée, mais moins stable que l’huile issue des variétés locales comme la Picholine. Cela signifie qu’elle pourrait avoir une durée de conservation plus courte, ce qui peut poser des problèmes d’exportation et de stockage.
Le passage aux variétés étrangères peut entraîner une augmentation temporaire de l’offre d’huile d’olive et une baisse des prix, mais cela pourrait également provoquer une saturation du marché, nuisant aux producteurs qui comptaient sur des prix élevés pour rentabiliser leur investissement.
Présente au Maroc depuis plus de quinze ans, l’Arbequina connaît aujourd’hui un essor considérable en raison de la pénurie de plants d’oliviers et des rendements plus élevés qu’elle offre.
L’introduction de ces variétés permet de réduire les pertes et d’assurer un approvisionnement plus stable en huile d’olive, malgré la sécheresse et les contraintes environnementales.
Cependant, cette transition soulève des questions sur la préservation du patrimoine oléicole marocain, notamment en ce qui concerne les variétés locales et la qualité traditionnelle de l’huile d’olive marocaine.
Avec la Coupe du Monde 2030 en ligne de mire et un marché en pleine mutation, le Maroc doit désormais repenser son modèle agricole pour garantir une production durable et compétitive sur la scène internationale.
Laissez un commentaire