Economie

La manne touristique est au rendez-vous mais il y a ces lourds handicaps

La manne touristique est au rendez-vous mais il y a ces lourds handicaps

La dynamique du tourisme est incontestable et ce n’est pas propre à la Tunisie, partout dans le monde ça frétille à la faveur d’un retour à la normale des voyages internationaux après deux années de restrictions liées à la pandémie du Coronavirus. Les hôteliers tunisiens ne boudent pas leur plaisir. Les réservations pour cet été tutoient les sommets et certains en profitent d’ailleurs un peu trop, nos frères algériens en savent quelque chose. Mais peut-on reprocher aux hôteliers quelques petits écarts de conduite après ces années de vaches maigres ? Ce qui est certain c’est que le ministre algérien du Tourisme, actuellement en visite de travail à Tunis, ne fera pas cas de ces épiphénomènes. Par contre comment mieux accueillir les touristes algériens, européens, asiatiques et tous les autres, comment leur offrir des services de qualité, ça c’est un vrai sujet…

Nous avons approché des patrons et directeurs d’hôtels pour savoir ce que cette manne touristique a fondamentalement changé, si leurs problèmes de fond sont réglés et si la sérénité est de mise pour le futur. La hausse de la fréquentation est indéniablement une bouffée d’oxygène pour un secteur dont une bonne partie était à l’agonie. Mais le manque criant de main d’oeuvre qualifiée est une épée de Damoclès suspendue sur un pan de l’économie qui pèse tout de même près de 14% dans le PIB tunisien (environ 16 milliards de dinars en 2019) et fournit quelque 400 mille emplois directs et indirects (près de 12% de la population active du pays)…

La longue crise du Covid-19 n’a pas fait qu’assécher les ressources des hôteliers, elle a aussi poussé des employés chevronnés à tenter leurs chances dans d’autres domaines. Et la plupart de ces “migrants” s’y sont plus, y ont prospéré et ont fermé la porte du tourisme, trop vulnérable face aux aléas conjoncturels. Comment convaincre tout ce personnel qualifié de revenir ? C’est la question que se posent tous les patrons d’hôtels…

Ensuite il y a l’appel, souvent irrésistible, du large. Il n’y a pas que les ingénieurs et les médecins qui cèdent aux sirènes de l’étranger, il y a maintenant, de plus en plus, les employés des hôtels, surtout ceux dont les compétences séduisent jusqu’aux grands hôtels à l’international : Ceux qui maîtrisent le français, sont à l’aise en anglais, en espagnol, en allemand, etc. C’est une donne à laquelle les professionnels du tourisme tunisien n’étaient absolument pas préparés…

Ce qui complique encore plus la tâche de l’industrie touristique locale c’est que de prestigieuses écoles étrangères labellisent des formations en Tunisie. Cela a l’avantage de former le personnel local aux standards internationaux, c’est excellent pour hausser le niveau des prestations des hôtels tunisiens. La mauvaise nouvelle c’est que le même personnel est également convoité par les hôteliers européens, à tel point que les Tunisiens ont de moins en moins de difficultés à s’insérer à l’étranger…

Enfin il y a les dégâts de la concurrence déloyale des salons de thé, qui poussent comme des champignons dans la capitale, Tunis et ailleurs. Ils proposent très souvent des emplois en dehors de tout cadre légal – travail dissimulé ou travail au noir. Et puisque la grande majorité de ces établissements ne passent pas par la case déclarations des salariés – sécurité sociale et tout le toutim -, ils peuvent proposer des salaires plus importants que les hôteliers. Ces derniers ne peuvent tout simplement pas lutter…

Le souci majeur c’est que ces problèmes conjoncturels et structurels plombent les ambitions de la Tunisie en matière de tourisme de luxe, celui qui rapporte gros et qui a fait du Maroc une destination phare pour les grandes fortunes. On ne peut attirer les riches et les célébrités que grâce à une qualité de service impeccable. Ces touristes d’un autre genre consentent à dépenser un maximum si le produit est au rendez-vous dans tous les domaines. C’est l’énorme chantier que la Tunisie doit attaquer sans tarder…

C’est un projet taillé pour le très actif ministre de la Formation professionnelle et de l’Emploi, en étroite collaboration avec son collègue du Tourisme : Mettre au point des filières pour former cette précieuse main d’oeuvre qui permettra au pays de franchir les paliers supérieurs. Il reviendra après aux hôteliers tunisiens de faire ce qu’il faut pour offrir de bonnes conditions de travail afin de retenir ces compétences que lorgnent les Occidentaux…

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