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La mort lente d’une institution qui pourtant pourrait nous sauver la mise

La mort lente d’une institution qui pourtant pourrait nous sauver la mise

L’ENA (école nationale d’administration) a laissé des plumes dans les soubresauts d’une Révolution qui est loin d’avoir dit son dernier mot. Fleuron de la formation des élites depuis , comme son homologue française (que d’ailleurs elle a copiée presque en tout point), l’ENA a perdu de sa superbe et n’alimente plus les hautes sphères de l’Etat. A la faveur de l’inéluctable redistribution des cartes suite au départ précipité de Ben Ali, on s’est mis à bouder l’institution et à piocher ailleurs des têtes pour garnir les rangs de la haute fonction publique ou les équipes dirigeantes du pays. Des choix de personnes qui parfois défient toute logique ou rationalité et que la Tunisie paye très cher.

L’exemple français, le contre-exemple tunisien

Loin de nous l’idée de dire que l’ENA est la panacée et qu’à elle seule elle suffit à régler tous les problèmes de management et de gouvernance de la Tunisie. Même en France l’automaticité du passage de l’ENA aux hautes fonctions administratives, jusqu’aux gouvernements, est remise en cause et le débat fait rage. Certains militent ouvertement pour la suppression de ce prestigieux label, lequel selon ses détracteurs aurait perdu sa raison d’être avec la multitude d’autres écoles et universités qui fournissent des talents plus adaptés aux défis du 21ème siècle. Mais le problème tunisien est autre…

Notre jeune démocratie s’est perdue dans l’agitation post-14 janvier 2011, au point que le pays a rompu avec ses acquis, pourtant très costauds. On s’est mis à bombarder des gens à des postes de responsabilité dans le public sans que leur compétence en la matière ne soit avérée, ni par leur expérience professionnelle ni par un passage dans les hauts lieu de formation. C’est un des drames du pays…

 En France l’ENA continue de dicter sa loi pour accéder aux hautes fonctions administratives. Beaucoup des ministres actuels et leurs prédécesseurs en sont issus ; même le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, a été usiné par la fabrique de l’ENA, même s’il a annoncé en avril 2021 sa suppression dans sa forme actuelle. Mais attention, c’est pour plus d’efficacité, puisqu’elle sera remplacée par l’Institut du service public (ISP) qui jouera le même rôle, et davantage. En Tunisie on assiste plutôt à la mort lente de cette institution, et rien à la place, alors que le pays a le plus grand besoin de ses lumières en ce moment…

La nouvelle doctrine signée Kais Saied

Du côté de Tunis la règle, hélas, c’est plutôt de désigner des novices – autant dire des amateurs – dans la conduite des affaires publiques et de leur adjoindre une pléthore de conseillers (vous imaginez le coût pour les finances publiques). Un non-sens absolu puisque pour pouvoir juger de la pertinence d’un conseil, aussi lumineux soit-il, il faut en savoir soi-même un rayon. Et ce n’est absolument pas le cas, par exemple, de la plupart des ministres que le président de la République, Kais Saied, s’est choisi…

Presqu’aucun ministre n’a fréquenté les bancs de l’ENA, je ne vous parle même pas d’une solide expérience dans la gestion des affaires publiques. Vous me direz qu’on ne peut pas en demander autant à des enseignants, fussent-ils dans le supérieur. Et de ce point de vue l’inexpérience de Kais Saied est très emblématique. C’est ce qui explique sans doute ses rapports difficiles avec ses conseillers, qu’ils n’écoutent pas ou peu, ce qui explique aussi les vagues successives de départs dans son cabinet depuis qu’il a remplacé Mohamed Ennaceur au palais de Carthage, désigné président par intérim suite au décès de Beji Caied Essebsi…

 

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