Economie

L’ajustement des prix des carburants à 7% impliquerait la levée des subventions d’ici quelques mois

L’ajustement des prix des carburants à 7% impliquerait la levée des subventions d’ici quelques mois

 En vertu d’un arrêté de la ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Energie publié le 23 novembre 2022, portant amendement de l’arrêté du ministre de l’Energie et de la Transition énergétique et du ministre des Finances du 31 mars 2020, le taux de l’ajustement mensuel du prix de vente au public du carburant a été augmenté de 5 à 7% alors que la loi de finances pour l’année 2022 prévoit d’activer l’ajustement automatique des prix des produits pétroliers (essence, gasoil ordinaire et gasoil 50)  à hauteur de 3%. 

Hier, les ministères de l’industrie et du commerce viennent de publier un communiqué commun, pour annoncer que, à la suite des fluctuations du prix du baril de pétrole, dont le Brent qui a atteint 100,5 dollars le baril et dans le but de répondre à la demande à l’échelle nationale, et éviter les ruptures de stock, il a été décidé d’opérer une nouvelle majoration des prix des carburants à la pompe. La majoration est en moyenne de 5,5%.

Des hausses de prix en rafale

Cette majoration de prix est la cinquième depuis le début de l’année. Au fait, les prix des carburants ont augmenté de 3% respectivement aux mois de février et mars ensuite de 5% en avril, de 3,9 % mi-septembre après un arrêt de 5 mois et de 5,5% hier soit au total pour 20,4%.

Néanmoins, la ministre des Finances, Sihem Nemsia a annoncé fin octobre dernier la levée de la subvention des carburants à l’horizon de 2026 et ce, dans le cadre d’application des réformes gouvernementales en matière d’ajustement automatique des prix des carburants tout en soulignant que le gouvernement est engagé dans le lancement d’une plateforme pour cibler les personnes concernées par la subvention en fin d’année.

Récemment, Rachid Ben Daly, directeur général des Hydrocarbures au ministère de l’Industrie, de l’Energie et des Mines a déclaré que la hausse des prix des carburants tient à des facteurs exogènes du fait que l’augmentation des prix mondiaux entraîne un accroissement du coût d’approvisionnement, indiquant que le prix réel de carburant est de l’ordre de 4,500 dinars le litre mais la caisse de compensation supporte l’écart par rapport au prix de vente.

Toutefois, la décision prise pour un ajustement mensuel automatique des prix des carburants de 7% pourrait impliquer le dépassement des prix des carburants les 4,6 dinars d’ici le mois de septembre prochain.

En outre, l’accroissement des prix des carburants n’est pas directement ressenti par les consommateurs pour des raisons d’inélasticité directe entre consommation et prix, mais l’impact de la hausse se sentira généralement à moyen terme en deuxième vague d’inflation.

La levée des subventions des carburants, estimées annuellement à près de 3 milliards de dinars, entrainera directement une baisse notable du pouvoir d’achat et plongera davantage de citoyens dans la précarité. L’estimation de la corrélation entre la montée de la pauvreté et la hausse des prix de l’énergie est difficile en Tunisie du fait que l’Institut National de la Statistique ne présente pas le poids de la consommation d’énergie dans le panier du consommateur.

Impact socio-économique non mesuré

Toutefois, la levée des subventions des hydrocarbures et l’adoption des prix réels, sans mesures d’accompagnement, ne peut que gripper l’appareil productif en Tunisie et menacer l’accès de la population à ses droits économiques et sociaux de base notamment en ce qui concerne les services publics tels que le transport.

Et pour cause, la Tunisie subit depuis plusieurs années la pression des bailleurs de fonds internationaux pour lever les subventions sur les carburants, et adopter le système de la réalité des prix en supprimant les écarts entre le prix à l’importation et le prix à la vente, sous prétexte d’assurer les équilibres macroéconomiques du pays.

L’argument évoqué par les bailleurs de fonds derrière cette démarche consiste au fait que le système de subvention des carburants, tel qu’il est conçu actuellement, est inéquitable, car il profite aux ménages les plus aisées par rapport aux familles les plus vulnérables.

Cependant, la réforme du système de subvention des carburants doit se faire sur la base d’études quantitatives pertinentes puisque les carburants sont des produits vitaux qui touchent à plusieurs secteurs de l’activité économique (l’industrie, le transport, l’agriculture et la pêche, les commerces et l’hôtellerie…). Ainsi, l’un des impacts directs de l’augmentation des prix est que tout l’appareil économique sera négativement touché et que le niveau général des prix grimpera.

Une levée des subventions aura ainsi pour résultats une hausse des coûts de la production industrielle et, partant, une flambée des prix des produits particulièrement les aliments sensibles outre la montée des charges d’exploitation pour les acteurs économiques privés et publics surtout dans le secteur du transport, ce qui engendrera une hausse de ses coûts.

L’accélération de l’inflation causera en effet domino la détérioration du pouvoir d’achat pouvant menacer le droit à l’alimentation, la perte d’emplois dans les secteurs touchés (transport, agriculture…) menaçant le droit au travail et la réduction de la mobilité des personnes et donc la restriction de leur accès à la santé et à l’éducation.

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