Alors que le conflit militaire entre l’Iran et Israël atteint un seuil critique, une voix dissidente de poids s’est faite entendre depuis les États-Unis. Reza Pahlavi, fils du dernier Shah d’Iran et figure emblématique de l’opposition en exil, a condamné sans détour l’engagement du régime iranien dans cette guerre, qu’il qualifie de conflit imposé par une élite politico-militaire déconnectée de la volonté populaire.
Dans une déclaration diffusée vendredi, Pahlavi affirme que « cette guerre n’est pas celle de l’Iran ni du peuple iranien, mais celle de Khamenei et de la République islamique », dénonçant un régime qui « sacrifie la nation pour ses intérêts idéologiques et sa survie politique ».
Une prise de position qui divise mais ne surprend pas
Installé aux États-Unis depuis des décennies, Reza Pahlavi n’a jamais rompu avec son ambition de voir tomber le régime des mollahs. Sa dernière sortie publique s’inscrit dans une stratégie bien rôdée : associer la crise actuelle à une opportunité de soulèvement populaire, et appeler à la désobéissance au sein des forces armées iraniennes. Il exhorte les militaires à « ne plus obéir à des ordres criminels » et à rejoindre la rue plutôt que de servir un pouvoir qu’il juge illégitime.
Ce positionnement lui vaut le soutien d’une partie de la diaspora iranienne, mais suscite également des accusations de récupération opportuniste dans un moment de tension nationale. En pleine guerre, se désolidariser du régime revient, pour certains, à affaiblir la défense du pays.
Une manœuvre sincère ou un levier géopolitique ?
Si la sincérité de Reza Pahlavi dans sa critique du régime ne fait pas de doute auprès de ses partisans, la temporalité de ses déclarations soulève des questions stratégiques. À quelques heures d’intervalle, ses propos étaient largement relayés sur Fox News et d’autres médias conservateurs américains, connus pour leur proximité avec des cercles néo-conservateurs favorables à un durcissement de la ligne face à l’Iran.
Plusieurs analystes notent également que ses interventions publiques coïncident avec les efforts d’Israël pour légitimer ses frappes préventives, en présentant le régime iranien comme totalement isolé — y compris par ses propres citoyens. Cette convergence de discours n’exclut pas une forme d’instrumentalisation, directe ou indirecte, de Pahlavi par certains intérêts à Washington ou Tel Aviv.
L’opposition intérieure, silencieuse mais attentive
À l’intérieur même de l’Iran, l’impact de ses appels reste incertain. Les soulèvements populaires des dernières années ont démontré un rejet profond du pouvoir religieux, mais sans adhésion massive à un projet monarchique de retour au passé. La jeunesse iranienne, urbaine et connectée, aspire avant tout à une gouvernance civile, moderne et souveraine, loin à la fois des ayatollahs et de la dynastie Pahlavi.
Cependant, dans un contexte de guerre totale, la parole de Reza Pahlavi gagne en portée, notamment auprès de certains milieux militaires et technocratiques épuisés par des décennies de confrontation avec l’Occident. Un appel à la désobéissance de l’intérieur, surtout s’il est appuyé par des figures respectées au sein de l’appareil d’État, pourrait faire vaciller un système déjà fragilisé par les sanctions, les contestations sociales et les échecs économiques.
Vers une transition ou un chaos organisé ?
Si Reza Pahlavi espère toujours jouer un rôle dans la transition politique post-république islamique, sa crédibilité en Iran reste limitée, notamment à cause de son éloignement géographique et de son image perçue comme trop alignée avec les intérêts occidentaux. Le risque, pour ses soutiens, est qu’il devienne un simple outil de pression géopolitique, sans ancrage réel dans le tissu social iranien.
Mais dans une guerre où les lignes bougent rapidement et où la fatigue populaire est palpable, il pourrait aussi devenir un point de ralliement pour une partie de l’élite désillusionnée, à condition de réussir à incarner un projet démocratique national, et non un retour nostalgique au passé.
Entre posture morale et pièce d’un échiquier plus vaste
La déclaration de Reza Pahlavi contre la guerre menée par le régime iranien contre Israël n’est pas anodine. Elle s’inscrit à la fois dans une lutte de légitimité contre le pouvoir en place, et dans une dynamique géopolitique complexe où les acteurs internationaux cherchent à façonner la narration autant que les rapports de force.
Dans un moment où chaque mot pèse, son discours pourrait peser plus dans les cercles diplomatiques occidentaux que dans les rues de Téhéran, mais il témoigne d’un frémissement stratégique, à surveiller de près.
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