Economie

Le ministère de l’Agriculture voudrait louer les terres domaniales gré à gré et donner le droit de propriété aux étrangers

Le ministère de l’Agriculture voudrait louer les terres domaniales gré à gré et donner le droit de propriété aux étrangers

Mercredi 8 juin 2022, le ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche Maritime a publié sur sa page officielle sur les réseaux sociaux un aperçu de l’état d’avancement de la mise en œuvre du programme de réformse du ministère pour le premier semestre de l’année en cours et les mesures prises dans certains domaines vitaux relevant de la compétence du ministère.

Selon le ministère, des mesures seront pris pour relancer l’investissement dans le secteur agricole, notamment la suppression du plafond de participation étrangère au capital des entreprises agricoles, actuellement fixé à 66% à 100%, et l’octroi du droit aux investisseurs ayant des projets d’importance nationale de louer des terres agricoles domaniales gré à gré sans passer par les procédures d’appels d’offres. L’administration aura, selon le ministère d’Agriculture, le pouvoir discrétionnaire pour accepter ou de rejeter les offres proposées.

Commentant ces mesures, l’Observatoire tunisien de l’économie a estimé qu’elles ouvrent la porte au phénomène dit « d’accaparement des terres », par la location ou la vente de vastes terres agricoles au profit d’investisseurs souvent étrangers.

Selon l’Observatoire, les « réformes » visant à permettre à l’investisseur étranger de posséder des terres tunisiennes ne sont pas récentes. Elles ont été évoquées en 2013 dans le projet de loi sur les investissements, où des chapitres ont été proposés qui permettraient à l’investisseur étranger de posséder des terres agricoles tunisiennes, mais sous la pression des de la société civile, ils ont été abandonnés.

A propos de ce projet, le gouvernement tunisien a également reproposé le sujet sous une autre forme dans le cadre de la loi sur l’amélioration du climat des investissements en 2019, ce qui a incité l’Observatoire de s’interroger à nouveau sur l’objectif de la proposition du gouvernement actuel de permettre aux étrangers d’être pleinement propriétaires de terres agricoles.

Rappelons que durant la colonisation française de la Tunisie, les terres « agraires » étaient vendues à des sommes symboliques aux colons français, qui les exploitaient directement. Avec l’indépendance, les autorités tunisiennes ont dû ardument négocier avec les autorités françaises afin que ces terres soient restituées pour préserver l’indépendance du territoire tunisien, ainsi que la sécurité alimentaire de ses citoyens.

A ce titre, la loi n°69-56 du 22 septembre 1969 interdisant aux étrangers d’acquérir les terres agricoles en Tunisie indique dans son article premier : « le droit de propriété des terres à vocation agricole ne peut appartenir qu’aux personnes physiques de nationalité tunisienne, aux coopératives ou aux personnes morales publiques, étatiques ou para-étatiques ».

De ce fait, les étrangers ne peuvent pas accéder à la propriété agricole. Ils peuvent louer pour une longue durée de telles terres, mais sans que cela ne leur confère la propriété. Cela a été rappelé par le code d’incitations aux investissements de 1993 dans son article 3 : « … Les étrangers peuvent investir dans le secteur agricole dans le cadre de l’exploitation par voie de location des terres agricoles. Toutefois ces investissements ne peuvent en aucun cas entrainer l’appropriation par les étrangers des terres agricoles ».

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