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Les labos qui fournissent les médicaments essentiels partent, le ministre leur dit Bon vent

Les labos qui fournissent les médicaments essentiels partent, le ministre leur dit Bon vent

On guettait la réaction du ministre de la Santé, Ali Mrabet, suite à l’avalanche de départs des grands laboratoires qui fournissent, tout de même, 78% des médicaments dans les hôpitaux et 52% dans les pharmacies. Le ministre n’a pas pipé mot en juin 2022, en tout cas pas suffisamment, quand 5 ténors mondiaux ont mis les voiles ; cette fois il a daigné commenter le départ de 3 grands noms de l’industrie pharmaceutique. Le moins qu’on puisse dire est que ses mots sont surréalistes et terriblement inquiétants…

«Il est vrai que trois laboratoires pharmaceutiques ont quitté la Tunisie, mais leurs médicaments sont disponibles et le resteront. Ils opéraient en Tunisie et ont dû quitter le pays pour plusieurs raisons, notamment à cause de restructurations internes», a dit le ministre sur une radio privée ce jeudi 3 novembre.

Ce n’est absolument pas ce que SEPHIRE (Syndicat des Entreprises Pharmaceutiques Innovantes et de Recherche) a confié à la presse le 25 octobre 2022 et que nous avons relaté ici-même. Quid de l’ardoise de plus de 700 millions, une facture qui traîne depuis 6 ans ? Quid des 220 millions de dinars que le gouvernement avait promis pour soulager les laboratoires étrangers, pour leur permettre de continuer à innover et payer les salaires ? Quid des tracasseries administratives qui jalonnent les Autorisations de Mise sur le Marché (AMM), 6 ans de tourments, tout de même ?

Rien de ce qu’a dit le ministre n’a été évoqué par les laboratoires innovants, personne n’a justifié ces départs par des “restructurations internes“. En fait c’est la médiatisation de cette affaire, avec un SEPHIRE qui déballe publiquement alors que jusqu’ici il ne mouftait pas, qui a fait sortir du bois Ali Mrabet pour débiter cet argumentaire stupéfiant…

«Mais cela ne peut que nous obliger à compter sur nous-même, sur les industries pharmaceutiques locales», a conclu le ministre…

Alors dans ce cas qu’il nous dise quoi et comment faire. Sachez que 56% des médicaments que fournissent ces laboratoires n’ont pas d’équivalents sur le marché local et que les laisser filer pour ensuite importer prendra du temps et coûtera beaucoup plus cher – en devises s’il vous plait.

Je rappelle qu’on parle de traitements pour des pathologies lourdes du type cancers, diabète, hypertension, etc. Je rappelle aussi que ces laboratoires ne font pas que fournir des médicaments aux hôpitaux et pharmacies, ils font travailler l’industrie pharmaceutique locale (les génériques et les autres médicaments sous-traités), ils payent des impôts en Tunisie, ils donnent des emplois – 2000 -, forment des médecins, créent des réseaux pour les praticiens tunisiens à l’étranger, etc. Alors M. le ministre comment on va faire sans eux ?

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