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Ma vie: Ftayma, veuve avec un futur bachelier

Ma vie: Ftayma, veuve avec un futur bachelier

Tunisie Numérique a mené une série d’interviews auprès des familles tunisiennes pour savoir comment elles gèrent leurs budgets en ces temps de crise que traverse le pays.

Ces tunisiens proviennent de différentes classes sociales, sont d’âges différents et habitent dans des quartiers aussi bien huppés que populaires. Ils ont accepté volontairement de répondre de manière spontanée et anonyme aux questions de Tunisie Numérique. Les récits ont été retranscrits tels quels.

Ftayma a 58 ans. Elle est veuve et vit avec son fils unique Helmi de 18 ans dans une maisonnette de la ville d’Om Larayes du gouvernorat de Gafsa.

Ftayma nous confie : « Mon défunt mari, est décédé d’un cancer des poumons, Allah Yahmou. Je suis sa deuxième femme. Il m’a laissé seule avec Helmi qui passe cette année son baccalauréat en économie et gestion ».

Des revenus limités

Ftayma nous parle des revenus limités du foyer : « Je reçois une prime pour les familles défavorisées de 230 dinars par mois. Fort heureusement les demi-frères de Helmi sont là pour nous aider. Ils nous donnent 300 dinars par mois. Ce n’est pas beaucoup d’argent mais c’est déjà le maximum pour eux ».

Avec un visage souriant, Ftayma annonce le dicton : « Que dieu ne prive un cher d’un raisin لا تحرم حَبيْبة من زبَيْبة».

Ftayma nous déclare : « J’achète tout le nécessaire de la maison à crédit. Je paie chaque début de mois mes dettes d’achats de légumes et autres produits alimentaires du mois précèdent. Ça me coûte en moyenne 450 dinars par mois ».

Pour la couverture sociale, Ftayma nous dit qu’elle bénéficie de la gratuité des soins via le carnet blanc qu’elle détient.

Ftayma n’a pas de compte bancaire ni de compte postal. Elle reçoit sa prime sous forme de mandat postal.

Le coût de la vie Vs les astuces de Ftayma

Ftayma profite de l’occasion pour nous parler de la cherté de la vie : « La vie est devenue trop chère. Nous ne voyons la viande rouge que 02 à 03 fois par an et notamment à l’occasion de l’Aïd Kébir. »

Ftayma rajoute : « Pour compenser la viande rouge, j’achète comme toutes les familles à faibles revenus du poulet. C’était assez accessible il y a quelques années ».

Ftayma précise :« Ma stratégie est simple. J’achète un poulet entier que je coupe en petits morceaux pour pouvoir utiliser la viande dans le plus de plats possibles. C’est économique et ça marchait ».

Ftayma fronce les sourcils, change d’air et nous dit sur un ton grave : « En évitant le gaspillage et en usant de ‘‘ruses’’ je m’en sortais. Plus maintenant, c’est fini. Le prix du poulet a dépassé les 20 dinars ! Même le poulet avarié n’est pas à ma portée ! Les prix ont flambé et moi je me consume également كي تشعل النار في الأسعار نتحرق من داخل  . ».

Ftayma insiste pour adresser un message aux spéculateurs et autres marchands peu scrupuleux : « Hram Alikom Wallah –    حرام عليكم فما ربي-Ayez pitié de nous. Un simple couscous aux légumes me coûte 7 dinars au minimum. Comment voulez-vous que je nourrisse ce gaillard avec si peu d’argent ! ».

Ftayma nous raconte une de ses ‘‘astuces’’ : « Je conserve les restes de pain dans un sac. Je découpe des petits cubes que je plonge dans la sauce. C’est un plat parmi tant d’autres ».

Ftayma nous dit payer 180 dinars de factures de la STEG et de la SONEDE. Pour respecter les échéances, elle s’endette souvent auprès des voisins.

Elle dit à ce sujet : « Mes voisins sont ma deuxième famille. Ils sont toujours là pour m’aider malgré leurs situations financières difficiles eux aussi. Quand il n’y a plus d’issues possibles, je fais appel à eux كي ماعادش فيها هوما أملي الوحيد وهوما يعاونوني أما هوما ناقصي حال زادا ».

Travailler pour Helmi

Ftayma nous apprend qu’elle travaille, de temps en temps, pour compléter les revenus du foyer.

Elle raconte à ce sujet : « Je fais des petits boulots pour gagner de l’argent. Je travaille le piment rouge à la maison et le vend séché en grappes ou en poudre après l’avoir moulu ».

Ftayma continue : « Je prépare la Mloukhia et d’autres épices que je vends aux voisins, à la famille et aux commerçants de gros. Avec ça, je peux gagner jusqu’à 1 000 dinars certains mois, quand les affaires vont bien ».

Ftayma rajoute :« Toute cette peine et ce labeur est pour subvenir aux besoins de Helmi. Il doit poursuivre ses études. Il doit fournir un effort supplémentaire cette année et réussir son baccalauréat.  Ça sera ma grande récompense ».

Ftayma précise encore : « Les demi-frères de Helmi aiment leur frère. Ils lui achètent depuis tout petit les vêtements » .

Une rentrée spéciale cette année

Ftayma finit par nous dire : « Contrairement aux années précédentes où j’achetais la fourniture scolaire dans les marchés journaliers, cette année j’ai pris la décision d’acheter tout le nécessaire d’une librairie. Ça m’a coûté 500 dinars que je vais payer en plusieurs tranches. Cette année est exceptionnelle : Helmi va passer son baccalauréat. Il réussira Inchallah  باش ينجح ياربي».

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