Chaque année, près de 6 millions d’ânes sont abattus à travers le monde pour approvisionner un marché en plein essor : celui de la gélatine d’âne, connue en Chine sous le nom d’« Égiao », un ingrédient clé de la médecine traditionnelle chinoise. C’est ce qu’a révélé la fondation britannique Donkey Sanctuary (littéralement « Le sanctuaire de l’âne »), spécialisée dans la défense de ces animaux souvent oubliés.
Face à la rareté croissante des ânes en Chine, les réseaux de ce commerce se sont tournés vers les pays du Sud, en particulier l’Afrique subsaharienne, où l’âne reste un pilier essentiel de la vie rurale.
Transport de l’eau, des denrées agricoles, déplacements des femmes et des enfants : dans de nombreuses régions, l’animal est au cœur de l’économie familiale.
Un impact dramatique sur les communautés rurales
Cette exploitation non régulée n’est pas sans conséquence pour les populations locales. En Kenya, un simple vol d’âne peut faire chuter les revenus d’une famille jusqu’à 73 %, selon les témoignages recueillis par l’ONG. Résultat : des enfants déscolarisés pour transporter eux-mêmes les charges, et des femmes contraintes de remplacer l’animal volé, souvent en s’endettant.
Le rapport intitulé « Donkeys stolen, futures stolen » (Des ânes volés, un avenir volé) insiste sur l’impact de cette industrie sur les Objectifs de développement durable (ODD), notamment ceux liés à la lutte contre la pauvreté et à l’égalité des genres. Il souligne que près de 90 % des femmes rurales dépendent directement des ânes dans leur vie quotidienne, notamment pour l’eau, le bois ou les récoltes.
Le phénomène ne se limite pas au continent africain. Au Brésil, le cheptel d’ânes a chuté de 94 % en 30 ans, passant de 1,37 million en 1996 à seulement 78 000 têtes en 2025. Un effondrement qui alarme les défenseurs de la biodiversité, alors que l’âne, considéré comme un animal intelligent, sociable et résilient, est souvent exclu des politiques de protection animale.
Un appel continental pour sauver l’âne africain
Face à cette urgence, la Côte d’Ivoire a accueilli en juin le premier “Sommet africain pour la protection de l’âne”, réunissant ONG, représentants gouvernementaux et chercheurs. L’objectif : coordonner une réponse continentale à ce commerce destructeur et protéger les communautés rurales menacées.
La fondation Donkey Sanctuary plaide pour un encadrement strict, voire une interdiction pure et simple de l’exportation de peaux d’ânes, mais aussi pour la reconnaissance du rôle économique et social de l’animal, qui mérite respect, protection et compassion.
Ainsi, derrière le commerce des peaux d’âne se cache un drame silencieux qui frappe des millions de familles rurales, particulièrement en Afrique. Si aucune action ferme n’est prise, les conséquences pourraient être irréversibles, tant pour les communautés dépendantes que pour la survie même de l’espèce.
À l’heure des grands discours sur le développement durable et la justice sociale, la protection de l’âne pourrait bien devenir un symbole de lutte pour un monde plus équitable et respectueux de toutes les formes de vie.
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