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Maroc : La reconnaissance du travail domestique et sa compensation financière en gestation, les islamistes vont s’étouffer

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C’est un combat que les femmes marocaines ont porté et qu’ils sont en passe de gagner. Les Marocaines grillent en moyenne 5 heures par jour dans des tâches domestiques harassantes. Un travail ingrat qui passe sous les radars. C’est peut-être bientôt la fin d’une injustice, le travail domestique pourrait enfin être reconnu dans la “Moudawana” (Code de la famille). Une vraie révolution est en gestation, avec des échos en Afrique, dans le monde arabe et ailleurs.

Les plus conservateurs, principalement les islamistes, freinent des quatre fers, éructent, protestent, tentent de discréditer ce progrès social majeur, mais l’étincelle est partie et il sera difficile de contrer cette dynamique. Les islamistes sont très volontaires quand il s’agit de faire la promotion du mariage des mineurs, pour le statut des femmes au foyer il n’y a plus personne. Tant pis pour eux…

Préparer le repas, nettoyer, planifier”, un slogan mentionné sur des tabliers ménagers par l’Association Tahadi pour l’égalité et la citoyenneté, pourrait prochainement recevoir ses lettres de noblesse et rendre justice au travail domestique. L’association parrainée par ONU Femmes a mis sur orbite une compagne de sensibilisation dénommée “Le partage des tâches domestiques n’est pas une honte”, dont l’optique est de faire reconnaître cette tache “invisible”. Cet activisme a pour toile de fond la révision de la très polémique “Moudawana”.

Lors d’un séminaire organisé à Rabat le 15 avril dernier, sur le thème “La reconnaissance du travail domestique dans les cas de divorce”, le ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi a dit du travail domestique qu’il est un “facteur fondamental de production de richesse”. Il a ajouté que sa reconnaissance était indispensable pour instaurer l’égalité des sexes, rapporte The New Arab.

Les spécialistes avaient à l’occasion posé sur la table les voies et moyens pour prendre en compte ces “millions d’heures de travail invisibles” qui s’abattent sur les femmes dans leurs foyers. La reconnaissance du travail domestique et son indemnisation en cas de divorce ou d’héritage font partie des réformes suggérées dans la révision de la “Moudawana” en décembre 2024.

Les propositions avaient été sévèrement critiquées par les cercles conservateurs marocains, qui ont accusé le Conseil religieux des oulémas de plier face à la pression populaire. Le texte de loi projette de prendre des mesures fortes pour fixer la garde partagée des enfants, le droit des mamans divorcées à conserver la garde après un remariage ainsi qu’un cadre clair pour protéger les femmes après le divorce.

D’après la dernière enquête du Haut-Commissariat au Plan (HCP), la part des femmes dans les tâches ménagères est de 92%, contre 24% pour les hommes. Bouchra Abdou, directrice de l’association Tahadi, a souligné dans le journal Telquel la “valeur économique réelle” du travail domestique féminin, surtout au niveau du “partage des biens acquis durant le mariage (…). En cas de divorce, une femme doit pouvoir faire valoir ses droits, même si elle n’a pas exercé d’activité rémunérée à l’extérieur du foyer.”

Il est inacceptable qu’une femme, après des années de mariage, quitte son foyer avec 0 dirham, alors que c’est elle qui, par son engagement domestique, a permis à son mari de s’épanouir professionnellement et de construire son patrimoine”, ajoute la militante féministe. Elle est même d’avis qu’il faut “aller plus loin” en installant “une caisse spécifique de sécurité sociale ou de retraite” pour les femmes au foyer…

Ce travail non rémunéré pèse lourd dans le PIB du pays, plus de 285 milliards de dirhams (28 milliards d’euros), soit quelque 35%. Selon l’étude du HCP, une évaluation étalonnée sur les salaires ferait monter ce chiffre à plus de 513 milliards de dirhams (51 milliards d’euros).

Le Code de la famille révisé attend toujours sa promulgation par l’exécutif. Si le document est validé, le Maroc deviendrait l’un des tout premiers pays à reconnaître le travail domestique, avec les compensations financières qui vont avec.

 

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