Economie

Note internationale : Le microcrédit aggrave le surendettement et la pauvreté

Partager

Le Comité pour l’abolition de la dette illégitime (CADTM) qui est un réseau international qui milite pour l’annulation des dettes odieuses vient de publier le 28 octobre dernier une note intitulée « La dette privée illégitime au Sud de la planète : le cas du microcrédit ».

La note a révélé que le « système dette » se durcit partout dans le monde avec plusieurs changements qui sont intervenus au cours des 40 dernières années, principalement depuis l’éclatement de la crise de la dette du Tiers-monde au début des années 1980.

Le développement du microcrédit

À partir des années 1980 se développent des initiatives de microcrédit. Depuis le début, des gouvernements et de grandes institutions internationales ont soutenu la promotion du microcrédit, indique le CADTM et pour cause l’enjeu est de taille du fait que les taux d’intérêts réels pratiqués dans le secteur de la microfinance oscillent entre 25 et 50%.

Selon les données de la note du comité, en 2019, le nombre des clients des instituions du microcrédit atteignait 916 avec 140 millions, dont 80% de femmes, et un portefeuille de crédit de 124 milliards de dollars. Parmi eux, 65% des emprunteurs vivent en zone rurale.

Cependant, on révèle que de nombreuses études empiriques consacrées au microcrédit et de nombreux auteurs montrent que celui-ci ne permet pas réellement aux clients de sortir structurellement de la pauvreté du fait qu’il plonge une grande partie des usagers dans l’endettement, voire le surendettement. Il ne permet pas le développement d’entreprises dans le secteur formel.

La spirale de l’usure

En effet, il a été constaté que le microcrédit reproduit les mécanismes qui génèrent la pauvreté. Une fois endettées, les personnes, en majorité des femmes, peuvent être plus facilement dépossédées, soumises et obligées de chercher à s’incorporer au marché du travail salarié pour trouver une source de revenus.

De la sorte, elles contribuent à renforcer la masse des sans-emplois et à peser vers le bas sur les salaires. Dans maintes situations, les clients des institutions de microcrédit qui sont en difficulté de paiement finissent par avoir recours aux usuriers traditionnels qui posent moins de conditions mais exigent des taux encore plus élevés.

En Tunisie, le taux d’intérêt global du microcrédit estimé à 32%

D’après le rapport annuel 2021 de l’Autorité de contrôle de la microfinance (ACM), le taux effectif global (TEG) moyen pondéré des institutions de microfinance (Société Anonyme – SA et associations de microcrédits – AMC) IMF SA a connu une tendance haussière durant les 4 dernières années en passant à 32,86% au terme du deuxième semestre de l’année 2021, enregistrant ainsi un taux de croissance annuel moyen de 2,1%. Le TEG moyen des IMF SA a atteint 31,80 % au premier semestre 2022.

Le niveau élevé des taux d’intérêt demandés par de nombreuses IMF est une question de plus en plus préoccupante et plusieurs questions se posent à cet effet : Comment les IMF qui ont pour objet l’inclusion financière des plus vulnérables imposent-elles des intérêts aussi lourds ? Comment les pouvoirs publics tolèrent ces pratiques ? Est-il acceptable que les plus vulnérables subissent les répercussions de politiques qui aggravent leur précarité ? Quels sont les mécanismes pour protéger les pauvres d’obtention de prêts à des taux d’intérêt abusifs ?

Notons que le président de la République Kaïs Saïed vient de décréter un nouveau décret présidentiel paru dans le numéro du journal officiel de la République Tunisienne du 21 octobre dernier infligeant des amendes allant de 30 à 100 mille dinars aux banques et institutions financières accordant à leurs clients des crédits à un taux d’intérêt excessif. 

Ce décret présidentiel n° 2022-67 daté du 19 octobre 2022 concerne tout financement consenti à un taux de profit effectif global qui excède au moment où il est consenti, le taux de profit effectif moyen pratiqué au cours du semestre précédent par les banques et les établissements financiers agréés pour exercer les opérations bancaires islamiques, d’une marge qui est fixée par décret selon les catégories de financements et de bénéficiaires.

Laissez un commentaire
Publié par
Mohamed Ben Abderrazek