Economie

On ne s’improvise pas auteur (de discours) !

On ne s’improvise pas auteur (de discours) !

Hors contexte. Telle est la première impression qui se dégage du discours d’ouverture officielle de l’édition 2023 des « Journées de l’Entreprise ». A la déception des absences physiques ; celle la Cheffe du Gouvernement mais aussi, celle moins conséquente mais aussi fâcheuse, de la ministre du Commerce et du Développement des exportations ; s’est ajoutée l’insuffisance des solutions. L’allocution a laissé un goût d’inachevé aux chefs d’entreprises, venus, en masse, pour guetter une lueur d’espoir dans ce marasme ambiant. Malheureusement, la grisaille ne s’est pas éclaircie.

Prononcé par Mme Neila Nouira Gongi, ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Energie, au nom de la Cheffe du Gouvernement, ce discours d’ouverture a été creux. L’on a du mal à croire que c’est l’œuvre de Mme Bouden. Professeur universitaire et depuis plus d’une année en place, elle aurait pu faire mieux. Beaucoup mieux !

Pourquoi ? car, le discours s’apparente à un puzzle de phrases qu’on a voulu imbriquer. Ça donne l’impression que c’est un « ramassis » d’extraits de texte sans fil conducteur.

C’est fort probablement l’œuvre de col-blanc vivant dans les tours d’ivoire de l’administration. Déconnecté de la réalité des tunisiens et de celle des chefs d’entreprises. Contrainte de le lire, au nom de la Cheffe de la primauté, la ministre a débité, mécaniquement, les mots qui se succédaient dans un texte, assez long et fourre-tout. Récupérant la patate chaude, elle a fait le job. Pour, ensuite, partir illico presto.

Les auteurs de ce texte, pseudo discours, ont certainement voulu défendre la démarche des autorités tunisiennes auprès du Fonds Monétaire International (FMI). Le but est louable. Mais, mal exécuté. L’amateurisme est béant ! On défend des idées, des stratégies et des visions. Les mesures, ce ne sont que des détails qui peuvent changer au gré des contextes, de la conjoncture ou du système politique en place. 

Prêchant pour la paroisse gouvernementale, le discours précise que « le gouvernement a élaboré un programme national de réformes réalistes, pouvant être mises en œuvre, dans le cadre d’une approche participative, tout en prenant en considération l’importance du volet social ». Creux et sans âme. Même les plus optimistes ont vu au-delà de ce discours, un acte de persuasion mal exécuté. Le timing est aussi mal choisi. Idem pour le cadre. Trois éléments fondamentaux de rédaction de discours ignorés. Car, inconnues des auteurs.

On évoquera, aussi, l’utilisation des messages maintes fois rabâchés. La répétition pourrait ancrer certaines idées auprès des publics. Reste à avoir les bonnes idées. Mais aussi l’intelligence de les répéter à bon escient. Deux autres éléments qui s’ajoutent à la liste des absents dans l’allocution de ce vendredi 09 décembre 2022.

Plus loin, l’on pourrait lire que « les réformes sont fondées sur la réforme globale de la fiscalité, en vue de consacrer la justice fiscale, la transparence des transactions, la modernisation de l’administration fiscale, la rationalisation des avantages fiscaux et l’intégration du secteur parallèle. La loi de finances pour l’exercice 2023, comprendra des mesures dans ce sens ».

C’est cette même LdF 2023 décriée par tous ; notamment des professionnels ; serait le catalyseur d’un changement tous azimuts ? On en saura plus et mieux à sa publication. Mais, pour l’instant, l’on a du mal à le croire.

En plus des trois éléments précités, l’on ajouterait l’absence de pédagogie. Il est certain que si elle avait eu à le dire, Mme Bouden aurait pu ajouter sa touche personnelle à ce discours. La Cheffe du Gouvernement a été professeure de l’enseignement supérieur, formateur, directrice générale de la qualité au sein du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, chargée de mission au cabinet de ministre, cheffe d’unité de gestion par objectifs pour l’exécution du projet de la réforme de l’enseignement supérieur … Autant dire que pour réussir ces caps professionnels – et elle l’a fait brillamment – une bonne dose d’intelligence sociale, de logique et de pédagogie a été nécessaire.

Il paraît clair que l’objectif principal de cette allocation a été de rallier les présents, mais au-delà l’opinion publique, à l’idée de la nécessité de conclure un programme avec le FMI pour amorcer un cycle de réformes que tout un chacun sait qu’elles seront délicates pour ne pas dire difficiles.

Malheureusement, on ne peut convaincre un chef d’entreprise, et au-delà un citoyen lambda, qu’un Gouvernement qui a du mal à combattre la spéculation, le commerce parallèle et l’économie informelle (PS : voir le dernier rapport de la Banque Mondiale) pourrait arrimer à bon port une batterie de réformes dont les superpuissantes centrales syndicale et patronale ont dû mal à les soutenir publiquement !

Dans ce discours on a été informé que « le gouvernement est convaincu que le programme de réformes va permettre de maîtriser progressivement, les équilibres des finances publiques et aura un impact positif sur l’emploi à moyen et long termes ».

Si besoin d’un décodeur pour expliquer le message, il ne faudrait pas compter sur les journalistes. Car, à ceux présents à cet événement pour assurer la couverture et relayer les idées du Gouvernement, la ministre-messager s’est contenté de lancer « je ne suis pas autorisée à parler » aux médias !

Abstraction faîte des causes directes de son absence, Mme Bouden a bien fait de ne pas se déplacer à Sousse pour lire un pareil discours. Même si on doute que le problème de langue et d’utilisation de l’arabe littéraire pourrait poser un problème, la Cheffe du Gouvernement aurait pu se contenter d’un ensemble cohérent d’idées, de messages rassurants opérateurs économiques et citoyens mais aussi de donner de l’espoir aux investisseurs tunisiens ou étrangers. Chose que cette allocution n’a pas su faire !

Que se passe-t-il en Tunisie?
Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!

Commentaires

Haut