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Par Abdelaziz Gatri : Suspense insoutenable et lenteur inexplicable

Par Abdelaziz Gatri : Suspense insoutenable et lenteur inexplicable

Les béni-oui-oui et autres inconditionnels du tout-président ne manquent pas de s’en prendre avec  une consternante véhémence digne des plus violents des hooligans à toute voix appelant à raison garder, car gâchant par là même leur orgie insouciante post 25 juillet. Comme argument massue, ils avancent la question qui tue : où étiez-vous avant ? tiens, tiens ! C’est un air de déjà entendu. Je crois entendre les nahdhaouis qui nous disaient déjà : où étiez-vous avant le 14 janvier ? Eux qui n’y avaient même pas participé par le moindre jet de pierre. Si vous pensez rendre ainsi service au président, vous êtes totalement à côté de la plaque, à moins que cela ne procède d’une intention manifeste de lui nuire ainsi qu’à la Tunisie. Ecarter toute voix discordante revient plutôt à l’isoler, à le rendre dépendant d’un seul son de cloche, et donc vulnérable. Décidément, certains tunisiens, et ils sont de plus en plus nombreux, n’ont pas appris la leçon de l’éviction de Bourguiba, ni celle de la défection de Ben Ali, dont une grande part de responsabilité incombe à l’armée de laudateurs et de profiteurs dont ils s’étaient entourés.

Pour ma part, je rappelle à tout ce beau monde que j’avais voté Saïed en 2019 et fait campagne pour lui au second tour, et que qu’en tant que citoyen, je paie une partie de son salaire qui approche les 50 fois le SMIG, et de son confortable train de vie ainsi que celui de son entourage. Par ailleurs, je n’ai eu de cesse de dénoncer les dérives dictatoriales d’un régime sous la botte d’une secte terroriste au service d’un projet de Califat initié par la nébuleuse internationale des frères musulmans, sous la houlette du Qatar et de la Turquie. J’ai été, depuis le 5 mai, le premier à appeler à manifester le 25 juillet pour exprimer notre mécontentement et notre colère par rapport à la situation de précarité dans laquelle s’est retrouvée la majorité du peuple et aux vagues de répression aveugle dont il a fait l’objet, et à renverser la table sur ce clan mafieux-terroriste qui s’est emparé de l’Etat.

Mes appels se sont poursuivis jusqu’à la veille même du 25. Le lendemain j’ai été parmi les premiers et au premier rang des manifestants au Bardo, après avoir été empêché de me rendre sur l’avenue Bourguiba et j’ai eu à essuyer les charges de l’imposant dispositif policier mobilisé par Mechichi depuis son hôtel pour l’occasion afin de mâter les manifestants et de les empêcher d’accéder à la place du parlement. Le soir-même, et avant même l’intervention télévisée du président, que ce soit lors de mon passage à la télévision ou dans une vidéo que j’avais diffusée sur mon mur, j’avais appelé au refus de tout dialogue avec l’association de malfaiteurs au pouvoir, dialogue qui aurait pour effet de leur accorder un autre sursis et de trahir l’élan populaire visant à les évincer. Comme des millions de tunisiens, je suis sorti dans la rue pour célébrer jusque tard dans la soirée les mesures présidentielles, en appelant à ne pas s’arrêter en si bon chemin. La suite n’a pas manqué de me donner raison, avec son lot de décisions judicieuses, entrecoupées de quelques sorties hasardeuses et de quelques déceptions.

Les diligences effectuées au plus haut sommet de l’Etat auprès de pays frères et amis a engendré un réel élan de solidarité internationale avec la Tunisie dans sa lutte contre le COVID-19, lutte rendue désespérée par Mechichi, trop enclin à se la couler douce dans la suite royale d’un hôtel cinq étoiles à Hammamet, plutôt qu’à se soucier du sort de millions de tunisiens concernés, refusant même d’assurer l’ordre lors de la journée nationale de vaccination prévue  pour l’aïd, pourtant décidée par son propre ministre de la santé. L’afflux de plusieurs millions de vaccins qui s’en est suivi, ajouté à la mobilisation des services de santé et de sécurité, à celle de la société civile, et à l’élan populaire, a fait de la journée nationale de vaccination du 8 août et des journées suivantes un succès indiscutable.

De même, le pressing effectué par le président sur le système bancaire a donné ses fruits avec la décision prise par nos argentiers d’allouer une partie de leurs faramineux bénéfices (2% du total des intérêts) amassés en 2020 au soutien de l’effort de l’Etat en matière de santé et d’éducation.

D’autres mesures, telles que les arrestations et les mises sous résidence surveillée de figures notoires de la corruption et de quelques adversaires politiques, sont venues entre-temps conforter les uns, inquiéter les autres.

Mais force est de constater que tout ce qui a été entrepris depuis ce 25 juillet reste en deçà des attentes de ceux qui avaient manifesté pendant des mois pour le démantèlement de l’appareil sécuritaire parallèle de Nahdha et de son système de gouvernement mafieux, la décontamination de l’appareil de l’Etat de l’infiltration par des éléments terroristes à la solde de la secte et le sauvetage de l’économie tunisienne restée exsangue sous l’effet de la concurrence déloyale des produits turcs et chinois, de la corruption généralisée au plus haut sommet du gouvernement et du parlement, et du pourrissement du climat des affaires.

Le réveil risque de virer à la gueule de bois, surtout avec les échéances financières qui n’attendront pas et dont le rythme infernal dénote avec la lenteur et l’insoutenable suspense que vivent les tunisiens en l’attente de la nomination d’un chef du gouvernement et la fixation d’une feuille de route pour le restant du quinquennat. La patience des instituts de notation, des bailleurs de fonds, des partenaires et autres investisseurs étrangers n’est pas illimitée. Ni celle des fonctionnaires et des retraités.

Abdelaziz GATRI, activiste politique, Alliance patriotique pour l’ordre et la souveraineté (A.P.O.S).

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