Politique

Par Abderraouf Betbaieb : Le mandat de la Tunisie au Conseil de sécurité s’achève en queue de poisson

Par Abderraouf Betbaieb : Le mandat de la Tunisie au Conseil de sécurité s’achève en queue de poisson

Le mandat de la Tunisie au Conseil de sécurité des Nations Unies s’est achevé le 31 décembre 2021 sur un piètre résultat. La crise politique en Tunisie d’une part et les flottements de la diplomatie tunisienne ont lourdement hypothéqué la prestation de la délégation tunisienne à New York.

Le seul acquis de ce mandat de deux ans est incontestablement l’adoption de la résolution du Conseil de sécurité 2532 sur l’impact du Covid sur la paix et la sécurité dans le monde. Il s’agit d’un exploit historique pour la diplomatie tunisienne qui pour la première fois de son histoire depuis l’indépendance a conduit les négociations entre les maitres du monde pour les ramener le 1er juillet 2020 a un consensus. La palme d’or revient bien évidemment pour cette réussite à l’Ambassadeur Kais Kabtani qui s’est investi habilement pendant quatre mois de négociations à couper le souffle notamment entre les Américains et les Chinois pour arracher un deal historique qui a sauvé la crédibilité des Nations Unies et en particulier l’appel du Secrétaire général des Nations Unies à un cessez le feu dans les zones de conflit.

Etrangement, nul n’est prophète dans son pays. En effet, et contre toute attente l’Ambassadeur Kabtani a été muté le 4 septembre 2021 au Sultanat d’Oman pour des raisons que tout le monde ignore. Devant son refus de cette mutation, il a été cloué au pilori et lapidé sur les réseaux sociaux. Drôle de gestion des affaires de l’Etat.

Force est de constater que la désignation de trois Ambassadeurs à New York pour un mandat de deux ans a été largement compromettant pour la crédibilité et le sérieux de la Tunisie (M. Moncef Baati de janvier a mars 2020 puis M. Kais Kabtani de mars 2020 à septembre 2020 et enfin Tarek Ladab de septembre 2020 à décembre 2021). D’après les observateurs, il s’agit d’une première dans les annales du Conseil de sécurité.

A vrai dire, le départ abusif de l’Ambassadeur Kabtani a eu un effet dissuasif sur l’équipe tunisienne à New York qui s’est resigné depuis à suivre et à rattraper le rythme accéléré du Conseil de sécurité sans pouvoir présenter la moindre initiative, ni encore se prévaloir d’un quelconque leadership sur l’une des questions a son ordre du jour (questions libyenne et palestinienne, terrorisme, maintien de la paix…).

Les flottements de la diplomatie tunisienne et la méconnaissance des réalités géopolitiques nous ont même couté deux crises diplomatiques : L’une avec l’Ethiopie sur le barrage de la renaissance et la deuxième avec le Maroc sur le Sahara occidental.

Le plus drôle à relever de ces deux années de la Tunisie au Conseil de sécurité est que le Président de la République et chef de la diplomatie tunisienne M. Kais Saied n’a jamais jugé utile de s’entretenir une seule fois avec le Secrétaire général des Nations Unies M. Antonio Guterres, un grand ami de la Tunisie et un fervent défenseur de la transition démocratique dans notre pays. Quel gâchis.

Il est regrettable de constater qu’au lieu de saisir cette occasion pour faire le plaidoyer de la cause tunisienne et de se positionner sur la scène internationale, nos dirigeants offrent encore une fois au monde une image piteuse d’un pays précaire en désunion. Il est encore plus regrettable quand on sait que selon la règle de la rotation géographique, la Tunisie ne siègera au Conseil de sécurité que dans vingt ans. Dommage.

 Abderraouf BETBAIEB
Ancien ambassadeur
Membre de l’Initiative Démocratique

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