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Par Ali Gaaya*: Les changements climatiques et les catastrophes naturelles: Que dit la géologie ? (1ère partie)

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Le climat est actuellement un mot sur toutes les langues. Le changement climatique devient à juste titre une préoccupation planétaire et une affaire de société. Les indices indiquant clairement ce changement sont nombreux et perceptibles même aux non scientifiques : diminution de la pluviométrie, sècheresse prolongée durant des années ou inondations, fortes chaleurs atteignant des records, résultant en de nombreuses incendies de forêts de par le monde, rétrécissement des calottes glaciaires aux 2 pôles,  ainsi que les glaciers sur plusieurs montagnes telles que l’Himalaya, en Asie, les Alpes en Europe, ou le Kilimandjaro en Afrique, ainsi que l’élévation du niveau de la mer…

Ceci étant, on a tendance à attribuer ce changement « dramatique » du climat aux gaz à effet de serre (GES), et on accuse principalement le gaz carbonique produit par l’homme (dit CO2 anthropique), depuis la révolution industrielle, et on focalise tous les efforts sur la « décarbonation » de nos activités et la minimisation de la production et de l’émission de ce CO2, responsable de tous les maux et de l’augmentation « excessive » de la température, l’objectif ultime étant de maintenir l’augmentation de cette température à moins de 2°C d’ici la fin du siècle. Si cet objectif est louable et nécessaire, serait-il pour autant suffisant ?

Pour répondre à cette question, on devrait apprendre de l’histoire de la Terre, vieille de 4.6 Milliards d’années, et qui a connu de nombreux bouleversements climatiques, ainsi que cinq extinctions d’espèces.

La géologie qui «décortique» l’histoire de la Terre, sa paléogéographie et sa paléoclimatologie, pourra nous fournir de précieuses informations, et peut être, bouleverser notre approche de ce phénomène, souvent ressenti d’une façon émotionnelle !

Un article, en préparation, abordera ces phénomènes climatiques et ses changements parfois particulièrement dramatiques, mais si l’on considère les
800 000 dernières années, et jusqu’à l’apparition de l’Homo-sapiens ou « Homme moderne », on peut constater que les températures sur notre planète ont un cycle « glaciaire – interglaciaire » de 100 000 ans (cycles de Melankovitch (Fig.1a&b).

Ces cycles, qui corrèlent bien avec les concentrations du gaz carbonique dans l’atmosphère (CO2), avec parfois, une légère avance pour la température, sont liés essentiellement aux paramètres astronomiques de la Terre (orbite, excentricité, obliquité, ..), et son évolution interne (mouvements des plaques tectoniques, volcanismes, formation des montagnes et des océans, etc). On peut noter aussi, que durant les 200 000 dernières années, la Terre a connu 2 grandes glaciations où la température moyenne était voisine de 6°Celsius seulement, et 2 périodes interglaciaires, bien plus longues, où la température maximum de l’épisode chaud, remonte jusqu’à 18 °C, soit 4°C au-dessus de la température moyenne de 14°C, pré-industrialisation, prise comme référence, avant de diminuer progressivement!

On est actuellement en période interglaciaire chaude, et ce, depuis la dernière glaciation, qui a duré de 115 000 ans à 11 700 ans, et ceci risque de durer encore quelques décennies ou plus (Fig.2a).

Toutefois, si l’on examine avec plus de détails cette période post – glaciation, on peut noter que la température a varié de plus ou moins 1°C par rapport à la température actuelle de 15 °C, et que, plus proche de notre époque, la Terre a connu vers l’an 1000, une température élevée, de 15.5°C, qui a duré environ un siècle (medieval warm period, Fig.2b), avant de diminuer à 14.5°C, alors que l’époque médiévale n’avait pas connu encore de « révolution industrielle » !

Mais alors, quel rôle attribuer à l’augmentation des GES et du CO2 anthropique, produits par les activités humaines, depuis la « révolution industrielle » et l’invention de la machine à vapeur en 1769 ? Comme dit plus haut, les études et analyses géochimiques des roches ou de l’air emprisonné dans les glaces, montrent une bonne corrélation entre la concentration de l’atmosphère en CO2 et la température à la surface de la terre.

Une augmentation sensible de CO2 anthropique risque donc de contribuer à l’augmentation de la température moyenne de la phase interglaciaire au-delà des 4°C que la Terre a connue il y a environ 120 000 ans, et de prolonger cette période chaude !

Ce qu’il faut retenir donc, c’est qu’il est important d’atténuer ce phénomène de réchauffement climatique, mais surtout, se fixer comme première priorité une « solidarité planétaire » pour se préparer à faire face aux conséquences de ce réchauffement inéluctable, et qui très probablement, va s’amplifier durant les quelques décennies à venir, avant que la température retombe à nouveau pour se diriger vers une nouvelle période glaciaire !


Ali Gaaya est doublement diplômé en tant qu’ingénieur Géologue de l’Ecole de géologie appliquée de Nancy, et en tant que Géophysicien de l’Institut Français du Pétrole. Il a occupé la fonction de Directeur Exploration et Géosciences dans diverses Sociétés Nationales et Internationales.

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Publié par
Tunisie Numérique