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Par Amine Ben Gamra : Pour éradiquer le Covid-19, le FMI propose à la Tunisie de s’endetter encore plus

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Dans un communiqué rendu public le vendredi 10 avril, le Fonds Monétaire International (FMI) a annoncé avoir approuvé le décaissement d’un prêt de 745 millions de dollars en faveur de la Tunisie pour faire face à la pandémie de COVID-19. Ces ressources permettront de répondre aux besoins urgents de financement du budget et de la balance des paiements, causés par la pandémie.

Le FMI propose ainsi à la Tunisie de s’endetter encore plus.

L’objectif des institutions de Bretton Woods sont d’alourdir la dette des pays qu’ils prétendent aider. C’est la même formule qui a été utilisée par ces institutions internationales pour aider (supposée aide) des trois pays africains (la Guinée, le Liberia et la Sierra Leone) frappés par l’épidémie Ebola en 2014. Aujourd’hui, ces pays sont confrontés au coronavirus. Il leur manque toujours des budgets vitaux pour affronter les épidémies car ils sont sommés par leurs créanciers de réduire leur déficit budgétaire pour payer une dette insoutenable qui résulte en partie de l’intervention du FMI et de la Banque mondiale.

Bien plus qu’une affaire de chiffres, la dette tue. En Afrique, entre 2000 et 2017, les dettes envers les créanciers étrangers a même doublé (d’après les données de la Banque mondiale disponibles dans les rapports Global development finance et l’International debt statistics en ligne de la Banque mondiale) avec comme conséquence une augmentation de la part des recettes publiques dédiée à son paiement et une réduction significative des dépenses publiques dans le secteur de la santé. En 2018, ces pays consacraient, en moyenne, 7,8% de leur produit intérieur brut (PIB) au remboursement de la dette contre 1,8% pour la santé, soit près de quatre fois plus. (Daniel Munevar. EURODAD, COVID-19 and debt in the global south : Protecting the most vulnerable in times of crisis I, mars 2020).

Lorsque l’épidémie reculera et que les restrictions aux déplacements seront levées, nos établissements de crédits vont se rendre compte qu’ils ont pris trop de risques et qu’ils craignent des défauts de paiement, ils s’arrêteront de prêter de l’argent aux entreprises et aux ménages, bloquant ainsi le crédit indispensable à l’économie. Ce resserrement du crédit est appelé « crédit crunch ». Ainsi, cette crise se propagera à l’ensemble des marchés et entraînera un risque systémique majeur.

Face à cette situation, comment peut-on trouver des ressources  pour relancer notre économie et payer une dette insoutenable qui résulte en partie de l’intervention du FMI et de la Banque mondiale ?

Poser la question c’est déjà y répondre. Pour éradiquer le Covid-19, le FMI propose à notre cher pays de tuer son économie.

La Tunisie doit activer sa diplomatie économique avec les 20 plus grandes économies mondiales et les organisations internationales afin de réduire au maximum les effets financiers dévastateurs des dettes antérieures. L’abandon d’une grande partie de la dette antérieure devrait compter parmi les mesures urgentes à prendre face à la pandémie au lieu de proposer à la Tunisie de s’endetter encore plus.

Amine BEN GAMRA. Expert Comptable. Commissaire Aux Comptes. Membre de l’Ordre des Experts Comptable de Tunisie.

 

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Publié par
Tunisie Numérique