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Par Henda Haouala – Je reviendrai là-bas de Yassine Redissi : L’époque où on vivait tous au paradis

Par Henda Haouala – Je reviendrai là-bas de Yassine Redissi : L’époque où on vivait tous au paradis

Il est désormais l’homme qui a plusieurs cordes à son arc, l’enfant prodige des médias, journaliste talentueux, réalisateur, monteur, Yassine Redissi signe son premier long-métrage documentaire Je reviendrai là-bas. Sans aucune prétention, le réalisateur Yassine Redissi nous fait voyager dans le temps à travers les souvenirs d’un homme qui était fou amoureux de son pays, La Tunisie. C’est en retraçant la vie du chanteur juif tunisien Henri Tibi, qui n’a chanté que pour la Tunisie que le réalisateur nous livre un discours puissant, aucunement moralisateur, sur une époque pas comme les autres, sur notre pays, sur nous-mêmes. Sans aucun acharnement par rapport au récit, Yassine Redissi accompagné de son « pote » Slim Ben Ammar, décide de “faire et finir” son film.  Les deux jeunes hommes se régalent et prennent plaisir à creuser dans le passé de cet homme à la fois chanteur, photographe, grand sportif mais resté longtemps méconnu. Avec une caméra omniprésente, baladeuse mais très stable, Yassine Redissi se met devant l’objectif et commente avec sa voix off son aventure. Quant à Slim, mordu de musique, il poursuit un vieux rêve qui l’habite, qui le pousse à raviver une mémoire musicale perdue, à jouer avec sa guitare, à chanter comme s’il était la réincarnation, non de Henri Tibi, mais d’une époque révolue où le rêve était permis. 

Entre La Goulette et Besançon en passant par Paris, le film relève de la libre évocation. Henri Tibi, le soleil dans la tête, la Tunisie dans le cœur, a porté l’amour et le deuil de ce pays depuis 1967 (La Naksa) jusqu’au jour de sa mort en 2013 mais il n’a jamais cessé de rêver. Henri Tibi, sportif, “beaugosse” et solitaire qui a fini sa vie dans des conditions déplorables comme beaucoup de grands génies qui étaient en avance par rapport à leur temps, résume à lui seul une des grandes histoires de La Tunisie.  Je reviendrai là-bas, revient sur ces années-là et redessine un beau portrait de notre pays malheureusement estampé depuis la révolution : celui d’une Tunisie bienveillante, chaleureuse et accueillante. Derrière une première lecture nostalgique, émouvante qui nous rappelle à quel point nous sommes assoiffés aujourd’hui de toutes ces valeurs, le film porte un message politique puissant : l’acceptation de l’autre. L’autre qui est différent de nous mais qui nous complète.

Ce que j’aime dans ce film c’est la simplicité du propos, la fragilité du ton, la bonté de l’intention et la justesse du discours. Pour un premier long-métrage, Yassine Redissi a su éviter des erreurs qu’un réalisateur pouvait commettre en se mettant devant la caméra grâce au travail remarquable et ordonné du cadreur Ramzi Ben Fraj. Une des forces de ce film réside dans l’authenticité de son image que ce soit dans les cadrages très composés ou dans le travail minutieux fait sur les photographies qui donne une agréable impression de porter une vie qui se conjugue au présent. 

Avec Je reviendrai là-bas, Yassine Redissi vient au cinéma doucement mais sûrement. En réalisant ce documentaire, Yassine et Slim ne sont pas pris au sérieux, ils ont juste été sincères à faire ce film et cela se voit, se sent, se vit. Merci Yassine, grâce à toi, Henri Tibi est enfin revenu, merci pour ce voyage qui nous rappelle qu’il y avait une époque où on vivait tous au paradis, enfin ils vivaient…Pourquoi pas nous demain, après tout nous avons bien eu notre traversée du désert. 

Henda Haouala

 

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