Société

Par Henda Haouala : Ken ya Makenech et Harga 2 : Un remarquable discours politique

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Ken ya Makenech 2, et Harga2 diffusés sur la Watanya 1 ont pris fin.

Deux péripéties télévisuelles de pure folie, d’une profonde réflexion, d’une grande responsabilité mais surtout d’un honorable engagement humain. Abdelhamid Bouchnak et Lassaad Oueslati nous prouvent que le monde de la télé n’est pas que spectacle et déferlement de divertissements. Bien que différents, les deux réalisateurs proposent une lecture politique merveilleusement bien menée de la Tunisie d’aujourd’hui. Les personnages de Ken ya Makenech qui vivent au rythme d’une escapade entre imaginaire et réel, jouent sur des ambiguïtés narratives, ne manquent pas de manifester la complexité du discours et la subtilité du propos, un des défis de cette série : Comment construire un discours politique derrière une comédie satirique !

Lassaad Oueslati a réussi à transposer une certaine esthétique cinématographique sur le petit écran. Avec ses personnages, tous authentiques, il a sauvé quelque chose de la dignité de nombreux gens : ceux qui sont considérés comme perdants d’emblée.  Harga tient un discours politique humble et mesuré. Avec Abdelhamid Bouchnak et Lassaad Oueslati nous apprenons que la fiction télévisuelle n’est pas uniquement support de marchandisation d’histoires, ils nous apprennent que se mettre derrière la caméra c’est avant tout une responsabilité à dimension humaine et artistique. C’est prendre le risque d’exposer clairement sa propre vision du monde en prenant le chemin de l’imprévu. Ces deux réalisateurs nous livrent chacun une perception singulière de la Tunisie d’aujourd’hui avec un récit universel et altruiste.

Être réalisateur c’est savoir manier tout un système de codes et de règles socio-politiques pour pouvoir proposer autre chose par la narration et ne jamais être dans le « commentaire » (propre au journalisme). Sur cette toile audiovisuelle tunisienne saturée de marchandises et de fictions « instagramatisées », livrée aux manipulations névrotiques de leurs fabricants, la série Ken Ya makenech et le feuilleton Harga  ont pris le risque d’une réalité tunisienne digne du nom en la questionnant pour proposer un discours critique, rôle premier d’un vrai réalisateur …

Avec toute l’audace qu’elles portent, cet aplomb qu’elles manifestent, ces deux productions proposent un nouveau langage audiovisuel et font sortir la télévision tunisienne la Watanya d’un certain confort auquel elle s’est habituée, de sa flânerie qui ne prend pas fin.

Henda Haouala

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Publié par
Tunisie Numérique