Economie

Par Imed Derouiche – Ukraine : Le pétrole, la plaie et le piège !

Par Imed Derouiche – Ukraine : Le pétrole, la plaie et le piège !

Si les conséquences de la guerre Russo-Ukrainienne se ressentent de façon considérable  en Europe et dans le monde du fait que les 2 pays belligérants sont les premiers fournisseurs de gaz, de pétrole et de produits agricoles , les racines de cette guerre fratricide remontent aux années de l’éclatement de l’empire soviétique  pensé et décrétée dans les années 90 par un Occident arrogant et au sommet de ses forces économiques et politiques.

Les stratèges occidentaux qui voulaient exporter le modèle démocratique comme ce fut le cas en Irak, n’ont pas mesuré la particularité russophone avec ses dimensions nationaliste, souverainiste et expansionniste d’autant que les pays regorgent de ressources énergétiques et minières leur octroyant une bonne aisance financière et des perspectives de développement énormes.

Consciente de son potentiel énergétique et des revenus inhérents, la Russie a commencé par accepter son éclatement tout en balisant les contours de sa transformation d’un pays inféodé à l’Occident en une force industrielle, économique, diplomatique et militaire qui dicte ses lois, qui impose ses choix et qui décide de la cartographie mondiale comme ce fut le cas pour la Syrie .

Reculer pour mieux sauter, telle était la stratégie de Poutine qui a fortifié sa Russie grâce à la naïveté européenne totalement dépendante de son gaz et de son pétrole et aussi grâce à la manne d’argent amassé pour se reconstruire et surtout retrouver le lustre d’une Russie bafouée.  

« L’Occident doit revoir son attitude à l’égard de la Russie qui est différente de celle souhaitée par les européens. Il ne fallait pas réveiller le monstre endormi » a écrit Hubert Védrine, ancien ministre des affaires étrangères français qui pointe du doigt l’arrogance de l’Occident qui a voulu transformer la Russie en pays inféodé en renforçant l’Ukraine et en alimentant les divisions.

Sans spéculation géostratégique, la trame de ce conflit est dans l’ignorance de l’Occident de l’exception russophone avec son histoire et sa civilisation tsariste et l’issue de cette guerre fratricide ne bénéficiera à personne, ni aux belligérants, ni à l’Europe et encore moins au reste du monde.

Ce conflit Russo-Ukrainien qui s’enlise depuis 150 jours est au cœur  d’ enjeux économiques et énergétiques entre l’Europe  qui veut contrôler le circuit énergétique et le souverainisme de Poutine  qui veut se prévaloir du  droit  de son pays de disposer de ses énergies et de les vendre aux plus offrants comme le veulent les lois du marché libre imposées par l’occident lui-même.

A l’approche de l’hiver avec son froid énergivore en chauffage et ses besoins en gaz et pétrole pour ses industries et ses transports en commun, l’Europe est prise en sandwich avec un choix cornélien entre son soutien politique et idéologique à l’Ukraine et sa dépendance énergétique à la Russie de Poutine.

Et au-delà des conséquences géopolitiques de ce conflit ouvert, c’est l’éclatement de la communauté européenne qui agite tous les observateurs car chaque pays va jouer en solo pour défendre ses positions et préserver ses acquis. Ainsi l’Allemagne dont la prospérité économique et l’envolée industrielle sont dues au gaz russe via le pipeline North Stream, n’est pas prête à sacrifier son leadership et le confort de ses citoyens pour une guerre qui n’est pas la sienne et serait tentée de négocier des accords secrets avec le chevalier Poutine pour maintenir la cadence de fourniture de gaz.

La France, en fantomatique portevoix des libertés et des droits de l’homme, chercherait à s’approvisionner auprès des pays du Golf qui ont le vent en poupe et dont les jeunes dirigeants sont courtisés avec tous les fastes de la république.

L’Italie quant à elle s’est tournée vers l’Algérie et Teboune pour assurer son approvisionnement car son tissu industriel commence à se fissurer depuis l’éclatement du conflit et son alignement aveugle aux diktats de la communauté européenne est de plus en plus nocif d’autant que plusieurs parties réclament l’affranchissement de l’Italie du giron européen.

L’Europe du Nord réputée pour son froid glacial mais aussi son impartialité et la justesse de ses positions par rapport aux grandes affaires du monde, s’est tournée vars l’Azerbaïdjan, pour satisfaire ses grands besoins en énergies.   

Avec la récession rampante qui menace l’Europe, la tendance inflationniste, la pénurie de plusieurs produits et la flambée des prix des produits pétroliers   , la cohésion est mise à mal et la fracture européenne est inéluctable et la Russie se retrouve renforcée par sa posture de source d’approvisionnement en énergie et en produits agricoles. 

La fracture est consommée et elle révèle si besoin est, le choc de cultures entre les dépositaires du nouveau monde l’Europe et les USA d’un côté et les souverainistes russes d’un autre mais aussi un choc générationnel entre un Biden avec ses 80 ans et les nouveaux quadras du Golfe qui rêvent d’indépendance économique et de développement.

L’heure n’est plus aux calculs stratégiques mais aux négociations car il est urgent, pour le bien du monde entier, qu’une paix de braves s’installe entre la Russie et l’Ukraine pour panser les plaies d’une guerre hégémonique plus profonde qui divise le monde.  Avec d’un côté les USA qui manipulent les pions, l’Europe qui se divise, la Russie qui se renforce et qui fait des émules, l’Ukraine qui s’est faite piégée, la Turquie qui monnaye sa position stratégique, les Pays du Golfe qui s’affranchissent grâce à leurs quadras, l’Iran qui se rapproche de Poutine et l’Afrique qui se cherche, la cartographie se redessine et la Tunisie, ultra dépendante tant en ressources énergétiques qu’agricoles est prise en tenailles avec des perspectives d’une récession forte.

Il nous appartient ainsi d’être inventif pour parer à de tels risques de récession avec ses répercussions inflationnistes en balisant les contours d’une bonne gouvernance de nos besoins en céréales importés en majeure partie de la zone russophone et de nos habitudes de consommation énergétiques. En plus du développement des énergies renouvelables photovoltaïque et hydrogène, il est urgent de décréter un moratoire de 5 ans sur les prix de pétrole et de gaz en tant qu’élément essentiel pour l’agriculture, le transport et les industries manufacturières.

Imed Derouiche

Expert International

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