Enseignement

Par Ridha Zahrouni: Le naufrage de l’école tunisienne et ” La folie de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent”*

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Cherchons à utiliser les mots appropriés pour un dossier relativement simple qu’on a toujours tenu à le rendre compliqué. La fonction d’éducation de notre système éducatif qui devrait se réaliser en partenariat avec les parents en complémentarité avec la famille et la société et en harmonie avec le modèle de vie des Tunisiens doit s’appuyer sur la vocation culture de l’école et tire parti de ses fonctions d’enseignement et d’habilitation.

L’objectif est d’instruire nos enfants et nos jeunes à devenir les Femmes et les Hommes de demain, en leur inculquant l’amour de la patrie et l’allégeance à la nation, les valeurs universelles, les bonnes mœurs et les comportements sains et en les instruisant sur les pratiques citoyennes, l’esprit d’initiative et sur les sens des droits et des devoirs. Des Femmes et des Hommes responsables vis-à-vis d’eux même, de leurs familles, de la société et de la partie.

Or l’éducation d’aujourd’hui n’est plus celle de nos parents et nos grands parents quand elle se limitait au respect des ainés, notamment nos parents et nos enseignants. Ce respect fait presque partie des acquis avec lesquels on nait. Les sociétés actuelles sont de plus en plus ouvertes aux différentes sortes de comportements, de tentations, de décalages au niveau de la perception et de la portée des sens des valeurs. On parle désormais de différentes spécialités en matière d’éducation, telles l’éducation à la citoyenneté, l’éducation physique et sportive, l’éducation artistique et culturelle, l’éducation sexuelle, l’éducation à l’emploi des technologies et des réseaux sociaux, l’éducation à la santé, l’éducation routière, l’éducation émotionnelle, etc.

Quant à la fonction enseignement, elle est nécessaire pour l’exécution de toutes les fonctions de l’école en administrant un enseignement, une culture, des connaissances, des compétences et des méthodologies. L’objectif est de développer les capacités des apprenants et leurs aptitudes à s’instruire et à s’intégrer dans la société du savoir, et en même temps, leur donner les qualifications nécessaires pour poursuivre un enseignement supérieur ou une formation professionnelle qui tient compte de leurs prédispositions personnelles et des besoins nationaux en compétences dans toutes les spécialités et dans tous les domaines.

Et comme les sociétés changent également en fonction des évolutions scientifiques, technologiques, économiques et même comportementales, l’enseignement scolaire doit s’appuyer sur les projections et les perspectives de développement dans tous les domaines. Plusieurs spécialités vont certainement disparaitre dans les années à venir et d’autres vont venir les replacer, telles que l’intelligence artificielle, l’économie numérique, l’économie culturelle, les énergies renouvelables, le robotisme, etc. Et on est en droit d’affirmer que dans un avenir proche, on doit compter de plus en plus sur l’intelligence humaine.

Or, et comme il faudrait bien le comprendre, le cycle scolaire, avec ses phases préscolaire, primaire, préparatoire et secondaire préparent nos enfants pour devenir des étudiants ou pour suivre des cycles de formation professionnelle en même temps qu’il les prépare pour devenir les bons citoyens de demain.

Les matières à administrer, les spécialités nécessaires et les niveaux de connaissances à acquérir aussi bien pour la fonction éducation que pour la fonction enseignement ainsi que pour les autres fonctions de l’école à savoir l’habilitation et la culture, dépassent de loin, de très loin même, les compétences des enseignants. Elles relèvent du domaine des vrais spécialistes et des stratèges dans plusieurs domaines et compétences, des concepteurs de systèmes d’information, des organisateurs, et des conducteurs de grands projets de société.

Par la suite, une fois les niveaux et les matières arrêtés, il faudrait les transcrire en temps scolaire et en crédit horaire par phase d’enseignement, par années scolaire et par calendrier scolaire. Et la, nos enseignants en tant que tels, n’ont, également, aucune compétence pour réaliser ce travail correctement, à moins qu’ils aient été formés au préalable pour devenir des spécialistes du domaine. Car il le faudrait bien le comprendre, la répartition de ces matières et leur progression dans le temps, doivent tenir compte des exigences pédagogiques à respecter, des besoins de nos enfants en temps social, des aptitudes des élèves nécessaires pour acquérir les savoirs, le savoir-faire et le savoir être tout en développant chez eux l’esprit d’initiative et d’innovation ainsi que toutes les formes d’intelligence intellectuelle, sensitive, opérationnelle et émotionnelle.

Etant donné que l’école est un projet national, culturel et social et de surcroît stratégique et politique par excellence et pour que chaque acteur assume pleinement sa responsabilité dans la gestion du secteur de l’éducation, les pays développés ont prévu par leur législation en la matière des instances autonomes dotés de vrais compétences pour garantir l’indépendance des décisions et de choix de tout enjeux et influence. C’est l’équivalent :

– d’un Conseil national de l’enseignement, de l’éducation et de la formation professionnelle dont la mission serait de garantir la participation de toutes les parties et les spécialités concernées dans la mise en œuvre des politiques nationales en matière d’éducation, des stratégies qui en découlent et lors de l’élaboration des réformes quand celles-ci s’imposent.

Ce conseil, une fois mis en place chez nous, devrait engager et piloter, avec professionnalisme, le projet de la réforme de notre école en toute urgence, en mettant en ligne de mire, seuls les intérêts de l’élève et de la nation.

– d’un Conseil national des programmes dont la mission serait d’assurer la transparence, la neutralité et l’efficience au niveau des choix et des orientations des programmes d’enseignement et des systèmes d’évaluation.

– d’un Observatoire national de l’enseignement et de l’éducation, dont la mission serait de maintenir la qualité de notre système éducatif à tous les niveaux et sur tous les plans et avec toutes ses composantes.

Mais, et il y toujours un mais, à défaut d’une volonté politique réelle pour sauver notre école, on continue à voir les acteurs traditionnels, à savoir la tutelle et les syndicats, monopoliser la gestion du dossier. Ces acteurs continuent à s’entêter à diviser le cheveu en quatre et nous démontrer que deux et deux ne font pas quatre. Est-ce que vous croyez qu’avec les mêmes artisans du désastre et les mêmes méthodes de travail on serait en mesure de sortir notre école de l’abime dans lequel ils l’ont brusquée ?

Ridha Zahrouni. Président de l’Association Tunisienne des Parents et des Elèves.

* La citation est attribuée à Albert Einstein.

 

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Publié par
Tunisie Numérique