“Indignez-vous!“, avait tonné Stephen Hessel dans son petit essai – mais grand par la portée – qui a fait le tour de la planète. Et bien il faut croire que les Tunisiens, avec toutes les tuiles qui leur tombent sur la tête au quotidien, se sont émoussés et ont perdu jusqu’à la capacité de s’indigner. Autrement ce restaurant ne se serait pas permis de commettre ça…
Cette photo a été prise ce 8 février dans un des quartiers d’affaires de la capitale, Tunis, à Montplaisir, pour être tout à fait précis. Peut-être qu’à première vue vous ne remarquez pas ce qui cloche, tellement vous en avez vu d’autres, tellement vous en avez soupé dans cette Tunisie qui s’ingénie chaque jour à dépasser l’entendement. Nous n’avons pas pu passer à côté de cette chose flanquée là, au milieu du passage, pour appâter les clients…
Bon, ce n’est pas appétissant du tout, mais ce restaurant n’a pas jugé utile d’en faire des tonnes pour inciter les passants à franchir le seuil de sa porte pour y déguster les mets du jour. Ces annonceurs pas comme les autres ont joué petit bras en se disant qu’après tout ce qui intéresse les clients c’est ce qu’ils vont se mettre dans le ventre. Ils se sont dit que personne ne remarquera ce panneau en bois qui ne tient que grâce à deux fils de fer…
Et bien nous on a remarqué ! Et oui, on l’assume, au risque d’être accusés de chercher la petite bête, même dans de minuscules trous. On n’épiloguera pas trop sur ces détritus qui jonchent le sol, même si ce n’est pas très ragoûtant, mais faire ça dans un des quartiers d’affaires les plus en vue de la capitale, il fallait oser. Le problème dans ce pays c’est qu’on ose de plus en plus, sans que personne ne s’en émeuve, ou très peu, si peu.
Pas besoin de s’étaler sur le fait que sur ces lieux transitent quelques gros morceaux de la finance locale et même des investisseurs étrangers. Vous imaginez le tableau, vous imaginez la carte postale estampillée Tunis. Le pays a connu mieux, il n’y a pas si longtemps. Les choses sont allées très vite, trop vite depuis 2011. La dégringolade a été fulgurante, vertigineuse. Ce cliché est la dernière illustration du nivellement par le bas… Au suivant.
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