Une nouvelle controverse entache la présidence de Donald Trump, dans un second mandat. Lors d’un rassemblement jeudi à Des Moines, dans l’État de l’Iowa, le président américain a utilisé un terme lourdement chargé d’histoire antisémite pour qualifier des prêteurs, suscitant une vague de réactions indignées aux États-Unis.
En évoquant les avantages fiscaux liés à l’abolition des droits de succession dans le cadre du projet de loi budgétaire récemment promulgué, Trump a déclaré à ses partisans :
« Pas de taxe successorale, pas besoin de recourir à un banquier… Sauf peut-être à un banquier très malin. Ou parfois à Shylock, ou à d’autres prêteurs véreux, usuriers, criminels. »
Une référence à un personnage stéréotypé
Le terme « Shylock » renvoie à un personnage juif fictif de la pièce Le Marchand de Venise de Shakespeare, dépeint comme un usurier sans scrupules réclamant « une livre de chair » à un débiteur insolvable. Depuis des siècles, Shylock est un symbole de l’antisémitisme culturel européen, associant les juifs à l’avidité et à l’exploitation.
L’utilisation de ce terme par un président en exercice a immédiatement provoqué un tollé. Le représentant démocrate Daniel Goldman, élu de New York et membre de la communauté juive, a qualifié les propos de Trump de
« manifestement antisémites et profondément offensants », ajoutant que « Trump sait parfaitement ce qu’il dit et ce qu’il sous-entend. »
Une défense jugée peu crédible
Interrogé à son retour à Washington, Donald Trump a rejeté les accusations, affirmant ne pas avoir conscience de la charge antisémite du mot :
« Je ne savais pas que c’était offensant. Pour moi, c’est juste un mot qui désigne quelqu’un qui prête à un taux élevé. Je ne l’ai jamais entendu autrement. »
Une défense rapidement contestée, notamment par la Ligue anti-diffamation (ADL) qui a publié un communiqué condamnant l’incident :
« Utiliser le mot ‘Shylock’ ravive une image antisémite vieille de plusieurs siècles, dangereuse et offensante. Il est profondément inquiétant qu’un président en exercice emploie un tel langage. »
Un précédent chez Biden, mais un traitement différent
L’affaire rappelle une polémique remontant à 2014, lorsque Joe Biden, alors vice-président, avait lui aussi utilisé ce mot dans une allusion aux pratiques de certains prêteurs. Biden s’était publiquement excusé, reconnaissant un « mauvais choix de mots » et exprimant son regret.
À l’époque, Abraham Foxman, directeur de l’ADL, avait rappelé que le terme « Shylock » était historiquement chargé, et que son usage, même involontaire, renforçait des stéréotypes nuisibles à l’égard des juifs.
Une tension croissante entre l’exécutif et les universités
Ironie du sort, Donald Trump avait promis, avant sa réélection, de lutter fermement contre l’antisémitisme. Son administration a multiplié les critiques à l’encontre des universités américaines, notamment celles où des manifestations étudiantes ont dénoncé les opérations militaires israéliennes à Gaza. Plusieurs établissements ont été accusés par la Maison-Blanche de tolérer un climat antijuif, voire de « soutenir indirectement le Hamas ».
Dans ce contexte, les propos de Trump suscitent d’autant plus de surprise et d’indignation, entachant la crédibilité de sa posture officielle contre l’antisémitisme.
Ainsi, cette nouvelle controverse met en lumière la difficulté, même pour un chef d’État, de naviguer dans un environnement politique et social de plus en plus sensible aux résonances historiques des mots.
Pour de nombreux observateurs, l’usage d’un terme aussi stéréotypé par un président en fonction est plus qu’un faux pas : c’est un signal préoccupant, qui nourrit la banalisation des discours porteurs de préjugés dans l’espace public américain.
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