Economie

Pourquoi ne pas mettre la question de la pénurie d’eau à l’ordre du jour du Conseil national de Sécurité ?

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La Tunisie vit depuis plusieurs années une crise socio-économique majeure qui a été dangereusement aggravée par les répercussions de la pandémie du Covid-19 sévissant depuis mars 2020.

A la situation économique difficile s’ajoute le problème sévère de la raréfaction de plus en plus remarquable des ressources hydriques, une richesse très mal gérée dont 80% est orientée à l’agriculture irriguée sur uniquement 4% des superficies exploitées en Tunisie sans rendement économique proportionnel et sans respect des principes de durabilité et en dépit des grandes menaces liées aux changements climatiques.

La mauvaise gestion de la distribution de l’eau engendre des risques variés planant sur la survie des populations notamment les plus vulnérables et la souveraineté même du pays.

D’après le rapport du groupe de la Banque mondiale, intitulé « Risque climatique, profil pays : Tunisie – 2021 », le changement climatique devrait accroitre le risque et l’intensité de la pénurie d’eau et celui de la sécheresse dans toute la Tunisie. L’instance financière internationale recommande pour faire face à ces risques et à d’autres, d’intégrer la résilience climatique dans la planification du développement et l’élaboration des politiques.

Sous cet angle, plusieurs observateurs assurent que selon ce profil climatique, la Tunisie gagnerait à renforcer la capacité technique pour intégrer un nouveau modèle d’agriculture permettant de faire face aux aléas du climat, à rationaliser la consommation de l’eau, à lutter contre le fléau des forages illicites (18000), à préserver les moyens de survie de la population rurales de plus en plus exposée à la pénurie d’eau et à restructurer le système de destruction des eaux outre le lancement de projets de construction de station de dessalement d’eau de mer.

Néanmoins, la volonté et les fonds nécessaires à déployer tels efforts font cruellement défaut dans l’état actuel des choses.

Le groupe de la BM recommande à la Tunisie de développer des systèmes d’alerte précoce pour les phénomènes hydrométéorologiques dangereux et la gestion des risques climatiques, spécifiquement pour l’élévation du niveau de la mer, les ressources en eau et les impacts sur la santé.

Tous ces éléments mènent à poser une question cruciale : pourquoi ne pas mettre la question de la pénurie d’eau à l’ordre du jour du conseil national de sécurité ?

Les dernières données du ministère de l’agricultures actualisées aujourd’hui vendredi 12 novembre 2021 montre que pour les 36 barrages du pays, le taux de remplissage est d’à peine 31% avec des apports de 0,7097 millions de m3, des lâchers de 1,946 millions de m3 et un stock de 790,792 millions de m3 sachant que la capacité annuelle de ces barrages est de 2337,484 millions de m3.

A cet égard, le délabrement accru des infrastructures vitaux du pays notamment les structures hydriques et en particulier les barrages, faute de maintenance et d’investissement durant les dix dernières années, ne peut pas être sans conséquences.

Au fait, l’Observatoire Nationale de l’Agriculture (ONAGRI) relevant du ministère de l’Agriculture, des ressources hydriques et de la pèche maritime a publié le 21 août dernier, un rapport inquiétant relatif à la situation des grands barrages et les risques qui menacent leur durabilité.

L’envasement des barrages est l’un des problèmes préoccupant dans la mobilisation des ressources en eaux en Tunisie, à la date du 12 août 2021 l’envasement des grands barrages (36) est estimé à 675 Millions m3 sur une capacité initiale de 2988 Millions m3, soit un taux d’envasement moyen de 23%, indique le rapport.

Selon les données de l’ONAGRI, trois barrages présentent un taux d’envasement supérieur à 50%, il s’agit de Mellègue, Siliana et Rmil, pourtant, un seul de ces trois barrages a atteint une durée de vie de 50 ans, les deux autres ont respectivement des durées de vie de 34 ans et de 19 ans. Ces barrages sont situés dans des régions qui sont pour la plupart pauvres en ressources en eaux.

En considérant les mêmes conditions climatiques actuelles et sans aucune intervention visant la réduction de la sédimentation, les barrages de Mellègue et de R’mil seront totalement envasés en 2035 assure le rapport de l’observatoire…

Le Forum Tunisien des Economiques et Sociales (FTDES) a publié également et sous ce même angle, une étude intitulée « Les changements climatiques en Tunisie : Réalités et pistes d’adaptation pour le secteur des services publics ».

Avec une baisse des ressources en eaux conventionnelles estimée à environ 28% à l’horizon 2030 et une diminution des eaux de surface de 5% environ, les changements climatiques sont en train de frapper de plein fouet la sécurité alimentaire en réduisant considérablement la quantité d’eau à disposition des agriculteurs pour assurer une bonne conduite à leurs cultures et un approvisionnement stable des marchés en fruits et légumes, assure le FTDES.

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek