Tunisie

Quand lois et valeurs sont contournées, détournées, retournées

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L’état de la société tunisienne, c’est la Loi sur l’interdiction du tabac dans les lieux publics qui vous le dit le mieux. Voilà une affaire qu’on avait annoncée en grande pompe comme le signe patent que la Tunisie participe au concert des nations dans le combat contre le tabagisme. En effet on ne voit presque plus de cigarette au cinéma, alors que la règle, surtout dans les films américains, c’était la cigarette vissée au bec, une marque qu’on ne nommera pas. Autre temps, autres moeurs. Enfin pas tout à fait puisqu’en Tunisie la rébellion installe ses quartiers…

Faites un tour dans n’importe quel café ou salon de thé et vous verrez le sort des non-fumeurs, s’il en existe, cantonnés dans un petit coin, presque craintifs comme une espèce en voie d’extinction qu’on voudrait protéger. Alors que c’est le contraire qui était censé se produire : les fumeurs isolés dans un tout petit espace, clos de préférence pour ne pas empoissonner la vie des non fumeurs. Mais voilà : il s’est produit un renversement complet de la norme, par des citoyens qui fourmillent d’idées pour contourner, détourner, ruser, transgresser…

Pourtant ce n’est pas faute d’essayer, de marteler de la part des autorités tunisiennes. La première salve d’interdictions frappe en 1998, avec la Loi n° 17 ; deuxième offensive le 3 mars 2009 avec une circulaire ; puis rebelote avec le décret du 14 septembre 2009. Rien n’y a fait. Le tabagisme public a survécu à tout cet arsenal juridique et se porte comme un charme en 2021…

Ce n’est pas la seule bonne résolution enterrée dans le cimetière des bonnes intentions. L’automobiliste qui s’arrête au feu rouge et qui est souvent assailli de klaxons pour le pousser à griller la priorité est aussi une spécificité tunisienne. Le type ou la bonne femme qui met dans le container ses déchets soigneusement emballés est regardé comme un drôle d’animal. Le piéton qui traverse sur un passage clouté en espérant que les bagnoles auront l’amabilité de s’arrêter est aussi étrange aux yeux des autres qu’un Marsien. Et ainsi de suite. La Tunisie n’a pas fini de nous surprendre…

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Publié par
Souleymane Loum