“L’homme fort”, c’est ainsi que le qualifie “Time” ; on pourrait ajouter “l’homme providentiel”. Le controversé président du Salvador, Nayib Bukele, né en 1981, se paye même le luxe de trôner à la Une du prestigieux magazine américain. “Il est sans conteste devenu le chef d’État le plus connu du monde”, un statut très enviable qui vaut bien quelques honneurs et lauriers. “Comment Nayib Bukele est devenu le président le plus autoritaire et le plus populaire au monde”, c’est le menu servi par le numéro de la rentrée du “Time” pour ce 16 septembre. Tout un programme !
On parle peu du plus petit pays d’Amérique latine, et pour cause il ne fait plus les gros titres à cause des effusions de sang provoquées par une guerre féroce entre les gangs. Le Salvador est devenu un pays tranquille, paisible grâce à la main de fer de Bukele, qui a pris les rênes le 1er juin 2019. Depuis c’est “tolérance zéro” pour les bandes armées. Le Salvador était le paradis des tueurs à gages et autres criminels endurcis, c’est terminé.
L’un des pays les violents du monde a quitté le club du Mexique, du Brésil ou encore de l’Afrique du Sud, maintenant il est cité en exemple au Honduras, au Costa Rica, en Équateur, au Pérou, etc. On ne compte plus les admirateurs et les laudateurs du style Bukele. “Sous sa direction, le pays le plus dangereux au monde est devenu plus sûr que le Canada, selon les chiffres du gouvernement salvadorien”, rapporte “Courrier international” ce mardi 3 septembre.
D’après les données officielles le taux d’homicide a baissé drastiquement, jusqu’à 2,4 pour 100 000 habitants, ce qui ferait du Salvador le pays le moins criminogène d’Amérique latine. Pour ça et d’autres choses le chef de l’Etat a été réélu en février dernier, avec 85% des voix, excusez du peu. Mais le “paradis” a un prix, le prix fort…
D’après les ONG de défense des droits humains, rapporte le magazine américain, “sous Bukele, l’état d’urgence est devenu permanent au mépris des libertés fondamentales”. La preuve : le pays est placé en état d’urgence depuis mars 2022. “Dans ce régime sécuritaire, vous pouvez être interpellé sans mandat d’arrêt, dès l’âge de 12 ans, et être jugé dans des procès collectifs qui peuvent regrouper des centaines de personnes”..
C’est simple : Un Salvadorien sur cinquante-cinq serait présentement derrière les barreaux. “Les institutions du Salvador ont été totalement noyautées et mises au pas par le président”, dénonce Celia Medrano, une militante des droits humains. Toute cette agitation n’empêche pas le jeune président – 43 ans – de dormir, bien au contraire il s’en félicite dans Time :
“Nous avons mis sous les verrous 85% des membres de gangs, en nous attaquant à la structure pyramidale de leur organisation. Des petites mains aux chefs de gangs, tout le monde y est passé et la pyramide s’est effondrée (…). Il s’agit de criminels qui ont, dans certains cas, avoué avoir tué dix, quinze voire vingt personnes. Quand on regarde les prisons en Amérique latine […], l’immense majorité est en proie au chaos le plus total. Ce n’est pas le cas au Salvador”, martèle le chef de l’Etat.
Et quand on l’interroge sur son positionnement politique il rétorque : “Une chose est sûre, je ne suis ni de gauche, ni de droite […]. Ce sont des définitions désuètes. Cela n’a plus aucun sens de définir les choses en termes de gauche et de droite”. Insaisissable, inclassable, effrayant mais diablement efficace. En tout cas au vu du plébiscite à la dernière présidentielle les Salvadoriens semblent avoir volontiers échangé leur liberté et leurs droits contre la sécurité, en tout cas officiellement.
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