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Sénégal : le FMI confirme la croissance de 8,3%, la plus forte en Afrique sauf que…

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Le FMI a repassé à la loupe les indicateurs macroéconomiques de l’Afrique subsaharienne et confirme ce qu’il avait dit en octobre 2022 et qu’avait annoncé la BAD au mois de mai de la même année : Le Sénégal avec son taux de croissance de 8,3% prévu pour 2023 sera le champion de la région. “Parmi les pays d’Afrique de l’Ouest, le Sénégal devrait enregistrer la plus forte croissance avec 8,3% en 2023 et 10,6% en 2024. Le Nigeria, la plus grande économie d’Afrique, affichera des taux de croissance de 3,2% en 2023 et 3% en 2024. L’Afrique du Sud, quant à elle, devrait connaître une croissance de 0,1% en 2023 et de 1,8% en 2024” indique le document.

Le Sénégal bénéficie d’une stabilité politique, d’investissements importants dans les infrastructures, de découvertes de ressources naturelles comme le gaz et le pétrole, de la diversification économique et d’une coopération internationale solide. Ces éléments contribuent à la croissance économique du pays et le positionnent en tête des économies africaines” dit la même source…

On prend les ingrédients explosifs de 2011 et on recommence

C’est justement cette stabilité politique dont tout dépend qui est fortement menacée. En effet le pays de la “Téranga” (hospitalité), réputé pour la solidité de ses institutions, ses avancées démocratiques et ses alternances pacifiques, est traversé par une agitation qu’il n’a pas connue depuis 2011. Le motif est le même que sous Abdoulaye Wade : la Constitution. Ou plus précisément l’interprétation de la Constitution…

L’actuel président, Macky Sall, avait tenu dès son arrivée au pouvoir, en 2012, une promesse électorale ferme en limitant les mandats à deux et en les raccourcissant – 5 ans au lieu de 7. Le chef de l’Etat l’avait fait, arguait-il, pour éviter au pays la fin de règne violente (il y a même eu des morts dans la répression des manifestations populaires) de Wade. Ce dernier avait tenté de tripatouiller le texte fondamental pour remporter un troisième mandat afin, disait-on, d’installer une dynastie en léguant le pouvoir à son fils.

Macky Sall n’a peut-être pas le même dessein mais beaucoup lui prêtent l’ambition de briguer un troisième mandat, sur la base du principe de non-rétroactivité qui fait que son premier mandat de 7 ans n’est pas comptabilisé. Sauf qu’il a dit à plusieurs reprises, publiquement, qu’il s’en tiendra à deux mandats et s’en ira tranquillement après. Une parole publique qui l’engage et que lui rappellent ses opposants, en premier l’irréductible et très populaire Ousmane Sonko, 48 ans, maire de la deuxième ville du pays.

Le président pour le moment garde le silence sur ses intentions aux élections de 2024, mais le fait qu’il ait dit dernièrement que constitutionnellement rien ne l’empêche de briguer un second mandat est suffisamment troublant pour que ses adversaires montent au front et agitent le pays. L’autre fait troublant c’est la pluie d’arrestations dans les rangs de l’opposition, pour des motifs divers et souvent factices. Beaucoup interprètent cette main de fer comme une opération d’élimination de l’opposition pour se mettre en pole position au scrutin de 2024.

Le “M23” avait bloqué Wade, le “F24” freinera Sall

La société civile, celle-là même qui était aux côtés de Macky Sall en 2011 et avait fracassé les desseins monarchiques de Wade, se mobilise de nouveau pour bloquer un éventuel troisième mandat présidentiel. La plate-forme dite «de lutte des forces vives de la Nation» ou «F24» est née le 16 avril. Elle compte plus d’une centaine de membres : des partis de l’opposition, des organisations de la société civile, des syndicats et des personnalités indépendantes…

Le “M23” avait freiné net Wade, le “F24” entend faire la même chose avec son successeur. Dans un pays très politisé où les jeunes votent massivement la mobilisation populaire reste la meilleure arme des formations politiques. Les électeurs ont déjà éjecté deux présidents, donc ils connaissent le chemin de l’alternance démocratique. Ce qui est certain c’est que si tel est le dessein du chef de l’Etat – un troisième mandat – il ne passera pas.

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