Il y a à peine quelques mois il était impensable que l’Allemagne enterre des dizaines d’années de pacifisme acharné et qu’elle dépense sans compter pour s’armer. Philosophiquement et moralement les Allemands ne voulaient pas entendre parler d’une armée forte, pas après les souffrances que le nazisme d’Adolph Hitler et son armée surpuissante – la Wehrmacht – ont infligées au monde. Et bien cette page est définitivement tournée après la terrifiante incursion russe en Ukraine. Le paquet de 100 milliards d’euros a été validé hier dimanche 29 mai. Toute une révolution…
Le chancelier allemand, Olaf Scholz l’avait annoncé avec fracas il y trois mois, devant le Parlement allemand – la Bundeswehr -, l’affaire prend forme. Le gouvernement veut bien mégoter quand il s’agit de payer pour armer l’Ukraine face à la Russie, mais on ne transige pas quand il s’agit d’assurer la sécurité des Allemands. Et pour s’assurer que ce tournant résistera aux aléas des changements de majorité parlementaire, le pactole sera gravé dans la Constitution et ne sera pas compté dans le déficit budgétaire. Quand on vous disait que Berlin va dépenser sans compter…
Certes cette affaire n’est pas allée de soi, il a fallu se faire violence et bousculer les consciences ; jusqu’à hier les débats étaient houleux, mais in fine la voie de la raison ou plutôt la peur du grand méchant loup – la Russie – l’a emporté, face au bouleversement des équilibres géopolitiques dans le monde. Je parle également de l’agitation du côté de la Corée du Nord et de la Chine…
«L’Allemagne a besoin d’avions qui volent, de bateaux qui prennent la mer et de soldats qui sont équipés convenablement», avait déclaré Scholz devant les parlementaires. Fini le sous-équipement de l’armée de la première économie européenne. Ce sont les Américains, qui assurent la sécurité des Européens à travers l’OTAN, qui seront contents. En effet l’ex-président américain, Donald Trump, qui en avait marre de payer pour la défense des autres, harcelait les Européens pour que chaque pays monte le niveau de ses dépenses militaires à 2% de son PIB. Berlin y va tout droit, en attendant les autres…
Par ailleurs il y a une autre donne aux enjeux colossaux : Puisque la défense européenne théorisée par Paris est renvoyée aux calendes grecques et puisque Français et Allemands n’ont pas mutualisé leurs capacités techniques pour fabriquer des avions et des navires européens, Berlin les achètera aux USA, comme l’avait laissé entendre Scholz. C’est aussi ça la situation cocasse de cette Union européenne (UE) où les partenaires se tirent dans les pattes pour des intérêts nationaux. Le président français, Emmanuel Macron, achèvera son mandat en juin prochain en laissant un énorme chantier dont on n’est pas près de voir le bout…
“Diviser pour mieux régner”, a-t-on coutume de dire. Tant que l’UE sera frappée par ce mal de la discorde gravé dans son ADN le leadership américain prospérera…
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