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Très mauvais pour Saied : Les Européens songent à adopter la ligne dure américaine

Très mauvais pour Saied : Les Européens songent à adopter la ligne dure américaine

C’est la deuxième visite de parlementaires européens en Tunisie en moins de deux mois. C’est la preuve, s’il en fallait, que l’Union européenne (UE) s’intéresse beaucoup à ce qui se passe chez la jeune démocratie et qu’elle tient absolument à ce que l’expérience tunisienne brille dans une région où les reculs démocratiques font légion. Les communiqués qui ont suivi le premier séjour des députés européens – du 11 au 13 avril 2022 ils avaient eu le temps de bien sonder le terrain – ont été assez magnanimes. Et in fine il avait été décidé de temporiser et de donner de la latitude au chef de l’Etat, Kais Saied, au moins jusqu’à décembre 2022, date des élections législatives. Mais entre temps il y a eu la frappe sur l’ISIE, une affaire qui a fortement irrité le partenaire européen au point de déclencher des commentaires peu amènes à l’endroit de Saied. La deuxième visite des députés européens indique clairement que le président de la République n’aura pas un chèque en blanc.

Il y a surtout une nouvelle idée dans l’air : Un “principe de redevabilité” qui pour le coup est une vraie source d’inquiétude pour l’exécutif tunisien. Après moult tacles très musclés, l’administration américaine en est arrivée à la conclusion que la Tunisie est trop sortie des clous fixés par la transition démocratique, par conséquent l’aide accordée à Tunis a été rognée de moitié. Et la dernière sortie de la patronne de l’USAID a enfoncé le clou. Il faut souhaiter que Tunis fera en sorte de ne pas énerver le partenaire européen au point de l’inciter à suivre “l’exemple” américain…

Voici le texte intégral signé par la délégation de la Sous-Commission “Droits de l’Homme” du Parlement européen et intitulé “Tunisie : les eurodéputés soutiennent un retour à l’ordre constitutionnel”

“Les députés européens soutiennent un retour à l’ordre constitutionnel, négocié et consulté avec tous les acteurs de la société tunisienne.

Une délégation de la sous-commission “droits de l’homme” du Parlement s’est rendue à Tunis du 22 au 24 mai 2022 pour lui permettre de comprendre les enjeux démocratiques qui se jouent actuellement dans le pays, dans un contexte à la fois marqué par une crise politique et économique majeure et en amont du référendum du 25 juillet prochain portant sur une réforme constitutionnelle.

La visite, qui s’est déroulée dans le cadre des relations privilégiées entre l’Union européenne et la Tunisie, a mis plus particulièrement l’accent sur la communauté de valeurs partagées par les deux parties et reconnues comme éléments centraux de ce partenariat.

Lors de cette visite, les eurodéputés ont eu l’occasion de rencontrer un grand nombre d’acteurs institutionnels et de représentants de la société civile tunisienne et en particulier des organisations de défense des droits humains, y compris des droits des femmes, et des associations actives dans le domaine des droits économiques et sociaux, mais aussi des magistrats, des académiques, des experts notamment sur les questions de migration et de lutte contre la corruption; ainsi que des représentants de partis politiques et des organisations de jeunesse.

Des rencontres ont également eu lieu avec Nourredine Taboubi, Secrétaire Général de l’UGTT, Samir Majoul, Président de l’UTICA, Mohamed Yassine Jelassi, Président du Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT), Fathi Jarray, Président de l’Instance Indépendante pour la Prévention de la Torture, ainsi que Farouk Bouasker, nouveau Président de l’Instance Supérieure Indépendante pour les Elections (ISIE) et Sadok Belaid, Président Coordinateur de la Commission Nationale Consultative pour une Nouvelle République créée par le décret-loi du 19 mai dernier.

Les discussions ont porté principalement sur la problématique de l’État de droit et en particulier, les dissolutions successives de l’Assemblée des Représentants et du Conseil Supérieure de la Magistrature et des dangers liées à la concentration des pouvoirs; la question de bonne gouvernance, y compris le dernier décret-loi sur l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE), la dissolution de l’Instance Nationale de Lutte contre la Corruption (INLUCC) et le rôle des partenaires sociaux et de la société civile dans un processus de dialogue national; ainsi que du respect des droits et des libertés et de la protection des acquis constitutionnels et des Instances indépendantes en la matière.

Pendant cette visite, de nombreuses inquiétudes ont été exprimées d’une part quant au processus en cours concentrant les pouvoirs dans les mains d’une seule personne et ne garantissant aucun recours possible et d’autre part quant aux atteintes à l’indépendance des institutions. « La Tunisie n’est pas confrontée à une situation de violations, mais la dérive autoritaire est une véritable menace pour les acquis constitutionnels du pays ». Si les acteurs de la société tunisienne restent convaincus qu’un dialogue national inclusif est la seule sortie possible de la crise politique actuelle, le décret-loi établissant une commission nationale consultative pour une nouvelle République n’a fait que crisper davantage tous ceux réclamant un dialogue et une véritable consultation dans le contexte d’une future réforme constitutionnelle. Par ailleurs, si la lutte contre la corruption est un objectif fondé, elle ne doit être utilisée ni comme slogan ni comme arme politique.

Enfin, la délégation a rappelé que le partenariat qui lie l’Union européenne à la Tunisie s’ancre dans un socle de valeurs. S’il est nécessaire de distinguer la situation politique à la situation économique dans le contexte actuel, il est tout aussi important de renforcer le lien entre coopération et droits économiques pour soutenir les Tunisiens que de défendre les valeurs partagées de démocratie et de libertés, et de réfléchir à de nouvelles modalités, y compris du principe de redevabilité.

La délégation de la Sous-Commission «Droits de l’Homme» du Parlement européen comprenait la Présidente de DROI Maria Arena (S&D, Belgique), et les députés Michael Gahler (PPE, Allemagne ; il était à Tunis en avril dernier), Andrea Cozzolino (S&D, Italie), Jaak Madison (ID, Estonie) et Karol Karski (ECR, Pologne)”.

 

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