Economie

Tunisie 2022 : Fitch Ratings prévoit un taux des déficits jumeaux à au moins 7% du PIB

Partager

Fitch Ratings prévoit dans un nouveau rapport paru hier mardi 7 juin 2022 que plus d’un quart des marchés émergents (ME) notés par l’agence connaîtront des déficits jumeaux d’au moins 4% du PIB en 2022, dans un contexte économique et financier difficile.

La prévalence des déficits jumeaux (en anglais twin deficits) correspond à une situation où on enregistre en même temps un déficit budgétaire et un déficit de la balance des transactions courantes.

La balance des transactions courantes regroupe, en général, les échanges de marchandises, les échanges de services, les flux de revenus et les transferts courants entre les résidents et le reste du monde alors que le déficit budgétaire est une situation où les dépenses de l’Etat dépassent structurellement les recettes, fiscales et autres.

L’augmentation de la prévalence des déficits jumeaux de plus en plus pesants, selon Fitch, reflète principalement la flambée des déficits budgétaires causée par la pandémie du Covid-19, ainsi qu’une augmentation du nombre des pays émergents enregistrant des déficits courants plus importants à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la hausse subséquente de l’énergie et de l’alimentation des prix.

Pour 2022, l’agence prévoit que les Maldives (B-), le Rwanda (B+), la Tunisie (CCC), l’Ouganda (B+), le Kenya (B+) et la Roumanie (BBB-) enregistreront des déficits jumeaux d’au moins 7% du PIB ; les Seychelles (B+), la Géorgie (BB), l’Ouzbékistan (BB-), la Namibie (BB) et la Macédoine du Nord (BB+) auront des déficits d’au moins 5% du PIB ; et Cabo Verde (B-), Lesotho (B), Maroc (BB+), Turquie (B+), Bénin (B+), Colombie (BB+), Pakistan (B-), Arménie (B+), Égypte (B+) et Ghana (B-) connaîtront des déficits d’au moins 4% du PIB.

D’après le rapport, les déficits jumeaux considérables viennent dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale, de hausse des taux d’intérêt de la Réserve fédérale américaine, du resserrement des politiques monétaires, d’un dollar américain fort, d’une inflation élevée et de hausse des taux directeurs nationaux. La flambée des prix alimentaires s’ajoute aux pressions sociales et fiscales.

En outre, on note que des déficits jumeaux peuvent indiquer des déséquilibres macroéconomiques et signifier que les déficits budgétaires dépendent du financement étranger en termes nets. Cela dit, les déficits jumeaux de certains marchés émergents reflètent des prêts – projets qui sont donc effectivement préfinancés.

Fitch a déclassé neuf marchés émergents différents jusqu’à présent en 2022, plus que l’ensemble de 2021, et ce, par rapport à un seul ajustement/mise à niveau. Un record de 48% des marchés émergents notés par Fitch se situent désormais dans les catégories de notation « B » /« C »/« D ».

Plusieurs indicateurs révèlent que les effets de la crise russo-ukrainienne ont impacté durement l’économie tunisienne et aggravé les déséquilibres des agrégats macroéconomiques du pays. Outre l’effet de l’inflation importée, qui touche particulièrement les citoyens qui voient leur pouvoir d’achat s’éroder, l’Etat tunisien aussi fait face à une aggravation inquiétante des déséquilibres de ces indicateurs économiques.

Les répercussions de la flambée des cours de l’énergie et des produits agricoles vont aggraver le déficit budgétaire prévu par la loi de finances en cours d’exécution. Récemment, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Marouane Abassi a indiqué que le déficit budgétaire devrait s’établir à 9,7% du PIB en 2022, contre 6,7% prévus par la loi de finances en cours.

Cette aggravation s’explique par la flambée des prix des produits agricoles, alimentaires et énergétiques. A ce titre, alors que la loi de finances a été établie sur la base d’un prix du baril de pétrole à 75 dollars, celui-ci se négocie actuellement à 123 dollars, après avoir frôlé les 130 dollars en mars dernier (128 dollars le 8 mars).

D’ailleurs, depuis le début de l’année, le cours du baril n’est jamais descendu, pas une seule fois, sous la barre des 75 dollars. Ce gap entre les prévisions et le cours réel accentue le déficit budgétaire. De même, la flambée du cours des céréales subventionnées, notamment le blé, s’est traduite par une hausse significative de la facture de compensation.

Laissez un commentaire
Publié par
Mohamed Ben Abderrazek