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Tunisie : Chiffres officiels euphoriques vs morosité économique, qui croire ?

Tunisie : Chiffres officiels euphoriques vs morosité économique, qui croire ?

C’est dès le début des années 1950 que les sciences statistiques connurent des applications dans plusieurs domaines scientifiques et économiques.

Toutefois, les statistiques ont connu leurs premières crises de confiance en France avec des débats sur l’instrumentalisation politique de cette discipline dans les domaines de l’économie et du social.

En Tunisie, les gouvernants actuels ne cessent de démontrer, chiffres à l’appui, l’amélioration et la tendance « positive » de la situation économique et sociale du pays. Trois principaux indicateurs sur lesquels on va s’arrêter pour analyser leur pertinence ainsi que la situation économique du pays : le taux de croissance, l’inflation et le chômage.

Contre toute attente, l’Institut national de la statique (INS) vient d’annoncer à la fin de la semaine dernière que le taux de croissance a ralenti pour atteindre 1% en 2019 contre 2,7% en 2018. Il s’agit d’une situation qui va à l’encontre de l’affirmation continue des autorités que l’emploi, le développement et l’investissement sont en nette progression, parallèlement à l’amélioration des recettes de secteurs stratégiques tels que le phosphate brut dont la production n’a pas dépassé 3664.4 mille tonnes durant les onze premiers mois de l’année 2019.

Quant à l’inflation, selon l’INS, en janvier 2020, les prix à la consommation ont augmenté de 0,6% après avoir enregistré 0,3% en décembre 2019. Cette hausse s’expliquerait essentiellement par l’augmentation des prix des produits alimentaires de 0,8%, de ceux des produits et services de santé de 1,2%, des meubles et des articles ménagers de 0,9% et des produits et services divers de 0,9%.

Néanmoins, cette augmentation des prix n’a pas empêché le taux d’inflation de baisser à 5,9%, d’après l’INS, en janvier écoulé contre 6,1% le mois précédent, ce qui constitue une réelle énigme. Mieux encore, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT) avait annoncé, quant à lui, quelques jours avant, que l’inflation était passée à 5,8 % en janvier 2020.

Cet écart montre que la BCT s’appuie sur des sources autres que l’INS. Deux sons de cloches nettement différents.

Côté emploi, le gouvernement n’a jamais cessé de marteler que grâce à sa « bonne » gouvernance, des milliers de postes d’emploi auraient été créés en 2019 et que le taux de chômage a enregistré une baisse à 14.9% au 4ème trimestre 2019 , pour atteindre 623.9 mille chômeurs contre 628.3 mille au 3ème trimestre selon l’INS.

S’agissant du taux de chômage des diplômés de l’enseignement supérieur, il a atteint 27.8% contre 28.6%. Par ailleurs, le nombre des occupés a atteint 3566.4 mille contre 3543.6 mille occupés soit une création nette de postes d’emplois de 22.8 mille en un seul trimestre.

Ceci veut dire que si les autorités poursuivront leur effort, à ce rythme, le problème du chômage, selon les chiffres de l’Institut National de la Statistique arrêtés à fin décembre 2019, sera résolu d’ici 7 à 8 ans, selon un modèle simple de transposition arithmétique mobile.

En somme, cette situation laisse perplexe, à plus d’un titre, quant à la cohérence de l’ensemble des chiffres présentés par le gouvernement dont l’interprétation normale et logique du point de vue économique ne peut être faite que dans deux sens : le premier est que la Tunisie est prête à atteindre son équilibre de plein emploi très prochainement, ce qui constitue l’objectif ultime de tout gouvernant, le second est que notre pays est déjà un modèle en matière d’harmonisation financière, économique et sociale et que les notations de l’économie nationale par les maisons de rating se sont basées, parait-il, sur des arguments peu fondés voire même injustes.

Cette cacophonie des chiffres plus qu’éloquente exprime l’approche surréaliste de la crise que vit réellement le pays.

À croire les chiffres officiels indiquant ces performances économiques, deux hypothèses viennent à l’esprit : soit que les principes de bases et les théories macroéconomiques et statistiques sont à corriger, soit qu’il s’agit de statistiques et indicateurs économiques d’un pays autre que la Tunisie.

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