La machtia de Jebeniana, un couvre-chef féminin traditionnel en laine tissée à la main, a été désignée comme le tout premier produit artisanal tunisien à bénéficier d’un mécanisme de protection et de valorisation via l’attribution d’une appellation d’origine collective. Ce choix symbolique met en lumière un élément-clé du patrimoine culturel immatériel local de la ville de Jebeniana, située dans le gouvernorat de Sfax.
L’initiative s’inscrit dans le cadre du projet « La propriété intellectuelle au service des femmes artisanes en Tunisie », fruit d’une coopération entre le Bureau national de l’artisanat tunisien (ONAT) et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), signé l’année dernière.
Lancement officiel du projet : 30 artisanes formées pendant un an
Le directeur général de l’OMPI, Daren Tang, a annoncé lundi le lancement officiel de la phase opérationnelle du projet, lors d’un événement organisé au siège de l’ONAT, en présence du ministre du Tourisme, Soufiane Tekaya.
Le programme prévoit une formation d’un an pour 30 artisanes spécialisées dans la confection de la machtia, un savoir-faire transmis de génération en génération et aujourd’hui menacé de disparition. Ce projet vise à renforcer leur autonomie économique en transformant leur savoir-faire en source de revenu pérenne et protégée.
Une stratégie de valorisation intégrant la propriété intellectuelle
Dans une déclaration à l’agence TAP, Leila Maslati, directrice générale de l’ONAT, a précisé que l’encadrement portera notamment sur la sensibilisation à l’importance de la propriété intellectuelle dans la valorisation de leurs produits.
L’objectif est d’accompagner ces artisanes vers l’adoption d’une marque collective spécifique, qui sera enregistrée à l’Institut national de la normalisation et de la propriété industrielle (INNORPI), puis au niveau international via l’Accord de Lisbonne, ratifié par la Tunisie en 2023.
Une reconnaissance internationale en perspective
L’inscription internationale de la machtia permettra d’en garantir l’authenticité et de la protéger contre les imitations, tout en promouvant le produit sur les marchés étrangers. Une campagne de communication et de marketing dédiée sera également lancée pour positionner la machtia comme une pièce artisanale d’exception, portée par environ 600 artisanes actives dans la région.
Une exposition pour célébrer un savoir-faire menacé
À l’occasion du lancement du projet, un espace d’exposition a été aménagé au sein de l’ONAT, en collaboration avec la délégation régionale de l’artisanat de Sfax. Les visiteurs ont pu découvrir une démonstration en direct des différentes étapes de fabrication de la machtia : de la préparation de la laine à la teinture, en passant par le tissage traditionnel.
Trois artisanes du collectif “Sitt Nafissa” de Jebeniana, fondé en 2022, ont animé cet atelier. Le collectif œuvre depuis sa création à la préservation et à la valorisation de la machtia, en encadrant les artisanes et en luttant contre la disparition de ce savoir-faire ancestral.
Un modèle de développement local et durable
Ce projet tuniso-suisse s’inscrit dans une démarche de développement durable axée sur l’autonomisation des femmes et la protection du patrimoine immatériel. Il ambitionne de faire de la propriété intellectuelle un levier d’innovation, de créativité et de reconnaissance économique.
Pour Daren Tang, ce projet illustre parfaitement le rôle de la propriété intellectuelle dans la création d’opportunités économiques, en particulier dans les régions riches en héritage culturel. « Protéger la machtia, c’est protéger un pan du patrimoine tunisien tout en assurant un avenir économique à celles qui la fabriquent », a-t-il affirmé.
(Agence Tunis Afrique Presse)
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