Economie

Tunisie – L’exclusion financière aggrave la marginalisation sociale

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Malgré l’ancrage du système financier et bancaire dans la sphère économique
nationale et son organisation plutôt adéquate, le taux de bancarisation des populations en Tunisie et leurs accès aux services financiers et bancaires restent faibles, privant, ainsi, des franges entières de la société d’être intégrées au niveau de la finance formelle. Côté statistiques, les évaluations sont, à ce niveau, assez, divergentes.

Le président de l’Observatoire de l’Inclusion Financière, Abdelatif Ben Hedi a déclaré hier lundi 21 mars 2022 que les deux tiers des Tunisiens ne disposent pas d’un compte bancaire et que le tiers des citoyens disposant d’un compte bancaire, l’utilisent uniquement pour retirer leurs salaires mensuels.

Seulement 9% des coptes sont des comptes actifs, le reste des comptes n’enregistrent que trois opérations par mois.

Selon Ben Hedia, l’inclusion financière est faible en Tunisie surtout qu’un projet de loi visant à renforcer la bancarisation des tunisiens a été présenté en 2020, mais celui-ci n’a pas été examiné. Il a précisé que des règlementations telles que celles relatives à l’économie sociale et solidaire et l’investissement participatif qui pourraient desserrer l’étau de l’exclusion financière restent toujours sans textes d’application.

Le retard en matière de technologies et de numérisation a été critiqué au mmee titre que les plateformes e-payement.

Fut –il rappeler, par ailleurs, que rares sont les recherches qui se sont intéressées au phénomène de l’exclusion financière et bancaire en Tunisie. L’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE) a élaboré un rapport pour étudier ce phénomène.

Le rapport s’est basé sur des approches statistiques variées pour cerner l’exclusion bancaire à l’échelle régionale et nationale à travers une batterie d’indices composites afin d’étaler des recommandations.

L’IACE a indiqué dans son rapport dévoilé en 2017, que l’inclusion financière est faible à l’échelle nationale avec un indice composite (IFI-N) égal à 0,284. Cette situation est expliquée par la faiblesse du score du sous-indice de disponibilité de services financiers (0,275), bien que les sous-indices d’usage relatifs aux services bancaires sont jugés « moyens à modérés » avec des scores respectifs de (0,319) et (0,476).

Ainsi et compte tenu des résultats du dernier recensement général de la population et de l’habitat de 2014 et qui fait état que le nombre des familles est de 2.712.976, le nombre total des familles qui sont totalement privés de services bancaires s’élève à 1 million 160 milles. 

Il est important de préciser qu’on entend par l’exclusion financière et bancaire, un processus par lequel une personne fait face à des problèmes pour bénéficier de services et produits financiers et/ou bancaires répondant à ses besoins pour mener une vie sociale habituelle.

Pour une large frange d’économistes, l’accès des familles aux services financiers et bancaire est, une préoccupation particulière en raison de ses suites économiques et sociales menant à la marginalisation, la stigmatisation, la consécration de la pauvreté et du creusement des inégalités.

Les pouvoirs publics censés faciliter l’accès aux produits et services financiers et bancaires à travers des politiques appropriées, ne font pas assez pour changer une réglementation inadaptée renforçant l’exclusion.

Deux facteurs principaux peuvent être présentés, à ce titre, à savoir les coûts du crédit et les exigences souvent liées aux garanties. Les coûts du crédit tiennent aux conditions tarifaires et aux coûts des commissions des établissements financiers qui affichent une hausse de 10 à 15% par an.

Quant à l’exclusion par les exigences de garanties et malgré les niveaux assez élevés des taux d’intérêt (12 à 15%), la plupart des clients est disposée à les supporter. Théoriquement, les garanties diminuent la probabilité de défaut de l’emprunteur. Mais en réalité, ces garanties constituent une véritable contrainte à l’accès au crédit puisque le taux de la garantie en Tunisie dépasse le montant du crédit de 180%, en moyenne.

Une réflexion profonde incluant aspects réglementaires et institutionnels doit être menée pour arrêter l’exclusion bancaire des familles en Tunisie.

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek