C’est un Vladimir Poutine tantôt confiant et conquérant, tantôt agacé et inquiet qui a fait face aux médias internationaux hier mercredi 5 juin, à Saint-Pétersbourg. Un long entretien de près de 3 heures (à ajouter au retard du maître du Kremlin, de plusieurs heures sur l’horaire annoncé), avec une quinzaine d’agences de presse, tout de même. Ce qu’on a retenu de tout ce verbiage c’est qu’il doit y avoir le feu au lac pour que le président russe daigne sortir du bois, lui qui n’est pas friand des joutes médiatiques, surtout avec une presse internationale qui a la réputation de s’affranchir des lignes rouges et c’est très bien ainsi. Evidemment Moscou n’aime pas du tout.
Poutine est terrifié et le cache mal…
Maintenant le message principal livré par Poutine et qui en dit long sur son inconfort moral : Si les Occidentaux franchissent le rubicond des armes à longue portée pour aider l’Ukraine à frapper le sol russe le Kremlin n’hésitera pas lui aussi à donner des armes à des pays tiers pour pulvériser les intérêts occidentaux…
“Si quelqu’un considère possible de fournir de telles armes dans la zone de combats pour frapper notre territoire (…), pourquoi n’aurions-nous pas le droit de fournir nos armes du même type dans des régions du monde où seront frappées les installations sensibles des pays qui agissent ainsi contre la Russie ?“, a lâché Poutine devant les médias, en marge du Forum économique de Saint-Pétersbourg.
Bon, il faudra déjà que Moscou déniche des pays suffisamment costauds et téméraires – ou suicidaires – pour accepter cette besogne, et ensuite affronter le courroux et la puissance de feu de l’Occident. Qui pour faire ce boulot ? Vu d’ici nous ne voyons personne. De l’autre côté aussi, il faut le reconnaitre, certains membres de l’OTAN tels que l’Italie refusent qu’on se serve de leurs armes sur le sol russe. Donc à ce stade rien n’est acté, mais la menace est suffisamment sérieuse pour terrifier Poutine.
Au sujet des instructeurs militaires occidentaux, notamment français, le président russe est formel : ils sont “déjà en Ukraine, et y subissent des pertes“, des dégâts humains sur lesquels “les États-Unis et les États européens préfèrent garder le silence“, soutient Poutine. Pourtant jusqu’ici Paris en reste au stade des annonces et aucun instructeur français n’a été officiellement envoyé sur le théâtre de guerre ukrainien. Jusqu’à nouvel ordre les USA refusent toujours d’envoyer des instructeurs et aucun pays occidental n’a reconnu le déploiement de ses militaires en Ukraine.
La Paix version Poutine…
Le président russe a redit que son pays est prêt à discuter des conditions de la paix avec son voisin et que la meilleure voie pour stopper la guerre est que les Occidentaux “cessent de livrer des armes” à l’Ukraine. Evidemment les soutiens de Kiev ne l’écouteront pas, il y a longtemps que l’Occident n’écoute plus Poutine, ne croit plus en ce qu’il dit, pas une once, et ça a commencé quand il a annexé la Crimée en 2014…
Quant à la Paix qu’il brandit, qu’est-ce qu’il entend par ça ? Est-ce un quitus pour s’asseoir sur les 5 régions ukrainiennes qu’il a arrachées ou de vraies et franches négociations qui se termineraient par une évacuation totale des régions occupées et un Pacte de non-agression garantie par une force internationale ? C’est sur cette seule base que Kiev acceptera de s’asseoir à la table des négociations. Les 10 conditions fixées par le président Volodymyr Zelensky et rien d’autre. C’est ce qui sera martelé lors du Sommet de la Paix, ces 15 et 16 juin en Suisse.
“Fournir des armes à une zone de conflit est toujours une mauvaise chose. Surtout quand les fournisseurs ne se contentent pas de fournir des armes, mais qu’ils les contrôlent. C’est une mesure très grave et très dangereuse“, a redit Poutine devant la presse. Oui, certes, mais qui est responsable de cette escalade folle ? Qui est allé semer la mort et la désolation chez son voisin, pour in fine y camper et coloniser chaque jour des kilomètres carrés de plus ? Moscou refuse d’assumer le mal qu’il a fait à l’Ukraine, à l’Humanité.
Le président russe a parlé à l’Occident à la veille des festivités célébrant le 80e anniversaire du Débarquement en Normandie, événement qui a précipité la défaite de l’Allemagne nazie et la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour lesquelles l’armée de Joseph Staline a joué un grand rôle, il faut le reconnaître. La Russie n’a pas été invitée à Paris, aux côtés des autres alliés. Ce n’était pas censé arriver, mais ça les Russes ne le doivent qu’aux visées hégémoniques délirantes de leur président. Il n’y a pas si longtemps – en 2017 – le président français déroulait le tapis rouge à Poutine. L’invasion de l’Ukraine est passée par là.
Pourtant l’homme continue de nier les évidences, devant la presse internationale : “Ne cherchez pas ce qui n’existe pas (…), ne cherchez pas nos ambitions impériales, elles n’existent pas“. Ah bon ?! Et la ribambelle de drapeaux de la Russie contemporaine, de la Russie impériale et de l’URSS flanqués devant le siège de Gazprom où Poutine a invité les médias ? “On invente comme quoi la Russie veut attaquer l’Otan (…) Qui a inventé cette absurdité ? Des conneries“, fulmine le maître du Kremlin…
C’est ce qu’il avait seriné durant des mois, avec véhémence, quand on l’a accusé de cuisiner un assaut contre l’Ukraine. On a vu la suite, quotidiennement depuis le 24 février 2022. Si Poutine veut regagner un peu de crédibilité qu’il commence par stopper son armée et entamer son retrait derrière ses frontières. Après ça le monde pourra parler Paix avec lui. Pas avant.
Que se passe-t-il en Tunisie?
Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!
Commentaires