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USA – Expulsions scandaleuses : Deux migrants asiatiques renvoyés au Soudan du Sud

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L’administration américaine est de nouveau au cœur d’une vive controverse après avoir expulsé mardi 20 mai 2025 plusieurs migrants vers le Soudan du Sud, dont deux ressortissants d’Asie, une décision dénoncée par leurs avocats comme une violation flagrante du droit international et d’une décision judiciaire fédérale.

Selon des documents déposés devant la justice américaine, deux migrants identifiés par leurs initiales — « N.M. », un Birman, et « T.T.P. », un Vietnamien — ont été renvoyés à bord d’un avion en direction du Soudan du Sud, un des pays les plus instables et les plus pauvres d’Afrique.

Ce transfert aurait été effectué sans qu’ils aient pu faire valoir leur droit à une protection au titre de la Convention des Nations unies contre la torture, comme l’exige pourtant un jugement rendu en avril dernier.

Une expulsion vers un pays tiers sans lien

Les avocats ont affirmé qu’ils avaient été informés par e-mail, par un agent de détention, de l’expulsion de leur client « N.M. » le matin même du 20 mai. Un autre cabinet représentant « T.T.P. » a signalé une procédure identique. Au moins dix autres personnes seraient montées à bord du même vol, selon des témoignages internes non confirmés par les autorités.

Ce qui choque particulièrement, au-delà de la destination, c’est l’absence totale de lien géographique ou national entre ces migrants asiatiques et le Soudan du Sud, pays vers lequel ils ont été renvoyés sans motif apparent. Le Soudan du Sud, en proie à des violences persistantes et à une crise humanitaire sévère, ne dispose d’aucun cadre officiel pour accueillir des ressortissants étrangers expulsés, encore moins ceux sans aucun lien avec son territoire.

Violation présumée de décisions judiciaires

Dans une affaire précédente concernant des expulsions vers la Libye, un tribunal fédéral avait statué en avril que toute expulsion vers un pays tiers devait obligatoirement être précédée de la possibilité de demander une protection au titre de la Convention contre la torture. Les avocats dénoncent le fait que cette règle n’a pas été appliquée.

Ils réclament désormais l’annulation immédiate des expulsions, ainsi que le retour sur le territoire américain des personnes concernées, soulignant que l’administration aurait délibérément contourné la procédure légale. Aucune réponse officielle n’avait encore été apportée mardi soir par les services de l’immigration américaine (ICE) aux demandes des avocats ni aux sollicitations de l’AFP.

Une politique d’expulsion radicale et contestée

Depuis le retour de Donald Trump à la présidence, la lutte contre l’immigration clandestine est redevenue une priorité absolue de l’exécutif américain. Le chef d’État républicain n’a pas hésité à recourir à des lois anciennes, dont une datant de 1798, pour justifier certaines expulsions, notamment celle de 250 personnes vers le Salvador en février, en majorité des Vénézuéliens, accusés sans preuves formelles d’appartenir à des gangs.

Le discours sécuritaire, souvent teinté d’expressions virulentes comme « invasion de criminels étrangers », alimente un climat de tension et de polarisation sur le traitement des migrants aux États-Unis. Plusieurs décisions de justice ont toutefois freiné temporairement certaines initiatives du gouvernement, notamment par la Cour suprême.

Une nouvelle controverse diplomatique

En avril dernier, Washington avait interdit l’octroi de visas aux ressortissants sud-soudanais, au motif que leur pays refusait de reprendre ses citoyens expulsés. L’ironie de cette mesure contraste avec la décision récente de renvoyer des étrangers asiatiques au Soudan du Sud, un geste qui risque d’alimenter la confusion diplomatique et de remettre en question le respect par les États-Unis de leurs engagements internationaux.

En l’absence de clarifications officielles, les organisations de défense des droits humains redoutent une généralisation de pratiques d’expulsion expéditives vers des pays tiers, hors de tout cadre légal, mettant en péril la vie des personnes concernées et compromettant les obligations internationales de protection auxquelles les États-Unis ont souscrit.

L’affaire pourrait ainsi marquer un nouveau tournant dans les relations tendues entre l’administration américaine, la justice fédérale et les instances internationales des droits de l’Homme.

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