Les tensions montent entre la République du Niger, dirigée par un conseil militaire depuis le coup d’État de 2023, et ses partenaires chinois du secteur pétrolier.
Deux lettres consultées par l’agence Reuters révèlent que le ministère nigérien du Pétrole a demandé le départ de plusieurs travailleurs chinois présents sur le territoire depuis plus de quatre ans. Une mesure qui pourrait affecter des dizaines d’employés et fragiliser la coopération énergétique entre les deux pays.
Vers un recentrage sur la main-d’œuvre locale
Dans un contexte régional où plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest cherchent à reprendre le contrôle de leurs ressources naturelles, le Niger affiche clairement sa volonté d’augmenter la présence de personnel national dans les secteurs stratégiques. À l’image du Mali ou du Burkina Faso, Niamey impose de nouvelles conditions aux entreprises étrangères, notamment chinoises, actives dans l’extraction et le raffinage du pétrole.
Dans deux courriers datés des 20 et 21 mai 2025, le ministre du Pétrole, Sahabi Amadou, exige de la Société chinoise des pétroles CNPC et de sa filiale Soraz, chargée de la raffinerie de Zinder, de mettre fin aux contrats de certains expatriés, en particulier ceux ayant dépassé quatre années de présence continue dans le pays.
Des relations diplomatiques sous pression
Dans l’un des documents, le ministre nigérien refuse une rencontre sollicitée par le PDG de la compagnie chinoise, arguant d’un manque de respect des réglementations locales. Toutefois, dans une seconde lettre adressée à Soraz, il adoucit quelque peu sa position en évoquant une application au cas par cas, laissant une marge de manœuvre pour la présence de certains cadres jugés essentiels.
De son côté, le ministère chinois des Affaires étrangères a réagi par la voix d’un porte-parole qui a défendu le bilan de la CNPC au Niger. Il a déclaré que « la Chine s’est toujours engagée sur une base de vérité, d’amitié et d’avantages partagés dans sa coopération avec l’Afrique », rappelant les contributions économiques et sociales de Pékin au développement nigérien.
Un secteur pétrolier en pleine expansion
En dépit de ces tensions, le Niger continue d’afficher des performances remarquables dans le domaine énergétique. En 2024, le pays a exporté plus de 14 millions de tonnes de pétrole brut via le port de Sèmè-Kpodji au Bénin, selon les chiffres officiels.
Le revenu pétrolier du Niger a ainsi atteint 325 millions de dollars à la fin de l’année dernière, selon le ministre de l’Énergie, ce qui représente une source essentielle de devises pour un État enclavé et soumis à des sanctions internationales depuis la prise de pouvoir militaire.
Ainsi, la décision du gouvernement nigérien de restreindre la présence de certains employés chinois dans ses installations pétrolières illustre un tournant stratégique. Sous l’égide de la junte, le Niger cherche à renforcer sa souveraineté économique, quitte à bousculer les équilibres diplomatiques.
Reste à savoir si la volonté de négociation évoquée par Pékin permettra d’éviter un bras de fer plus dur. Car si l’enjeu immédiat concerne quelques dizaines de contrats de travail, c’est la stabilité d’un partenariat énergétique clé pour le Niger — et une vitrine de l’influence chinoise en Afrique — qui est en jeu.
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