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Black-out Facebook: La baffe à la communication jupitérienne

Black-out Facebook: La baffe à la communication jupitérienne

Une panne mondiale a affecté avant-hier les 4 grandes applications Facebook, Messenger, Whatsapp et Instagram.

En plus des répercussions énormes qui ont été engendrées par ce dysfonctionnement, le black-out des plateformes étrangères a levé le voile sur la dépendance des institutions de l’Etat notamment la présidence de la République aux réseaux sociaux.

Pendant les quelques heures de panne, les Tunisiens n’avaient, beaucoup plus qu’avant, aucune idée sur l’actualité politique et le fonctionnement des rouages de l’Etat en l’absence de toute visibilité possible.

Cette situation préoccupante a poussé plusieurs observateurs à s’interroger sur le sort des institutions de l’Etat en l’absence des réseaux sociaux laissant la place aux interprétations et aux scénarios possibles.

Au cas où, un coup d’Etat a été mené, le nouveau gouvernement a été formé ou des responsables ont fui le pays, personne n’aurait pu le savoir.

Malgré les nombreuses activités qui ont été recensées à ce jour, telles que la rencontre de Kais Saied avec la nouvelle Cheffe du gouvernement Nejla Bouden et le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) Youssef Bouzakher ces réunions n’ont trouvé de la visibilité que suite à la reprise des applications en question.

Il nous a fallu, de ce fait, un black-out des plateformes étrangères pour paralyser l’institution suprême de l’Etat : La présidence de la République.

Présidence de la République: L’institution qui s’appuie sur les réseaux

Il était prévisible que la communication de la Présidence de la République soit axée sur les réseaux sociaux notamment Facebook, l’un des outils communicationnels préférés du Chef de l’Etat Kais Saied depuis le démarrage de sa campagne électorale.

Depuis son arrivée à Carthage, le constat est flagrant:  Une volonté claire d’imposer une communication plutôt verticale aide Kais Saied à raréfier la prise de parole présidentielle, à promouvoir ses activités, son projet et ses positions à sa propre manière et ce, contrairement à ses prédécesseurs qui étaient actifs sur les autres médias.

Un usage intensif des réseaux sociaux

Ce recours aux réseaux s’explique  par les opportunités diverses qu’ils mettent en avant. Ils ont, en réalité, permis au Chef de l’Etat non seulement de s’exprimer librement sans l’intervention des médiateurs mais aussi de s’adresser directement au peuple qui avait une appétence indescriptible et sans précédent pour savoir les nouvelles décisions présidentielles. Il s’agit, à ce titre, d’une communication directe.

De plus, les réseaux sociaux notamment Facebook constituent pour Saied un moyen efficace pour faire passer ses messages loin de toute interprétation, rectification, reformulation ou reprise médiatique. Ce dernier préfère communiquer directement, librement, continuellement et sans restriction.

Dans ce cas, l’usage du numérique s’inscrit dans le cadre d’une approche jupitérienne de la communication dont le but est de donner plus d’importance au locuteur et ses discours, soit Kais Saied et sa parole présidentielle.

Black-out et boycott des médias traditionnels

Néanmoins, il ne suffit pas d’utiliser ces réseaux pour communiquer avec tous les citoyens surtout que le Président a quasiment rompu le contact avec les médias traditionnels mettant de côté toutes les théories prouvant l’efficacité de la communication hybride comme un aspect stratégique.

A ce propos, de nombreuses composantes de la société civile dont le SNJT, l’association ADLI, et l’ATFD ont lancé des cris d’alerte face à la stratégie du black-out exercée par la présidence de la République depuis octobre 2019.

«Pas de points de presse, pas de réunions périodiques avec les journalistes et surtout aucune visibilité sur le fonctionnement des rouages de l’Etat » ont-ils indiqué.

A l’instar du boycott des canaux traditionnels relatifs à la diffusion de l’information officielle, plusieurs exigences de prudence se mettent en avant quant à l’usage d’un seul canal puisque toute lacune ou erreur se fait sentir presque instantanément.

En outre, il est important de savoir que les publics auxquels s’adresse la présidence de la République via Facebook ne sont pas forcément représentatifs de toute la population tunisienne. De plus, l’utilisation importante des réseaux ne pose pas seulement le problème d’un public réduit mais met en œuvre également la logique de verticalité via l’étiquette de la communication jupitérienne.

Une telle communication réduite et basée sur un seul canal, notamment dans une période critique que traverse la Tunisie, ne peut pas être assez efficace en temps de crise puisqu’elle peut présenter des anomalies face à tout acte perturbant son bon fonctionnement.

Comme on l’a constaté pendant les  dernières 48 heures, même un black-out affectant des plateformes étrangères peut porter atteinte à la continuité de l’Etat d’un côté et du droit des citoyens d’accéder à l’information de l’autre côté.

Il est, en conclusion, plus que jamais nécessaire de réviser la communication institutionnelle en Tunisie et notamment celle de la présidence de la République.

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