L’Égypte intensifie ses efforts pour sécuriser son approvisionnement énergétique face à une baisse critique de la production nationale et à la réduction des importations en provenance d’Israël.
Selon l’agence Reuters, des discussions sont en cours avec plusieurs entreprises énergétiques et sociétés de négoce internationales pour l’acquisition de 40 à 60 cargaisons de gaz naturel liquéfié (GNL), afin d’éviter une nouvelle vague de coupures d’électricité durant la période estivale, où la demande atteint son pic.
Jusqu’à 3 milliards de dollars pour éviter les coupures
Avec les prix actuels du gaz, ces achats pourraient coûter jusqu’à 3 milliards de dollars, une somme colossale pour un pays déjà sous forte pression financière. Le président Abdel Fattah al-Sissi a exhorté son gouvernement, mercredi dernier, à prendre toutes les mesures nécessaires à l’avance afin de prévenir toute nouvelle interruption de l’alimentation électrique.
Le recours au GNL s’avère actuellement plus flexible en matière de modalités de paiement que le fioul lourd, qui reste néanmoins une option à l’étude si les prix du GNL deviennent trop élevés.
Baisse de production et retour au statut d’importateur net
La situation énergétique égyptienne s’est fortement dégradée depuis deux ans. La production de gaz a atteint en février son plus bas niveau depuis neuf ans, obligeant l’Égypte – pays le plus peuplé du monde arabe – à revenir au statut d’importateur net dès 2023. Le pays a dû abandonner ses ambitions d’exportateur vers l’Europe.
En 2024, l’Égypte a déjà importé 1,84 million de tonnes de GNL, représentant 75 % de ses importations annuelles, selon les données de S&P Global Commodity Insights. Les besoins pourraient atteindre 60 cargaisons d’ici fin 2025, voire grimper à 150 à plus long terme, selon un acteur du secteur.
Les fournisseurs pressentis : Qatar, Algérie et Aramco
Le Caire serait actuellement en pourparlers avec plusieurs pays producteurs, dont le Qatar, l’Algérie et l’Arabie saoudite via la société Aramco, en plus de grandes sociétés de négoce internationales. Les tractations incluent également l’importation d’un million de tonnes de fioul lourd.
Mais ces efforts se heurtent à une réalité financière difficile : le manque de devises étrangères a retardé le paiement des compagnies pétrolières internationales, ce qui a freiné l’exploration et ralenti la production locale.
Chute des approvisionnements israéliens et hausse des prix
La crise s’est intensifiée avec la réduction des flux en provenance du champ gazier offshore israélien Léviathan, actuellement en maintenance. Ce recul a conduit à des coupures ou à une baisse des livraisons de gaz à plusieurs usines de production d’engrais pour au moins 15 jours. Une interruption prolongée de ces usines pourrait affecter les exportations d’engrais, une source majeure de devises pour l’Égypte.
Selon la Joint Organizations Data Initiative (JODI), le gaz israélien représente entre 40 et 60 % des importations égyptiennes, couvrant 15 à 20 % de la consommation nationale. Cette dépendance accroît l’exposition du pays à toute fluctuation des prix ou interruptions d’approvisionnement.
Israël, de son côté, envisagerait d’augmenter de 25 % le prix de ses exportations de gaz. Alors que les prix actuels sont bas – environ 6 dollars par million de BTU selon le Brent – le GNL s’échange actuellement autour de 14 dollars par million de BTU sur les marchés asiatiques et européens.
Une porte-parole du ministère israélien de l’Énergie a précisé que les prix sont fixés par les négociations commerciales entre entreprises, sans intervention gouvernementale.
Une urgence stratégique et budgétaire
L’Égypte se trouve donc dans une course contre la montre. Elle doit assurer son approvisionnement énergétique à court terme pour éviter un été sous haute tension, tout en gérant une équation budgétaire délicate.
Si aucune solution structurelle n’est trouvée, le pays pourrait s’enfoncer davantage dans une spirale de dettes, de pénuries et de dépendances extérieures accrues.
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