Economie

La levée des subventions sur les carburants en Libye menace les gouvernorats du Sud de lourdes pertes

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La décision imminente des autorités libyennes de lever les subventions sur les carburants pese sur le trafic de ces produits vitaux en particulier dans le sud tunisien. Au fait, les carburants libyens représentent environ 17% de la consommation nationale, selon les données d’une étude publiée par la Banque mondiale.

Dans ce contexte, les contrebandiers des carburants, dont la plupart sont actifs dans les gouvernorats frontaliers du sud, profitent des prix bas des carburants en Libye, ce qui se traduit par une forte demande sur les marchés parallèles, sachant que les quantités de contrebande sont distribuées dans tous les gouvernorats du sud, atteignant même certains gouvernorats du centre qui se trouvent à plus de 250 kilomètres de la région de Ben Guerdane, qui est la principale zone d’approvisionnement.

Décision cruciale

Les récentes mesures prises par le gouvernement libyen pour entamer le processus de la levée des subventions sur les carburants ont suscité une grande inquiétude parmi les trafiquants et les contrebandiers sur les marchés parallèles notamment à la frontière sud du pays. En effet, le Premier ministre du gouvernement d’unité nationale Abdelhamid Dbaiba, a assuré que le phénomène de la contrebande du carburant ne peut être éradiqué qu’en levant les subventions. Il propose de les remplacer par un transfert monétaire direct aux citoyens.

Sous cet angle, Dbaiba a indiqué récemment que la moitié du budget libyen est consacrée aux subventions des carburants et a souligné, à ce titre, que les indicateurs des subventions deviennent « effrayants » tout en expliquant que l’État achète du carburant pour environ 3,5 dinars libyens (2,3 dinars tunisiens au taux de change officiel) et le vend pour 0,15 dinars libyens.

La Libye perd, à cause du trafic du carburant, au moins 750 millions de dollars (2,3 milliards de dinars tunisiens) par an alors que les subventions allouées ont atteint plus de 12 milliards de dollars (37,6 milliards de dinars tunisiens) en 2022, soit une augmentation de 71,4% par rapport à 2021, selon les données officielles.

Impact certain

Pour mettre en œuvre son plan de levée des subventions aux carburants, le gouvernement libyen a formé un comité pour discuter des solutions et des mécanismes de gestion de la facture des carburants ainsi que de la détermination des quantités qui seront accordées aux sociétés locales de distribution, avec des contrôles stricts pour que les citoyens puissent bénéficier convenablement des quantités rationnées. Le comité en charge du dossier est appelé à terminer ses travaux avant la fin de l’année 2023.

Il convient de signaler que le prix du carburant en Libye est parmi les moins chers au monde ce qui fait que ce pays alimente par le trafic de ce produit plusieurs pays voisins.

Alors que la contrebande de carburant engendre un gaspille des deniers publics en Libye, elle représente l’une des « alternatives » cruciales dans les gouvernorats du sud de la Tunisie, en particulier à Gabès, Médenine et Tataouine, où les taux de pauvreté atteignent 17,8%, tandis que le taux de chômage atteint 24,8%, selon les dernières données de l’Institut national de la statistique.

Absence d’alternatives

D’une manière générale, les estimations officielles libyennes indiquent qu’environ 25 millions de litres d’essence passent en contrebande chaque jour, dont 4 millions de litres parviennent à la Tunisie.

Les autorités sont plutôt peu « regardantes » depuis des décennies envers le transit de marchandises de contrebande entre les deux pays afin de garantir la stabilité sociale précaire dans les zones frontalières pauvres, ce qui a incité à proposer l’instauration de la zone de libre-échange de Ben Guerdane comme solution.

Si les finances publiques tunisiennes bénéficient indirectement de la contrebande de carburant en réduisant la facture exorbitante des importations énergétiques, elles subissent en contre partie des pertes fiscales pouvant atteindre 400 millions de dinars par an, selon des indicateurs confirmés par des sources concordantes.

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek